Opinion
- Éditorial - Les Dépêches de Brazzaville
- Réflexion - Jean-Paul Pigasse
- Le fait du jour - Gankama N'Siah
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- Brin d’histoire - Mfumu
- Tribune libre - Jean Kernaïse Mavoungou, docteur en finance de marché, directeur
- Idées-forces - Clotilde Ibara
- Analyse - Lucien Pambou,économiste, professeur d'économie et de sciences
Mythe et réalités de la Zone de libre-échange continentale pour l'AfriqueJeudi 29 Mars 2018 - 14:45 Le 21 mars 2018, quarante-quatre États africains sur cinquante-quatre ont signé l’accord créant la Zone de libre-échange continentale (Zlec) que vingt-deux signataires au moins doivent ratifier, après cent quatre-vingts jours pour qu’il devienne effectif. C’est la réalisation d’un projet économique majeur figurant dans l’agenda 2063 de l’Union africaine (UA), en discussion depuis 2012, dont les dissensions entre les membres freinent toujours les adhésions. 1) La nécessité de la Zlec : Actuellement, le commerce intra-africain ne représente que 16 % du commerce du continent et l’union des six régions économiques en une Zlec portera ce taux à 60% d’ici à 2022. Dans les unions économiques et les zones de libre-échange des autres continents, ce taux est de 70% dans l’Union européenne (1992), 52% en Asie (2016) et 50% en Amérique du nord (1994) ; alors que l’immigration intra-africaine représente plus de 60% des flux des migrations du continent. En cause, les obstacles tarifaires et non tarifaires qui rendent les économies africaines plus similaires que complémentaires. Disposant d’importantes matières premières qu’elles exportent plus qu’elles ne transforment sur place, ces économies importent des biens manufacturés des pays industrialisés, à tel point que la balance commerciale de la majorité d’entre elles est chroniquement déficitaire. 2) Les gains attendus : La libération du commerce élimine les droits de douane sur 90% des produits, sans limiter la liberté d'initiative de chaque État membre dans la réglementation de ses échanges avec les pays tiers et dans la fixation de sa politique économique et sociale. Le continent attend plus de 2 500 milliards de dollars de produit intérieur brut sur un marché de 1,2 milliard de consommateurs, et l’UA espère bénéficier de plus de 35 milliards de dollars de recettes par an. Les exportations industrielles africaines augmenteront de 53,3 %. 3) Des distorsions à corriger : Les États africains sont inégaux devant la libération du commerce et les réflexes protectionnistes persistent. Certains pays devront s’efforcer à accumuler au moins quatre-vingt-huit lignes de produits figurant dans la liste de la classification du commerce international, pour atteindre 80% des exportations de l’Afrique du Sud, 75 % du Maroc ou de la Tunisie, 40% du Kenya. Pour d’autres, une seule ligne de produit comme le pétrole, suffira au Soudan du Sud, à l’Angola, au Tchad, au Nigeria, à la Libye et au Congo. Ces derniers pays, faiblement diversifiés, s’exposent au dumping commercial et social des pays ayant un fort indice de compétitivité économique proche de la moyenne des économies avancées (5) comme l’Afrique du Sud (4,4), le Rwanda (4,3), le Maroc et le Botswana (4,2) et l’Algérie (4,1). 4) Aux mesures d’accompagnement nécessaires pour rassurer les États hésitants. Parmi lesquelles, le Mécanisme de suivi des barrières non tarifaires, élargissant le mandat de suivi du Mécanisme africain d’évaluation entre pairs pour y inclure les impacts de la Zlec et les Mécanismes de compensation et d’ajustement. Ensuite, un Fonds de développement sera nécessaire pour couvrir les éventuelles pertes de recettes des États. Enfin, une période de transition permettra aux pays dont la balance commerciale est déficitaire d’ajuster leurs tarifs nationaux aux tarifs de la Zlec, et d’étaler leurs pertes fiscales sur plusieurs années pour atteindre raisonnablement le seuil d’intégration continentale.
Emmanuel Okamba,Maître de conférences HDR en sciences de gestion Edition:Édition Quotidienne (DB) Notification:Non |