Pendant combien de temps encore les responsables politiques des pays riches vont-ils continuer à faire l’impasse sur l’un des bouleversements majeurs de notre époque dans l’élaboration des budgets et des stratégies de leurs Etats ? Les changements climatiques sont à l’origine de l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes. Sécheresses, inondations, typhons, cyclones sont autant de catastrophes naturelles qui devraient continuer à se multiplier dans les décennies à venir, provoquant la migration de la population.
Jusqu’à une certaine époque, le terme réfugié était lié aux personnes déplacées pour causes de conflits ou d’opinions ; on parlait ainsi de « réfugié de guerre » ou de « réfugié politique ». Mais depuis quelques années, une nouvelle vague de réfugiés a fait irruption sur la planète : « les réfugiés climatiques ». Est considéré comme réfugié environnemental ou climatique, toute personne forcée de quitter son habitation traditionnelle d’une façon temporaire ou permanente à cause d’une dégradation nette de son environnement qui bouleverse son cadre de vie et déséquilibre sérieusement sa qualité de vie.
Si le terme est apparu pour la première fois en 1985, dans un rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement, il n’existe à ce jour dans le monde aucun statut juridique pour les déplacés environnementaux. La Suède fait toutefois figure de pionnière en la matière en reconnaissant, depuis 2005, le droit à la protection pour les personnes victimes de catastrophes environnementales. Depuis 2009, une quarantaine de pays africains a également ratifié la convention de Kampala sur la protection et l’assistance des déplacés environnementaux inter-Afrique.
De nombreux rapports annuels pour les réfugiés montrent, depuis plusieurs années, qu’il y a plus de réfugiés climatiques que de réfugiés liés aux conflits dans le monde. Et ce n’est que le début : l’ONU prévoit deux cent cinquante millions de réfugiés climatiques dans le monde en 2050, et d’autres textes évoquent même le chiffre d’un milliard.
Rappelons que le premier droit de chaque être humain est de pouvoir vivre en paix chez soi. Or, le dérèglement climatique que nous connaissons remet en cause ce droit, et il est totalement illusoire de penser que cela va s’arrêter demain puisque nous ne subissons aujourd’hui que les tout premiers impacts de ce dérèglement.
Plutôt que de nier cette réalité, les gouvernants des pays riches, qui sont les plus pollueurs de la planète, devraient tout mettre en œuvre pour la gérer au mieux. Aucun mur, aucune déclaration, n’y viendra à bout. En revanche, en aidant les pays et les communautés les plus vulnérables à s’adapter, ils leur offrent l’opportunité de modérer les conséquences déstabilisatrices du choc climatique.
L’ancien président français, François Hollande, qui avait compris la gravité du problème, déclarait ceci sur le sujet : « Il y a déjà, aujourd’hui, davantage de réfugiés climatiques que de réfugiés de guerre. Quelque 80% d’entre eux vivent dans les pays du Sud, mais vont-ils y rester ? Si nous ne parvenons pas à un accord à Paris, ils seront encore plus nombreux dans dix, vingt ou trente ans ».
Les migrations climatiques peuvent être temporaires, comme après une catastrophe naturelle. Elles peuvent aussi devenir tout ce qu’il y a de plus définitif. C’est le destin tragique auquel sont promis les habitants de certains États insulaires. Car l’option de la disparition totale de certains territoires est désormais envisagée par les climatologues.