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Ces oubliés et ces méconnus de l'histoire congolaise: la Conférence nationale souveraine

Vendredi 16 Mars 2018 - 10:52

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L’expression fautive : « charité bien ordonnance» est passée dans l’histoire comme l’un des vestiges de la Conférence nationale. Le verbe dans tous ses états y fut roi. Anecdotique pour tout dire ! Il y a vingt-six ans, eut lieu la Conférence nationale. J’ai consacré à ce sujet, quelques « Brin d’Histoire ». Que reste-t-il de ce moment considéré comme une catharsis? Pas grand-chose. Comme à notre habitude, nous l’avons passé par pertes et profits. Son évocation est quasi accidentelle. La guerre a quasiment tout balayé. On est passé à autre chose.
« Le Roman historique de la Conférence nationale souveraine », c’est le titre de l’ouvrage que je présente le 19 mars prochain au « Radisson Blu », à partir de 15 h. C’est une exigence mémorielle. En 1991, le Congo s’est jeté à corps perdu dans la recherche d’une refondation politique aux forceps. Un raptus épileptique s’est emparé du Congo, entraînant « un Niagara verbal » qui a défoncé ou fait éclater de la chape de plomb qui recouvrait les libertés au Congo. Très vite, on s’aperçut que les jeunes gens, la fleur au fusil, n’avaient que des pétards mouillés logorrhéiques. Très vite aussi, chacun rechercha le parrainage du « vieux » de sa région d’origine. Cette allégeance gérontocratique fut un véritable travestissement de l’idéal de changement dont ils étaient porteurs. Certains s’appelèrent  « Forces du changement », alors même qu’ils n’avaient pas les armes pour réinventer le monde. Ils avaient oublié que les démiurges de la politique congolaise ont toujours su avec une déconcertante habilité survivre à tous les cataclysmes politiques. Ils reprirent rapidement la main et les jeunes croisés de la démocratie devinrent de vils porteurs d’eau.
En 2018, vingt-six ans après cette sarabande infernale des faux dévots de la démocratie, tout le monde est rentré dans les rangs. Juste des velléitaires. Au fond, au vu des acteurs présents dans la salle, la Conférence nationale, cette montagne d’illusions et de prétentions, allait accoucher d’une souris. La moisson fut maigre : le multipartisme, la liberté de la presse, pour l’essentiel. Des cassettes sur la Conférence nationale circulent encore dans le pays. Mais aucune « recension » écrite de cet événement n’a été faite à ce jour.
 « Le Roman historique de la Conférence nationale », titre que je dois au Pr Lefouoba, en est une. Authentique. Il revient sur les propos tenus lors de cette grand’messe, il y a plus d’un quart de siècle. Les jeunes qui n’ont pas vécu cet événement qui participe de la culture citoyenne, ont donc un document exceptionnel, pour se replonger dans l’atmosphère de ce pugilat de tous contre un. Faut-il le rappeler, le président de la République, pendant cette période, dût assumer les errements collectifs. Les gardes chiourmes qui l’entouraient avaient quitté le navire. Comme si cette parenthèse de déloyauté n’avait jamais existé, ils sont revenus sur le bateau, prêts chaque fois à le quitter, à la moindre houle. 
Faut-il, vingt-six ans après, rappeler que face aux phraseurs aux propos incandescents, Denis Sassou N’Guesso a révélé sa maturité, ne se résignant pas au conformisme de circonstance, volontairement corrosif et subversif. Il a résisté, défiant les grognards qui maniaient un verbe blasphématoire. Face à cette «cocasserie irrationnelle », il a fait parler son sens de responsabilité. Il s’est placé au-dessus de la mêlée avec son historique : « J’assume ». L’irrémissible marche du temps a rattrapé ceux qui, en 1991, vouaient aux gémonies le président Denis Sassou N’Guesso. Ils sont devenus, depuis la fin de la guerre de 1997, des spécialistes de la génuflexion et du baisemain. « La caque sent toujours le hareng ». Les gesticulations dérisoires de ceux qui étaient alliés au pouvoir et éconduits, ou encore des « vestiges d’époques révolues », se sont jetés à corps perdu avec « une obstination en forme de désespérance » dans une opposition atrabilaire. La mue au Congo est rapide.
Que s’est-il passé depuis la fin de la Conférence nationale ? Une transition non maîtrisée, aux conséquences dramatiques ; une nouvelle Constitution, qui posa très rapidement des problèmes d’interprétation, tout au long de la première République post-Conférence nationale ; la guerre dite du 5 juin 1997 a fermé la parenthèse de la Conférence nationale, ouverte avec la Transition, dirigée par le Premier ministre, André Milongo. Aujourd’hui, dans un contexte plus apaisé, il est peut-être temps d’en reparler. Lundi 19 mars 2018, la présentation de l’ouvrage : « Le Roman historique de la Conférence nationale » donnera, il faut l’espérer, aux uns et aux autres, l’occasion de revenir sur cet événement politique majeur du siècle dernier, à l’origine d’un changement systémique. Malgré ses funestes conséquences, elle demeure un fait historique indéniable. Les héros ne sont pas toujours ceux que l’on croit.

 

Mfumu

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