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L’imprévisible président Donald Trump

Lundi 12 Mars 2018 - 8:27

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Le nouvel épisode de la confrontation entre le président nord-coréen Kim Jong-un et le président américain Donald Trump qui s’est joué en fin de semaine dernière n’a rien, à la vérité, qui puisse surprendre. Il s’inscrit en effet dans la partie d’échecs qui oppose, en Asie, les deux superpuissances que sont les Etats-Unis et la Chine, la Corée du nord n’étant en vérité qu’un pion sur l’échiquier même si les gesticulations nucléaires auxquelles se livre son principal dirigeant n’ont rien de théorique.

Pour comprendre le sens de la manœuvre initiée de façon apparemment imprévisible mais en réalité très calculée  par Donald Trump, il faut avoir présentes à l’esprit deux données essentielles.

° La première est qu’il se livre dans cette partie du monde une partie de  bras de fer stratégique qui ne dit pas encore son nom mais dont l’enjeu est le contrôle plus ou moins direct de l’Asie. Dans le même temps, en effet où la Chine met la pression sur l’île  de Taïwan afin qu’elle réintègre l’Empire du milieu et construit  une ceinture militaire en Mer de Chine méridionale afin de contrôler la voie maritime qui commande l’accès à son territoire les Etats-Unis, quant à eux, se rapprochent du Vietnam – qui fut leur pire ennemi il n’y a pas si longtemps – et resserrent leurs liens avec le Japon, l’Inde, les Philippines, l’Indonésie, la Corée du sud. Dans un semblable contexte mettre fin à l’affrontement larvé avec la  Corée du Nord qui n’a, si l’on y réfléchit bien, aucun sens pour la lointaine Amérique devient un objectif important puisqu’il permet d’encercler plus ou moins directement la Chine.

° La deuxième donnée tient au caractère même de Donald Trump qui n’est pas un homme d’Etat mais un homme d’affaires ayant construit sa fortune grâce à des coups de poker dont certains – avec la Russie notamment – pourraient à moyen terme lui valoir de sérieux ennuis aux Etats-Unis même. Prendre ses adversaires par surprise, adopter brutalement des positions contraires à ses discours, attaquer là où on ne l’attend pas au risque de désarçonner son propre entourage, brandir des menaces pour inquiéter ses partenaires et les amener à transiger  font partie d’une vision de la société qui n’a rien de politique ni de diplomatique mais qui relève plus des pratiques de Wall Street que de celles de la Maison-Blanche, du Département d’Etat ou du Pentagone. D’où les retournements auxquels assiste, médusée, la communauté internationale et l’inquiétude qui grandit dans la sphère diplomatique.

De ce qui précède nombre d’observateurs de la scène mondiale concluent, trop vite aujourd’hui à notre avis, que le pire peut sortir à tout instant des virements et revirements pour le moins inattendus du président de l’Etat le plus puissant du monde. Mais la réalité est toute autre car l’appareil d’Etat américain n’est pas prêt à se laisser manipuler par l’un ou l’autre de ses dirigeants. Ayant payé au prix fort les erreurs commises dans les décennies précédentes – la guerre du Vietnam, la guerre d’Afghanistan, la guerre d’Irak pour ne citer que les plus récentes – les élus qui siègent dans les deux chambres du Congrès et plus encore les administrations centrales sur lesquelles repose l’unité du pays ne laisseront sûrement pas rééditer les erreurs du passé.

Ils le feront savoir d’une manière ou d’une autre à Donald Trump si celui-ci se révèle trop instable, trop autonome par rapport à la puissante machine étatique américaine.

 

 

 

 

 

 

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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