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Bangui : la vie plus forte

Mercredi 21 Août 2013 - 17:32

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De temps en temps, peut-être même souvent ou très souvent, comme ce fut le cas dans la nuit du samedi 17 au dimanche 18 août, des coups de feu peuvent éclater soudainement dans la ville, suscitant la peur et les inquiétudes des Banguissois. Ou comme cela s’est produit le mardi 20 août, des opérations censées ramener la quiétude à travers la recherche supposée d’armes auprès de ceux qui les détiendraient illégalement peuvent se solder par des morts supplémentaires, allongeant le décompte déjà trop lugubre des victimes de la crise que connaît la Centrafrique.

Lorsque vous posez la question à votre interlocuteur de savoir si l’école a ouvert cette année, ou du moins, si elle a fonctionné, il vous répondra par l’affirmative en précisant que seule Bangui a eu cette faveur. Les salaires ont-ils été versés aux fonctionnaires ? Il ne se rappellera plus la date. S’il vous montre du doigt l’hôpital général de la place, l’université Barthélémy-Boganda, ou encore un super marché fermé depuis, du fait de la crise, vous vous rendrez compte de l’ampleur du désastre. « Voyez cet autre café, c’est La Mandarine. Les propriétaires établis à Brazzaville voulaient tenter l’expérience ici. Ils sont partis. » En longeant l’avenue Charles-de-Gaulle, où se trouve la représentation diplomatique française sur les berges de l’Oubangui à quelques jets de pierre de localité RD-congolaise de Zongo, vous réaliserez le niveau d’abandon dans lequel se trouvent les infrastructures de la capitale centrafricaine. 

Mais, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les quelques artères de Bangui, délabrées pour la plupart au troisième degré si on devait les comparer aux grands brulés des incendies, ne sont pas désertes ; les habitants de la capitale centrafricaine ne se déplacent pas au petit trot, la peur au ventre. Au contraire, de nuit comme de jour, sur les abords des rues, les commerces fonctionnent, avec une prédominance de l’informel ; la Mocaf (bière locale) et bien d’autres breuvages coulent à flots, les débits de boissons crachent de la rumba des deux Congo, des gens s’activent autour de leurs petites affaires et rient aux éclats. Ce qui forge chez l’observateur le sentiment que la soif de vivre chez l’humain demeure quelque chose d’irremplaçable.

Et c’est bien évidemment cette soif de vivre, mais de vivre libre, qui se lit sur les visages en dépit du fait que Bangui reste une ville militarisée à l’excès. Certes, des éléments en uniforme, du reste lourdement armés, à pied ou roulant à bord de véhicules 4X4  ou d’engins blindés, ne font pas le coup de feu à tout instant. On trouve ici, le doigt sur la gâchette, outre les hommes de la Séléka, l’ex-rébellion, des unités de la force Micopax, mais aussi celles de l’armée française, les uns et les autres remplissant la mission qui leur incombe.

Dans cette cohabitation à hauts risques, les Banguissois et Banguissoises doivent chaque jour que Dieu fait implorer le ciel d’aider leur nation à recouvrer la paix, la tranquillité et la concorde. Pays rongé par des conflits fratricides, la Centrafrique a par le passé réussi à se ressaisir grâce au concours de ses voisins. Le Congo conduit aujourd’hui la médiation entre les parties centrafricaines. Ce fut le tour, il y a quelques années, du Gabon, honoré en cela par ce buste du défunt président Omar Bongo-Ondimba, qui trône place de la Réconciliation nationale sous le regard d’une colombe aux ailes déployées.

La réconciliation nationale, chantier sur lequel sont retournés les Centrafricains pour faire en sorte que les chaînes de montagnes qui cernent Bangui apportent plus de fraîcheur au pays ; que la pierre, richesse inestimable qui jonche son territoire, lui permette de se rebâtir et procure à ses habitants la paix et le bonheur, valeurs saines auxquelles, comme tous les peuples du monde, les Centrafricains croient tant.

Gankama N'Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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