Inna Modja : une artiste qui porte sa voix !

Lundi 3 Mars 2014 - 1:30

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Grande invitée du forum mondial des femmes francophones, Inna Modja regrette de ne pouvoir célébrer la femme à Kinshasa (pour des raisons personnelles, elle ne peut se déplacer). Mais elle nous accorde du temps pour nous expliquer son engagement sans faille

Armée de sa douce voix et de ses convictions, la chanteuse nous livre son parcours atypique et son combat permanent pour les femmes et l’Afrique.

Les Dépêches de Brazzaville : Vous faites partie de la nouvelle scène d’artistes francophones et vous êtes devenue une véritable It Girl, incontournable des médias. Qui est la véritable Inna Modja, en trois mots ?
Inna Modja : Si je devais me caractériser en trois mots, ce serait africaine, moderne et engagée. Je suis malienne d’origine et j’aime mon pays plus que tout. Je me sens si bien à Bamako, entourée de ma famille dans ce pays magnifique. Cela me pousse à dire que je suis africaine, car quand je vais à Kinshasa ou à Dakar, je me sens tout aussi bien. Ensuite, moderne, pas seulement dans ma musique qui mélange les genres, mais aussi par rapport à mon histoire. J’ai grandi entre deux cultures, la culture africaine et la culture occidentale à laquelle je me suis adaptée et que j’apprécie tout autant. La culture malienne est très traditionnelle, à la différence d’ici où tout s’accélère vers la modernisation. Et enfin, je me considère comme engagée, car je fais beaucoup de choses qui me tiennent à cœur. Grâce à mon métier, je peux me lever pour les causes que je défends.

LDB : Est-ce important pour vous de redonner à votre pays ? Quels sont les outils que le monde artistique vous a donnés ?
Je trouve que c’est important de donner en général. Comme je vous l’ai dit, je me sens africaine et, au-delà de cela, je me sens femme. C’est pourquoi je me lève contre l’excision que ’ai moi-même subie. Je me lève aussi pour l’autonomisation des jeunes filles. La musique m’a donné la notoriété nécessaire pour faire entendre ma voix.

LDB : Vous êtes la marraine de Tostan France (association sensible aux questions d’éducation et d’autonomisation) et vous vous êtes récemment engagée auprès de la célèbre association l’AMREF (première ONG concernant la santé créée en Afrique)…
Oui, j’aime beaucoup ces deux associations qui sont formidables et qui font de très belles choses sur le terrain. Tostan, par exemple, est active sur tellement de terrains que c’est impossible de résumer leur action en quelques mots ! Par exemple, ils aident les femmes à développer leur commerce grâce à la technique des microcrédits, ou bien à donner une éducation de qualité. L’AMREF rassemble de nombreuses sages-femmes, et c’est un métier dont toute l’Afrique a besoin étant donné le taux de mortalité infantile.

LDB : L’éducation pour vous, c’est un mot clé ?
Tout à fait, l’éducation fut ma propre chance. Tous les jours, je remercie ma famille pour cela. Chez nous, en Afrique, il reste beaucoup de choses à établir au niveau de l’alphabétisation. Les choses commencent à avancer grâce aux ONG. Mais cela doit devenir une priorité. L’éducation va en quelque sorte définir l’avenir de milliers de jeunes filles en Afrique. C’est avoir les armes pour exister dans ce monde. C’est pourquoi elles se doivent d’être autonomes. L’autonomisation vaut pour toutes les femmes du monde, chacun devrait pouvoir subvenir à ses besoins et ne pas être dépendant d’une autre personne. Ma mère me disait souvent : « Ton travail, c’est ton premier mari ! » (rires)

LDB : Vous êtes ambassadrice de l’AMREF, ONG nominée pour le prix Nobel 2015, et marraine de Tostan. Avez-vous encore des engagements à nous dévoiler ?
Je prends tellement de plaisir à faire ce que je fais que je ne me repose pas sur mes acquis, c’est une chance de pouvoir aider. C’est pourquoi j’ai réalisé un court métrage sur les violences faites aux femmes, qui s’appelle La Valise de Marie-Laure et qui sortira début mars. Ensuite, je suis très impliquée dans la production du premier grand festival de musique à Bamako pour fin 2014. En parallèle de cela, je trouve de l’inspiration pour mon prochain album qui devrait arriver dans la foulée !

Née en 1991 au Sénégal, l’ONG internationale Tostan a développé un programme de renforcement des capacités communautaires dans huit pays d’Afrique. Ce programme d’éducation de trois ans, mené dans les langues africaines, est à l’origine d’un vaste mouvement d’abandon de l’excision et des mariages précoces et forcés dans plus de 7 000 communautés. Tostan encourage le dialogue autour des pratiques traditionnelles néfastes à la lumière des droits humains, comme le droit à la santé et le droit à être protégé contre toute forme de violence. Les participants aux classes reçoivent également de nouvelles informations sur les conséquences préjudiciables pour la santé de l’excision et des mariages précoces et forcés. Plus largement, le programme de Tostan encourage les femmes et les filles à devenir des leaders pour le développement de leur communauté.

 

Propos recueillis par Grâce Loubassou

Légendes et crédits photo : 

La chanteuse Inna Modja ©DR