Interview. Jorus Mabiala : "Au-delà du spectacle vivant, le conte devient un rendez-vous du cœur à cœur, de l’être à l’être"

Mercredi 7 Février 2018 - 12:30

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Adepte des réseaux sociaux, le conteur anime ses pages au rythme de ses spectacles ou du soutien qu’il apporte à ses collègues artistes. Il répond aux Dépêches de Brazzaville sur sa veille artistique.

Affiche du film de Jorus Mabiala, réalisé par Dominique Devigne, à paraître au 1er semestre 2018Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B.) : A vous suivre sur les réseaux sociaux, il est difficile d’établir l’exactitude de vos activités et l’agenda y relatif. Quelle est votre actualité ?

Jorus Mabiala (J.M.) : Oui bien sûr ! Mon actualité est au rythme que prennent les arts de la parole en France et en Europe, à l’affût de la moindre programmation dans le milieu. Me concernant, ma saison 2018-2019 s’annonce bien chargée. Elle commence par le lancement Europe-Afrique d’un atelier permanent sur l’imaginaire africain. Entre février et début avril, je participerai aux travaux des laboratoires avec des auteurs et des personnes ressources des arts de l’oralité et tous les « ngo » de la diaspora. Ce sera ensuite au Maghreb où des ateliers-laboratoires sont prévus en Mauritanie, au Maroc, en Tunisie, en Algérie, en Libye et en Egypte. Je la terminerai par le Bassin du Congo, l’Afrique de l’ouest et de l’est, les Comores et Madagascar en lorgnant déjà l’année prochaine.

L.D.B. : Vous participez à plusieurs rendez-vous internationaux du conte. Comment établissez-vous votre planning ?

J.M. : Jusqu’à aujourd’hui, les dates des festivals de contes sont déjà bloquées dans les agendas en Europe où les dates sont connues un à deux ans en avance. En Afrique, cela varie au rythme des pluies (rires). J’interviens également dans les milieux scolaires et dans les centres de jeunes. Ce sont des prestations négociées du jour au lendemain par téléphone. Selon mon agenda et les clauses retenues, je me rends disponible pour porter la parole au plus près.

L.D.B. : Quel est le public qui se déplace pour venir vous voir sur scène ?

J.M. : Les spectacles de contes sont dans la plupart des programmations destinées à tout public dont la cible principale demeure la famille. Mais, selon les lieux, l’engouement est différent. Au Maghreb, ils sont pour la plupart l’occasion d’une liesse populaire. Par contre, dans le Bassin du Congo, viennent ceux qui ont la possibilité de s’offrir une place. Quant à la France, c’est un public cosmopolite. Depuis peu, j’ai remarqué, avec un réel plaisir, la présence parmi les spectateurs des membres de la diaspora africaine en famille et me confient leur envie d’affirmer avec fierté leur double appartenance de vivre à l’étranger et de se replonger, grâce à mes récits, dans les profondeurs des nuits d’antan.

L.D.B. : Pensez-vous que le conte continuera à déplacer ce public ?

J.M. : La cellule familiale est disloquée par les occupations journalières. Le public se déplace pour retrouver cet espace familial autour du conte. Oui, au-delà du spectacle vivant, le conte devient un rendez-vous du cœur à cœur, de l’être à l’être. Après tous ces discours du politiquement correct, les gens recherchent chez le conteur le vrai du mot. Chaque fois, ils sont rassurés par le merveilleux et les références historiques. Le conteur se démarque de la légèreté habituelle et devient la vérité du passé qui donne au présent ses lettres de noblesse.

L.D.B. : Vous êtes auteur des ouvrages avec, par exemple, la retranscription des fables de La Fontaine. À l’approche du salon Livre de Paris, avez-vous des ouvrages à présenter ?

J.M. : Pointe-Noire a désormais un Centre de ressources du conte et des arts de l’oralité. Il est important d’équiper ce centre avec des livres spécialisés, de manuscrits et des éléments de comparaison. Au salon Livre de Paris, je présenterai à nouveau le livre Si Lafontaine parlait africain, édité aux éditions Acoria, en 2009. C’est le livre référence qui parle de ma vision du conte en France et de ma participation dans ce grand monde des arts de la parole. Ma nouveauté, c’est Mukukulu, livre illustré par Fabienne Quentel et édité aux éditions Créer. C’est un conte qui nous amène dans les profondeurs du Fleuve Mukukulu suivant la légende de la Bouenza.

Ensuite paraîtront, courant 2018, les ouvrages qui feront écho à cet imaginaire africain des artisans pour raconter le Bassin du Congo avec sa force du Fonds bleu ou pour parler de nos mythes et de nos légendes en commençant par ceux du Musée Kiebe Kiebe, à Oyo, dans le département de la Cuvette.

Propos recueillis par Marie Alfred Ngoma

Légendes et crédits photo : 

Photo : Affiche du film de Jorus Mabiala, réalisé par Dominique Devigne, à paraître au 1er semestre 2018

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