Pierre Kwenders : « Mes deux backgrounds définissent ce qu’on appelle afro-américain »

Samedi 1 Février 2014 - 9:26

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José-Louis Modabi, dit Pierre Kwenders, est né à Kinshasa et vit depuis 2001 à Montréal. Ce talentueux chanteur a déjà à son actif deux EPS (maxisingle) imprégnés de la richesse de ses deux cultures. Il livrera l’été prochain son premier album, mélange de musique électronique, r’n’b savamment mixé à de la rumba congolaise. En attendant, Pierre Kwenders éveille de plus en plus l’attention du public québécois. Rencontre avec un artiste à suivre de près

Les Dépêches de Brazzaville : Pierre Kwenders, comment peut-on te  présenter ?
Pierre Kwenders : On m'appelle Pierre Kwenders, en hommage à mon grand-père, Pierre Kankwende, un visionnaire. Je suis né à Kinshasa et j’habite depuis bientôt treize ans à Montréal. Je fais de la musique depuis deux ans et j’espère que cela durera.

Parle-nous de ton rapport à la musique…
Chez moi, on aime faire de la musique on aime faire la fête. J'ai été élevé avec la rumba congolaise, le soukous, tout cela s'est imprégné en moi. Il y a beaucoup de musiciens dans ma famille, mais je suis le premier à faire carrière. J’ajouterai que je n’avais aucune idée de ce que je voulais faire à part chanter. Mon style est très influencé par mes origines africaines mais aussi par mon présent nord-américain. J’ai toujours aimé l’électro et j’ai réalisé qu’il y avait quelque chose dans cette musique qui pouvait s’agencer facilement avec l’afro. Avec ma voix, j’apporte mon influence africaine. Cela donne un produit résultat de deux travaux. Finalement, cela fait 13 ans que je suis à Montréal, presque tout autant qu’à Kinshasa. Ces deux backgrounds musicaux définissent ce qu’on appelle afro-américain.

Les médias canadiens affilient ta musique à de la world 2.0. Qu'est-ce que c'est ?
Aucune idée. Je n'aime pas ce terme, mais je le comprends : je chante dans une langue étrangère et sur de la musique électronique. D'une certaine manière, c'est différent de la world d'il y a 10 ans, celle de Youssou NDour et d'Angélique Kidjo. Je ne pense pas que le thème world music devrait exister. Peu importe la musique que l'on fait et la langue que l'on chante, c'est simplement de la musique et c'est de la musique du monde. S'il faut catégoriser cela parce que c'est plus folklorique et  diffèrent de notre culture, cela me dérange. S'il faut catégoriser pour catégoriser, allons vers world 2.0, une nouvelle génération de la musique du monde, de l'afro.

Comment ta carrière a-t-elle démarré ?
J'ai rencontré Nom de Plume, mon producteur, par un ami. Il m'a invité à un concert, on a fraternisé très vite, nous avons enregistré dès le lendemain, et la collaboration a perduré. Ça a donné naissance à Whiskey & Tea et African Dream, mes deux premiers EPs sortis en 2013. Avant cela, je n'avais jamais pensé faire carrière en musique. J'y pensais intimement mais je me disais que ça n'allait jamais aboutir. Depuis la sortie de mes deux EPs, on dirait que tout est possible. Le public semble aimer ce que je fais, et ça me donne envie de continuer.

Comment travailles-tu ?
Ce sont des moments de création et d’improvisation. On arrive en studio, j’écoute le beat, l’inspiration s’ensuit  pour les paroles. Je crée une mélodie et j’enregistre par-dessus. Il y a un produit brut, on travaille dessus et ça donne le résultat final.

Quel rapport entretiens-tu avec ton public ?
Quand je suis monté sur scène la première fois en 2012, je connaissais la moitié du public. Aujourd’hui, ça a changé, le public est de plus en plus diversifié. Les gens dansent, moi aussi, et c’est ce partage qui me tient à cœur. Monter sur scène reste très stressant.

L’EP que tu viens de sortir s’appelle African Deam. Pour toi, qu’est-ce que le rêve africain ?
Cette notion vient contrer le rêve américain. Le rêve africain fait de grsand exploits. L’Afrique est encore trop souvent mise en arrière-plan, il est temps que le continent prenne sa place et la revendique. Pour ma part, je le fais à travers ces chansons.

Justement, de quoi parlent tes chansons ?
De tout : d’amour, de tristesse, de joie, de guerre, de danse. Je chante en lingala. Et ce que j’aime avec ma musique, c’est qu’ici (à Montréal), la plupart des gens ne me comprennent pas. Elle est dansante, et je trouve bien que les gens puissent danser sur de la musique triste qui a un message car la musique se comprend dans le ressenti. Quand, plus jeune, j'écoutais Michael Jackson, je ne comprenais rien mais j adorais. Maintenant, je comprend ce qu’il dit et je trouve cela encore plus beau, je vois que je n'étais pas aussi éloigné dans ma compréhension.

Iras-tu un jour chanter au Congo ?
J’adorerai, c’est l’un de mes plus grands rêves. Des rumeurs disent qu’il pourrait y avoir une édition des Francofolies (festival de musique francophone, NDLR) à Kinshasa. Si c’est le cas, j’aimerais vraiment y participer. Je voudrais faire un concert là-bas et j’espère avoir un bel accueil et voir les Congolais aimer ma musique qui est un peu différente de ce qu’on a l’habitude d’écouter, autant pour le public canadien que congolais, car elle n’est pas typique pour un sens comme dans l’autre. J’espère que les deux Congo, car je ne fais pas de distinction, seront interpellés par ce que je fais. L’Afrique reste chez moi et si le public veut de moi, je viendrai y faire de la musique.

Morgane de Capèle