Focus : parcours littéraire de Mgr Benoit Gassongo

Samedi 2 Septembre 2017 - 9:47

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Ancien administrateur apostolique de Fort-Rousset actuel Owando (1968-1970), Mgr Benoit Gassongo est écrivain et pédagogue de talent. Il est l’auteur de trois œuvres littéraires dont nous essayerons de décortiquer chacune d’elle.

En dépit des conditions difficiles sinon moins développées de l’époque postcoloniale, marquées par le manque d’instruments de recherches qu’offre la technologie moderne, Mgr Benoit Gassongo a laissé à la postérité un héritage d’une richesse inouïe et unique. Nombreux congolais, à l’instar du Dr Armand Brice Ibombo, prêtre, technicien et spécialiste, ont décortiqué ses trois chefs-d’œuvre. Mais que dit-on dans ces ouvrages de Mgr Gassongo? 

Les livres de Mgr Benoit Gassongo, comme la plupart des écrits d’ailleurs, sont riches en information et enseignement et donc porteurs d’un message extraordinaire. Dans le premier ouvrage, par exemple, il retrace l’apostolat de Mgr Augouard, premier vicaire apostolique du vicariat de Brazzaville et grand bâtisseur des églises du centre et du nord de Brazzaville, Linzolo jusqu’au nord du pays, les missions de l’Alima et sans oublier les missions en Oubangui Chari République Centrafricaine.

Mgr Benoit Gassongo est le premier Congolais à écrire un livre sur les origines des missions au Congo (bien qu’étant une monographie ou un petit livret de quelques pages mais intense et riche en information). Par cet ouvrage, il a inspiré la plupart des chercheurs voulant écrire sur les origines de l’Église catholique au Congo. Le docteur et prête Armand Brice Ibombo s’est servi de cet ouvrage dans la rédaction de sa thèse et il a publié aussi sur Mgr Augouard en 2012 pour compléter et continuer avec ce que Mgr Benoit Gassongo avait fait. Avant lui, il y a eu des chercheurs comme le Pr Ngoie Ngalla et l’abbé François Wambat.

Dans le second ouvrage intitulé « Otwere », Mgr Benoit Gassongo fait connaître l’un des éléments de la culture mbosi. Il valorise par-là la culture bantou congolaise devant la tendance européocentriste, raciste et impérialiste qui sous-estimait le noir et le Congolais, en l’enveloppant dans la pensée hégélienne dans "Leçon sur l’histoire" pour qui l’Africain n’a pas de culture et de raison, car il n'a pas été visité par la raison. Voir Hegel. À ce stade, Mgr Benoit Gassongo peut être considéré comme un héros de la culture congolo-africaine, à la suite des auteurs de la Négritude comme Aimé Césaire, Léon Goudron Damas, Léopold Sédar Senghor et les autres. Il est donc un promoteur et vaporisateur du patrimoine culturel congolais. Sur ce, avec Mgr Benoit Gassongo, l’on apprend que la justice ou le tribunal en Afrique n’a pas été inventé par les blancs mais existait déjà dans les traditions et surtout dans les traditions mbosi.

Enfin, le troisième et dernier livre est intitulé : Conquête, résistance et terreur en Afrique-Equatoriale française. Un passé oublié du Bassin de l’Alima-Nkeni (1911-1946) de 190 pages, publié aux éditions L’Harmattan Congo. Présenté et réceptionné par les universitaires au cours d’une cérémonie qui s’est déroulée récemment dans l’amphithéâtre de Bayardelle en présence de l’archevêque de Brazzaville, Mgr Anatole Milandou, ce livre a une valeur politique et historique, parce qu’il décrit et dénonce le climat sociopolitique et culturel de l’époque coloniale : « », P.33. Mais il est beaucoup plus un véritable document d’histoire qui parle de la réaction des Congolais face à l’oppression coloniale. Les historiens, et aujourd’hui Mgr Gassongo, enseignent que les Congolais ne sont pas restés passifs ou inactifs au système impérialiste d’oppression et de domination. Ils ont réagi sur plusieurs fronts et de manière diverse. Grâce à cet ouvrage, l’étudiant ou le chercheur en histoire sait qu’il y a eu aussi des résistants dans la partie nord du pays, plus précisément dans le pays mbosi.

En effet, si jusque-là on ne connaissait que Matsoua, Mabiala Manganga, Boueta Bongo, pour ne citer que les plus connus, dans le pays mbosi, il y a eu aussi Mbouza Obele, martyr de l’oppression coloniale tué pour sa révolte et sa résistance contre le système colonial français, comme le dit clairement le contenu de la lettre du lieutenant Guyonnet, document fiable et authentique de grande valeur  historique, beaucoup cité par l’auteur (P.14). C’est grâce au Dr Elenga Ngamporo destinataire de cette correspondance que Mgr Benoit Gassongo s’est lancé dans les recherches pour décrire l’histoire de la pénétration coloniale dans la zone mbosi. Une aubaine pour les étudiants et les amoureux des sciences historiques de profiter de ces informations pour leurs travaux de recherches.

Notons que c’est grâce à Ondaye-Akiera, membre de l’association solidarité plurielle, que les universitaires et autres lecteurs ont eu la chance de voir paraître ce troisième ouvrage posthume de Mgr Benoit Gassongo intitulé : Conquête, résistance et terreur en Afrique- Equatoriale française, un passé colonial oublié du bassin de l’Alima-Nkeni, 1911-1946, qu’il a mené avec professionnalisme et expertise et surtout pour avoir associé à ce chantier le Dr Armand Brice Ibombo non seulement comme prêtre mais aussi comme technicien et spécialiste.

Le tryptique Benoit Gassongo

Mgr Benoit Gassongo avait une dimension triptyque. Il n’était pas que prêtre et écrivain, mais aussi éducateur. En effet, considéré comme l’un des premiers prêtres de la contrée mbosi avec Mgr Raphael Ndangui son confrère d’ordination, Mgr Benoit Gassongo a exercé sa vie missionnaire dans le pays mbosi de Saint-François-Xavier de Boundji à Sainte Radegonde de Tsambitso (Oyo) et à Brazzaville précisément à Sainte-Anne et à Ouenzé à l’église Notre-Dame des victoires autrefois Saint-Michel de Ouenzé, où il repose en paix. Pour ceux qui ne le connaissent pas, sa tombe se trouve à l’entrée de la porte principale de l’église, à gauche. Il est avec le père Jean-Marie Griva les bâtisseurs de cette paroisse. Car il quittait Sainte-Anne parfois à pied ou à vélo pour aller évangéliser les peuples bangala de Ouenzé, un nouveau quartier indigène qui se développait à cette époque (en dehors de Poto-Poto) et qui avait donc aussi besoin d’être évangélisé (le concile Vatican II parlera plus tard de Evangelium nuntiandi, l’annonce de l’évangile).

Benoit Gassongo est ordonné prêtre en 1946 par Mgr Paul Biechy (troisième successeur de Mgr Augouard premier vicaire apostolique du vicariat du Haut Congo devenu vicariat de Brazzaville en 1922), il fait partie de la deuxième promotion des prêtres de Brazzaville avec Fulbert Youlou, le premier président du Congo, Théophile Mbemba, Louis Loubassou, Raphael Ndangui. Bien avant eux en 1939, Mgr Paul Biechy avait ordonné les premiers prêtres de ce vicariat, à savoir Mgr Rock Auguste Nkounkou et Eugène Kakou (mort et enterré à Boundji). Gassongo est ordonné évêque en octobre 1967 à Rome par le cardinal Pierre Agagiannian et  il est le deuxième évêque congolais.

 

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Mgr Benoit Gassongo Photo 2 : La couverture du troisième et dernier livre de Mgr Benoit Gassongo

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