Kiripi Katembo : une mort qui ne passe pas...

Samedi 8 Août 2015 - 9:19

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Le talentueux photographe et réalisateur kinois est parti, trop tôt à 36 ans, emporté par une malaria cérébrale. Ses photos sont actuellement exposées à Paris dans le cadre de l’exposition Beauté Congo, commissionnée par André Magnin.

« Je suis un écrivain qui écrit avec une caméra, je suis un peintre qui peint avec une caméra », confiait Kiripi Katempo à RFI.Un artiste et observateur bien dans son époque qui signait une photographie à la fois poétique et réaliste, mettant en scène la mutation urbaine. Retour sur sa carrière.

Né en 1979 à Goma (RDC), Kiripi Katembo se rêvait en pilote de ligne dans l’aviation civile. C’est finalement à l’Académie des beaux-arts de Kinshasa qu’il trouvera son bonheur, où il s’exprime à travers la peinture, adoptant un style réaliste. L’artiste découvre son sens esthétique et son style mais marque rapidement une rupture avec ce medium pour se tourner vers la photo et la vidéo.

Il observe les décors urbains des grandes villes : Kinshasa, Brazzaville ou encore Ostende, en Belgique. Sa première série à succès, Un Regard, montre des clichés retournés de scènes de vie citadines, reflétées dans l’eau et accompagnées de verbes forts « Errer », « Subir », « Tenir », « Rester », « Naître ». «Stoppé par les regards de la population qui n’aimait pas être photographiée, je suis allé vers l’eau, un élément qui faisait partie de mon environnement et qui m’a permis de détourner les regards pour continuer à prendre naturellement des photos de l’homme dans son milieu», expliquait Kiripi Katembo au site Afrique In Visu. L’eau reflète aussi d’autres réalités, celles de villes usées, marquées de stigmates, du chaos. Jeux de couleurs, jeux de miroir, jeux de transparence et d’optique, le photographe s’amusait avec l’imagination et la vision qui peut nous faire défaut : « Si l’on prend l’image dans le sens normal, c’est le chaos. Dès qu’on la retourne, tout devient plus positif, plus beau », racontait celui qui allait chercher la poésie dans le brut.

Cette série le révèle et lui permet d’exposer à Afrikaribu, première biennale de la photographie à Kinshasa en 2010, puis à la Biennale Picha, touujours en RDC. Pour ses deux dernières séries, Transit RDC et Mutation, Kiripi Katembo a pris de l’altitude pour observer Kinshasa, Brazzaville et Ostende en Belgique depuis leurs buildings. Les Dépêches de Brazzaville l’avaient rencontré en 2013, alors qu’il travaillait sur la série Transmissions, un parallèle entre les rituels de scarification qui disparaissent en Afrique alors que les tatouages et les piercings n’ont jamais été aussi en vogue en Occident.

Engagé pour l’art venu du Continent

Kiripi Katembo faisait partie de cette génération d’artistes et de photographes sous le feu des projecteurs, reconnu pour son talent, la richesse de ses démarches et son engagement envers le Continent. Comme un nombre grandissant de ses pairs, il voyait sa terre comme un vivier d’inspiration et de créativité « Je ne quitterai pas Kin, dit-il. Ma ville est un puit pour moi, avec beaucoup de matière intéressante qui ne va pas s’épuiser aujourd’hui. » Confiait-il à RFI. Il œuvrait dans ce sens et s’attachait à développer le nécessaire pour que sa conviction soit réalité en analysant le terrain. Il expliquait à Afrique in situ : «Avec le manque d’espace ou lieu d’expression artistique qui existe dans mon pays, je souhaite créer un espace de travail, d’exposition et de projection des œuvres d'arts photographiques et vidéo. ». Homme de parole et d’action, il a créé le collectif de jeunes vidéastes Yebela et cofondé, en 2014, la première édition de la biennale d’art contemporain Yango qui a rassemblé une trentaine d’artistes, dont une vingtaine de Congolais.

Morgane de Capèle

Légendes et crédits photo : 

Les oeuvres de Kiripi Katembo

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