Littérature : Hugues Éta publie Manuscrit de bonheur brûléLundi 16 Février 2015 - 18:45 Parue en janvier dernier, la nouvelle œuvre de l’écrivain et poète congolais Hugues Éta a été éditée par la maison Doxa éditions de France. Manuscrit de bonheur brûlé : c'est l’histoire du jeune enseignant Ékabela, (personnage principal) consciencieux et dévoué qui finit par se dépraver dans son métier pour pouvoir mieux gagner sa vie. Qu’advient-il lorsque ceux qui doivent faire notre éducation manquent cruellement d’éthique ? Lorsque, faute de mieux, un précepteur se métamorphose en fripon ? Ce sont-là les questions que se pose l’écrivain. Dans un style narrateur et simple, Hugues Éta, qui s’est inspiré de sa vie professionnelle d’enseignant, peint sur 104 pages les déboires d’Ékabela, licencié en anglais et converti en professeur de français. Diplômé sans emploi et méprisé par sa famille, Ékabela décide de se battre pour avoir une vie décente. Il ouvre un centre d’alphabétisation chez lui et prend son travail d’enseignant au sérieux, même si cela ne lui rapporte pas grand-chose. Le destin fait qu’il soit recruté dans deux écoles privées et dans un centre de formation professionnelle comme professeur de français. Trois emplois qu’il cumule pour pouvoir arrondir les fins de mois, mais sa situation ne s’améliore pas, ses salaires restant maigres quoiqu'il ait de nombreuses heures de travail par jour. « Il appartient d’abord à une nation de traiter ses enseignants desquels son avenir dépend indubitablement. Une nation qui n’a pas de considération pour les enseignants marchera clopin-clopant vers sa destinée», dit le narrateur à la page 60. Victime du mauvais traitement et du mépris de ses employeurs (qui ne pensent qu’à leur gain allant jusqu’à recruter des enseignants analphabètes) et des parents d’élèves, Ekabela, professeur consciencieux et dévoué, va au fil du temps perdre ses qualités et se laisser dépraver. Il cède à la corruption et aux antivaleurs, foulant aux pieds l’éthique. S’enchaînent alors la vente des notes aux élèves accrochés à la facilité, les notes sexuellement transmissibles, la manipulation de l’enseignant par les fils à papa, les pots de vin, des rencontres dans des bistros avec des élèves… «Visiter les écoles aujourd’hui fait prendre conscience de l’état de santé et du devenir du pays. C’est aussi comprendre la direction vers laquelle roule, à tombeau ouvert, le véhicule de la Nation. Les élèves s’affectionnent pour la pacotille. Ils aiment la facilité et ont la boulimie des héritages mal façonnés», peut-on lire à la page 35. comme certains de ses collègues, Ékabela censé transmettre le savoir, éduquer et encadrer la jeunesse a cessé d’être un modèl. « L’enseignant inspirait le respect. À travers son comportement se lisait la pédagogie. Son apparence seule était un enseignement. Mais depuis que l’enseignant s’est familiarisé avec l’élève, tout est à terre(…) l’école est agonisante», (page 41). "Ce roman est plaisant à lire parce qu’il est écrit à l’africaine" Manuscrit de bonheur brulé sonne comme un plaidoyer pour un retour à l'éthique dans un système éducatif dévenu défaillant. Lors de sa présentation, le 6 février au Centre culturel Jean Baptiste Tati Loutard (JBTL) de Pointe-Noire, Joseph Ona Sandjo, critique littéraire, a estimé a eu ces mots : « Hugues Éta écrit simplement pour être compris. Ce roman est plaisant à lire parce qu’il est écrit à l’africaine, à la manière de ces histoires qui se racontent le soir autour du feu. Les images sont saisissantes, c’est la vie de tous les jours. Beaucoup d’humour. Ce qui pousse le lecteur à retenir facilement la morale pour que demain soit évitée l’Afrique des dérives et des incertitudes. Hugues Éta nous parle d’une société où rien n’est donné, société dans laquelle écument des prédateurs qui n’ont aucune pitié et se nourrissent de la naïveté des autres.» Manuscrit d’un bonheur brûlé s’ajoutent aux précédentes œuvres d’Hugues Éta parmi lesquelles figurent : le recueil de poèmes Mourir pour naître paru en 2003 aux éditions La Bruyère, le roman Une silhouette de poule paru en 2010 aux éditions Le chasseur abstrait, le manuscrit L’arme des larmes qui lui a valu une distinction de Société des poètes français avec le prix Paul Éluard en juillet 2014, Une araignée sur une Jacinthe d’eau paru en décembre 2014 aux éditions Edi Livre. L’écrivain a participé à plusieurs œuvres collectives et reçu le prix Tchikunda du meilleur écrivain en 2004. Lucie Prisca Condhet N’Zinga Légendes et crédits photo :Photo1 : Éta lors de la présentation du livre au centre culturel JBTL
Photo2 : Le roman Manuscrit de bonheur brûlé |