Christophe Aya-Yombo : « La vision de la chorale "Les Piroguiers" 65 ans après, c’est d’aller vers un acte concret »Jeudi 4 Décembre 2014 - 16:00 La chorale "Les Piroguiers" de la Basilique Sainte-Anne du Congo vient de célébrer ses 65 ans d’existence. Les Dépêches de Brazzaville se sont rapprochées de Christophe Aya-Yombo son président, qui a dévoilé sa vision pour la chorale, tout en déplorant le manque d'esprit de solidarité des fils et filles de Poto-Poto, troisième arrondissement de Brazzaville. Dépêches de Brazzaville: Le week-end dernier la Chorale Les Piroguiers a célébré ses 65 ans d’existence ; peut-on savoir sous quel signe a été célébré cet anniversaire ? Christophe Aya-Yombo: Cet anniversaire a été célébré sous le signe de l’amour entre frères, parce qu’il y a des petits échanges, beaucoup d’oubli, beaucoup d’indifférence des jeunes vers les anciens et peut-être même des anciens vers les jeunes. D’où, on n’a pensé qu’il faut repartir d’un nouveau pied en reconstituant la famille de Poto-Poto ; l’esprit de Poto-Poto, parce que Les Piroguiers incarnaient cet esprit qui aujourd’hui manque chez les jeunes. Voilà pourquoi, il y a des incompréhensions, des disputent à n’en point finir à la paroisse. Aujourd’hui, les gens sont très peu portés à vivre ensemble qu’à se retrouver retrancher dans leurs petits coins où ils voient toujours chez l’autre l’enfer. DB: Que représente l’esprit de Poto-Poto sur le plan social de cet arrondissement ? CA-Y: Sur le plan social, cet esprit est marqué d’abord par cette ouverture et cette considération des uns et des autres ; cette absence des barrières linguistiques et ethno-linguistiques. Nous appartenions à une seule famille vu que nous étions ensemble dans une obédience chrétienne. Nous avions également le sens du partage qui manque très cruellement aujourd’hui. On ne s’assiste plus et on est pratiquement en autarcie, ce qui ne fait plus de nous le chrétien que nous devons être, parce qu’on est hors de l’image. DB: Combien de jours a duré cette fête anniversaire et quel a été votre répertoire ? CA-Y: C’est une fête que nous voulions avant tout religieuse et spirituelle, parce qu’elle est totalement axée sur le message. C’est pourquoi du 1er novembre que devais être effectivement la date anniversaire, nous avions plutôt choisi la fête du Christ-Roi pour que nous nous rappelions que nous revenions toujours à nos sources, à nos origines à travers ce que représente pour nous le Christ et que nous recherchons à vivre à son image. Le répertoire chez-nous repose essentiellement sur la messe des Piroguiers, qui est pour nous un héritage commun. En fait, ce serait un héritage des gens de Sainte-Anne, parce que madame Bara pépère une musicologue qui avait été sollicité par le père Lecomte dans les années 47- 48 pour écrire cette messe, l’a fait avec beaucoup de métier. On sent effectivement qu’elle était musicologue, qui a mis du sien et qui a voulu traduire in-extenso le langage africain et par-delà, l’image de ce que l’Afrique est à ce jour. En effet, madame Bara Pépère s’est rendue au nord du pays chez les peuples Bandas où elle est restée un moment, le temps de concocter ce répertoire d’une messe entière qu’elle a transcrit en intitulant pure et simplement la messe du piroguier. La première exécution a eu lieu en 1959 par la chorale de 1936, avant d’être débaptisée chorale Les Piroguiers du Congo. DB: En 65 ans d’existence, combien de supports phonographiques aviez-vous sur le marché ? CA-Y: La chorale a malheureusement été avare de publication. En 1948, nous avons sorti une Première messe des Piroguiers qui n’a pas été produite ici mais plutôt par les petits chanteurs à la Croix d’Ebène à Paris. Cette chorale à aujourd’hui 70 ans et, est plus âgée que la mienne débaptisée. Au-delà de cet opus produit par la maison Erato, nous avions eu en 1949, sous la direction de Papa Emile Oboa, la production des chants africains qui sont : Mwana Ndzessi ; Suzana dont certains sont tirés des chants Scouts et d’autres des compositions des Piroguiers. La génération actuelle n’a pas produit en studio, c’est ce que nous envisageons de faire maintenant. Mais cette chorale a enregistré avec un ancien Piroguier, l’Abbé François Wamba (paix à son âme) son quatrième volume ; car il n’en avait produit que cinq. Et c’est ce quatrième volume qu’il a produit exclusivement avec les Piroguiers. Pour ce qui est du travail, il y a quelques choristes qui ont dû produire un opus. DB: Peut-on avoir une idée sur les grandes personnalités et artistes musiciens qui ont marqué votre chorale? CA-Y: Comme artiste, ils sont tellement nombreux, mais je pouurais entre autres, papa Joseph Makaba qui fut un grand ami d'Emile Oboa, lui-même président de cette chorale ; le colonel Ondzé ; maman Cécile Bakabissa ; Guy Paul le feu Boumandoki (pendant la transition, paix à son âme) ; César Touloume ; Joseph Mountou et moi-même qui suis revenu à plusieurs reprises. Quant aux personnalités, plusieurs ont été à la tête de cette chorale. Outre papa Emile Oboa qui a fini au bureau de l’Unesco, il y a les ministres Henri Ossebi, Léon Alfred Opimbat, les professeurs Charles Ngombé Balawa, Antoine Ayissi, papa Felix Maléka, etc. Cette chorale qui a été celle du Moyen-Congo ou sinon créée au Moyen-Congo, était composée de plusieurs générations de nationalités diverses. C’est par exemple le cas de papa Léon Makaba, qui est aujourd’hui pour l’église, le maître de Chapelle, pour avoir formé plusieurs générations de musiciens pour poursuivre l’œuvre de musique sacrée, dont nous autres. Je tiens à informer qu’à l’occasion de la célébration de ces anniversaires, nous invitons toujours les enfants Oboa (dont le père était le premier président de la chorale), ainsi que d’autres. Mais ces enfants ne se limitent pas qu’à la fête, nous compatissions dans beaucoup de chose. Chaque fois quand-ils ont des situations, ils nous invitent et nous partagions ces moments avec eux. DB: La vision de la chorale Les Piroguiers 65 ans après. C.A-Y: Notre vision 65 ans après, c’est d’aller vers un acte concret. C’est vrai que nous avions la louange du Seigneur, mais il faut que nous essayions de mettre à profit toute l’expérience acquise. Je vous ai parlé de la rareté des opus, pour ceux qui sont là, nous sommes en mesure de produire 5, 6 sinon 7 opus à peu près, pour tout ce que nous avons aujourd’hui comme capitale musicale ou mieux comme composition. Nous avons un principe, aucun chant ne se chante s’il n’est mis sur porté. Et nous aurons donc à la fois à produire les opus et à produire les transcriptions musicales de ces chants (des carnèles musiques) pour faciliter leurs apprentissages pour qu’ils ne soient pas galvaudés. Nous préparons ce que nous avons déjà pour exécuter avec les enfants, mais c’est pour l’année prochaine, notamment dans les six premiers mois de l’année. Le projet est énorme, nous allons reconstituer l’historique de la chorale et faire participer les anciens. Parce que la chorale est plus inondée des jeunes de moins de 20 ans pendant ce temps, tous les anciens qui devraient être là n’y sont pas. Donc, il faudra reconstituer cet échiquier des anciens pour qu’ils viennent entourer et encadrer les jeunes.
Bruno Okokana Légendes et crédits photo :Photo : Le président de la chirale Les Piroguiers, Christophe Aya-Yombo |