Jeux de la Francophonie : rencontre avec Moussoki Mitchum Jules Ferry Guevin, conteur congolais médaillé d’or à Abidjan

Mercredi 27 Septembre 2017 - 1:53

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Médaillé d’or aux 8es Jeux de la Francophonie Abidjan 2017 dans la série conte, aux côtés de Moussa Doumbouya de la Guinée et de la française Najoua Darwirche, Moussoki Mitchum Jules Ferry Guevin, conteur et comédien brazzavillois, se livre à travers cette interview. Il lance un appel pour la promotion et la sauvegarde du patrimoine culturel congolais dans toute sa diversité.

Les Dépêches de Brazzaville : Comment êtes-vous devenu conteur ?

Moussoki Mitchum Jules Ferry Guevin: Avant de faire ma rencontre avec le conte, j’ai commencé tout d’abord avec le théâtre en 1994 à l’église évangélique de Mayangui, plus précisément dans le groupement appelé CBE. Et de là, j’ai intégré la troupe de théâtre de mon collège le CEG 8 Mars puis au théâtre national congolais. C’est en 2003 que j’ai fait ma première rencontre avec le conte grâce à l’atelier de formation qui avait pour thème « Initiation à la pratique du conte » animé par le comédien et conteur congolais Abdon fortuné Koumbha « KAF » Médaillé d’Argent des IVes Jeux de la Francophonie en 2001 à Ottawa. Après, il y a eu d’autre formation, toujours dans le domaine du conte, avec des conteurs venu d’ailleurs, comme Joujou Turène du Canada, Adama Adepudju (Taxi conteur) de la Côte d’ivoire. C’est donc au sortir de ces formations que je suis devenu conteur.

 

LDB : Attendiez-vous à recevoir un prix à Abidjan avant votre départ ?

 M.M.J.F.Q. : Personnellement, je ne m’attendais pas à recevoir un prix avant le départ pour Abidjan puisque je ne connaissais pas le travail des autres concurrents. Le plus important, c'était de partager la parole, de partager la scène avec les autres conteurs venus de différents pays. Mais le directeur artistique de l'Espace Tiné avec qui j'ai travaillé quelques mois avant m'avait dit de travailler davantage car, lui, il y croyait. Si aujourd’hui j’ai reçu la médaille d’or aux 8es Jeux de la Francophonie à Abidjan, cela ne voudrait pas dire que je suis plus que les autres conteurs. Non. Loin de moi cette pensée. Cette récompense est plutôt comme un symbole qui nous a été transmis par nos aînés pour mener à bien ce combat des arts de la parole.

LDB : Qu’est-ce qui explique un tel succès ?

M.M.J.F.Q. : Je vous dirais tout simplement que c’est le travail. Il n’y a pas un autre secret que le travail. Il est important de croire en soi, croire dans ce qu’on fait  et croire aussi  et surtout en Dieu puisque je suis avant tout chrétien.

LDB : Vous êtes aujourd’hui une fierté pour le Congo, que comptez-vous faire à l’avenir pour garder le cap ?

M.M.J.F.Q.  : Ce qu’il faut faire à l’avenir pour garder le cap c’est de continuer de travailler, travailler et travailler davantage avec beaucoup de rigueur  et surtout rester à l’écoute des autres, des conseils des frères aînés, ce n’est pas parce que j’ai eu la médaille d’or que le succès doit  prendre le devant. C’est dans l’humilité, la sagesse, l’observation, l’écoute et le travail que l’on pourra garder le cap.

LDB : Que représente pour vous le conte ?

M.M.J.F.Q. : Il n’y a peut-être pas au monde, selon moi bien sûr, un autre métier qui vous procure du plaisir, de la joie. Un métier qui soit moins stressant, un métier qui apporte la joie dans les cœurs, un métier où le père, la mère, et les enfants sont tous assis au tour de la parole, pour la partager. Alors le conte représente pour moi un moyen de transmettre un message,  de partager la joie, le bonheur, mais aussi d’apporter un plus dans la société où nous vivons.

LDB : Et les difficultés dans votre vie d’artiste ?

M.M.J.F.Q. : Un artiste, en particulier un conteur, est avant tout une personne comme tous les autres, vivant dans une société ou les difficultés ne manquent jamais. Dans la vie d’artiste, il y a beaucoup de difficultés comme d’ailleurs dans tous les métiers que pratiquent les hommes. Les artistes que nous sommes rencontrons des difficultés parmi lesquelles le manque de soutien dans la réalisation des différents projets artistiques et culturels, la non-valorisation des artistes dans leur métier ...

LDB : Peut-on vivre de son art en Afrique ?

M.M.J.F.Q. : Je dirais oui. L’art que nous pratiquons en particulier le conte est un métier comme tous les autres, et quand on pratique un métier c’est qu’on peut vraiment vivre de ça. Le conteur congolais de Brazzaville Abdon Fortuné Koumbha «  KAF »,  ou Adama Adpuju (taxi conteur) de la côte d’Ivoire et bien d’autres sont nos aînés dans ce métier des arts de la parole. Ce sont des exemples. Je pense que nous allons suivre leur exemple.

LDB : Y a-t-il un espace où on peut rencontrer les conteurs ici dans notre pays ?

M.M.J.F.Q.  : Oui. Il existe des espaces. Le plus important est sans doute l’Espace Tiné qui existe depuis 2003 et forme des conteurs. J’appartiens à la première génération des conteurs formés par l’espace Tiné. Les conteurs sont nombreux, Ulrich Ntoyo, Dorient Kally (Médaillé de Bronze aux 7es Jeux de la Francophonie à Nice (France), Fine Poaty, Audifax Moumpossa, Céline Moundze, et bien d’autres encore. Tous ont reçu leur formation à l’Espace Tiné qui avait, autrefois, son siège à Brazzaville avant son transfert à Dolisie.  Et depuis 13 ans l’Espace Tiné organise le festival international « RIAPL » Les Rencontres Itinérantes des Arts de la Parole et du Langage.  Au mois de juin 2018, l'Espace Tiné lancera sous la direction artistique d’Abdon Fortuné Koumbha KAF, un nouveau festival qui verra le jour à Dolisie, "Festival Dol'En Scène consacré aux petites formes théâtrales.

LDB : Un message de la fin ?

M.M.J.F.Q.  : Le message de la fin est un appel de soutien que nous lançons  auprès des autorités de notre pays, aux sponsors, mécènes, hommes de culture et bien d’autres promoteurs culturels. La culture ne s’arrête pas seulement à la musique ou encore moins à la danse, mais il y a aussi les arts de la scène (le Théâtre, le Conte...).  Le même appel est lancé aux ONG, aux personnes de bonne volonté, aux organismes œuvrant dans le domaine de la culture ou non, aux différentes structures de la place, aux médias, de penser à la sauvegarde de notre patrimoine culturel dans toute sa diversité.

 

Propos recueillis par Aubin Banzouzi

Légendes et crédits photo : 

Julles Ferry Quevin, conteur congolais médaillé d’or aux Jeux de la Francophonie 2017

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