Interview. Nganji Mutiri : « Le Soleil dans les yeux est mon meilleur film jusqu’à présent »

Samedi 28 Janvier 2017 - 15:04

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Réalisateur, acteur et photographe d’origine congolaise vivant à Bruxelles, Nganji Mutiri vient de réaliser le film « Le Soleil dans les yeux ». Dans cet entretien, il explique le contexte de réalisation de cette nouvelle œuvre ainsi que sa démarche artistique. 

Les Dépêches de Brazzaville : Pourriez-vous résumer le film et le message principal qu’il contient ? 

Nganji Mutiri:  le film est basé sur l’histoire d’Amani, un jeune homme belgo-congolais, partagé entre ce que l’on attend de lui et ses propres aspirations. Ce que je souhaite que l’on retienne de ce film est que pouvoir s’exprimer sincèrement est d’abord une lutte intérieure avant d’être, parfois, une lutte contre des personnes qui nous sont proches. Ici, en l’occurrence, c’est la famille. Le personnage d’Amani a une frustration que l’on perçoit dès le début du film et qui va finir par exploser. Il est donc préférable d’être soi-même et de poursuivre ses propres aspirations. C’est mieux pour la santé. (rire)

LDB: D’où vous est venue l’idée et pourquoi le choix de ce titre ?

NM : J’essaie de réaliser les films qui me manquent. Actuellement, ce sont des films avec des personnages d’origine africaine qui ressemblent aux gens que je connais et très rarement aux personnages que je vois dans les films au cinéma ou à la télévision. Au départ, le film était un projet d’écriture à soumettre à la ville de Mons, au moment où elle s’apprêtait à être capitale culturelle européenne. J’avais prévu d’allier librement la ville de Mons et la diaspora congolaise à ce que Vincent Van Gogh m’inspirait. J’ai réécrit le scénario plusieurs fois avant d’être obligé de le mettre au frigo pendant un an et demi. Finalement, Samira Hmouda du Pianofabriek Citylab a marqué son intérêt pour produire un de mes films. Notre collaboration fut très bonne car elle offrait une confiance et une liberté que ne m’avaient pas offertes les précédents producteurs. C’est ainsi que « Le soleil dans les yeux » est revenu sur ma table d’écriture. Dans ce film, je voulais explorer, à ma façon, quelques préjugés que l’on a sur la diaspora congolaise en particulier et africaine de façon générale, c’est-à-dire la ferveur religieuse, l’esprit de famille et l’art populaire. Le titre est un clin d’œil à un livre sur Vincent Van Gogh qui s’appelle « Le soleil en face ». Je suis davantage fasciné par l’homme que par ses œuvres. Par ailleurs, le soleil représente une belle métaphore de tout ce qui peut, à la fois, éclairer et aveugler. J’aime quand les choses ont plusieurs dimensions, comme dans la vraie vie.

LDB : Comment pourriez-vous qualifier la construction du récit?

NM : Plus on avance dans le film, plus notre première perception est remise en question. En tant que spectateur, j’aime beaucoup les narrations qui me font activement participer à l’intrigue. Quand j’écris, je commence par déterminer le fil conducteur général du récit avant de longuement « travailler » les personnages. J’ai, par exemple, rédiger les biographies complètes d’Amani, de Raphael et de Riziki avant de me focaliser sur la collaboration avec les acteurs qui allaient les interpréter. Je leur laisse alors un maximum de liberté pour apporter de la vie et une véritable écoute de l’autre devant la caméra. Térence Rion, Denis Mpunga, Cécilia Kankonda, Tamara Kalvanda, Nabil Missoumi et John Dobrynine interprètent les personnages que l’on voit le plus à l’écran. Mais, j’ai également eu la chance de créer des scènes avec des artistes que l’on ne voit pas assez dans mon court-métrage et avec qui j’ai hâte de retravailler.  A tous, je suis infiniment reconnaissant de m’avoir apporté le réalisme et les émotions que je recherchais. Nous avons construit ensemble un film qui a le luxe de prendre son temps, d’avoir plusieurs degrés de lecture et, je l’espère, de surprendre.

LDB : Quel est actuellement la vie du film après le tournage ?

NM : Nous avons fini le montage au début du mois de décembre 2016. Pour le moment, le film n’a été projeté qu’une seule fois : au festival « System D » du Pianofabriek au K.V.S. à Bruxelles. Maintenant que les sous-titres en anglais sont prêts, je suis en train de soumettre le film à plusieurs festivals internationaux et espère prochainement annoncer des selections.

LDB : Le film a pris combien de temps de tournage ?

NM : Une fois le passionnant travail en amont effectué avec chaque membre de mon équipe, j’ai l’habitude de travailler assez rapidement. Malgré un petit budget, j’ai eu la chance d’être très bien entouré sur ce projet. J’ai travaillé avec ma sœur Malkia qui est également photographe réalisatrice et Watna Horemans, un des membres fondateurs de mon collectif artistique « L’Animalerie ». Ahmed Akif, Yago Deben, Vivyane Dewals, Griet Minnebach et les responsables du musée Antoine Wiertz ont aussi été indispensables à la réussite de notre film. « Le soleil dans les yeux » est mon meilleur film jusqu’à présent, par rapport à la richesse du scénario, la qualité du résulat final et surtout par le fait que j’ai été soutenu plus que d’habitude.

LDB : Quels sont vos projets artistiques ?

NM : Le 4 février, invité par Anne Wetsi Mpoma, je participe au festival Afropolitan au Bozar de Bruxelles. Le 25 février je joue dans la pièce de théâtre « Le caméléon » de l’auteur camerounais Patrice Ndedi Penda et mise en scène par Dada Stella Kitoga. Durant le mois de mars, j’ai mon exposition photographique, dénommée « In search of freedom », au Parlement francophone bruxellois. Voilà ce qui m’attend dans l’immediat. À moyen terme, j’espère réaliser avant la fin de l’année l’épisode pilote de ma série «Une lueur d’espoir » en Europe ou en Afrique. Tout dependra des opportunités.

Pour plus d’informations : www.nganji.be  & www.filmlesoleil.com 

Patrick Ndungidi

Légendes et crédits photo : 

Photo 1- Nganji Mutiri Photo 2 - Nganji Mutiri et son équipe pendant le tournage Photo 3 - Vue d'une scène du film © Watna/Nganji

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