Livres: Jérôme Ollandet récite l'histoire de Boundji

Vendredi 3 Juin 2016 - 19:21

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216 pages, sept chapitres, des annexes et une bibliographie fouillée: le livre de Jérôme Ollandet, paru cette année chez L'Harmattan-Congo Brazzaville, est un hymne à la gloire de la ville de Boundji, bâtie à une petite distance du fleuve Alima, dans le département de la Cuvette au Nord-Congo.

Comme l’indique son titre  Le premier foyer culturel du Nord-Congo. L’histoire de Boundji, l’ouvrage de l’historien, diplomate et juriste congolais rappelle le destin d’une bourgade élevée au rang de creuset de l’éducation occidentale pour les jeunes apprenants de cette partie du pays : «  C’est une vérité d’affirmer que les premiers « lettrés » et les premiers « clercs » du Haut-Congo avaient appris à lire et à écrie à la maison catholique Saint François-Xavier de Boundji », explique-t-il en ouverture de son ouvrage. Il situe les repères en l’an 1903, précisant que l’apprentissage se faisait alors en langue Mbochi.

 Ligne après ligne, Jérôme Ollandet passe en revue les événements qui ont marqué la vie des peuples de cette contrée, décrit les rapports de ces derniers avec les missionnaires blancs, et de suite, parle des actes posés par les uns et les autres durant cette « coexistence » faite de hauts et de bas. Historien, cela est rappelé plus haut, l’auteur revient aussi sur les omissions, les ratés, peut-être même, les insuffisances qui jalonnent souvent le travail d’écrire l’histoire.
Deux exemples parmi tant d’autres de ces ratés : On a toujours appris dans les récits consacrés à la conquête de la Cuvette congolaise par le colon, la farouche résistance des Bafourous, une communauté ethnique que l’on ne trouve nulle part au Congo et encore moins dans la région concernée. Sur la question, les historiens eux-mêmes se perdent en conjectures. Mais, dans la mesure où, en langue Mbochi, le mot pour désigner les étrangers est Abourou, ou abvoulou pour parler comme à Boundji, les explorateurs blancs ont-ils peut-être écouté les peuples qui leur résistèrent dans la Cuvette crier aux Abourou qu’ils se mirent à combattre ? Les langues humaines étant fuyantes quand on ne les appréhende pas, le mot Abourou, ou abvoulou, a-t-il été pris pour bafourou par ces étrangers à la conquête de nouvelles terres ? L’auteur ne l’affirme pas.

Le deuxième exemple de cette distorsion des mots, des notions, qui finit par imposer sa convenance comme une évidence, Jérôme Ollandet le trouve dans Alima, le nom du fleuve qui arrose plusieurs localités du département de la Cuvette. Pour lui, et il n’a pas totalement tort, le mot Alima ne veut rien dire en langue Mbochi, ne signifie absolument rien en Tege, voisine de la première. Alima serait alors le résultat de l’ouïe « fuyante » de l’Européen qui demandait à l’autochtone Tege comment appelait-on le cours d’eau qui se trouvait devant lui. Et ce dernier de répondre, presque de lui retourner la question « anza m’alima ? », « cette rivière-là ? ». L’occasion pour son interlocuteur, Pierre Savorgnan de Brazza en l’occurrence, de déduire que ce cours d’eau s’appelait Alima.
Au fond, à partir de l’histoire de Boundji, Jérôme Ollandet livre au lecteur une suite d’informations documentées sur ce qu’il faut retenir du passage du Blanc dans le Haut-Congo. Si, comme il le répète « les missionnaires apprirent à lire et à écrire aux jeunes enfants de cette partie-ci à Saint François-Xavier de Boundji », il reconnaît par ailleurs que « ce fut plutôt à Makoua qu’ils lancèrent véritablement l’enseignement catholique de haut niveau avec la création d’un petit séminaire et d’un cours normal pour la formation des moniteurs de l’enseignement primaire ».
L’auteur poursuit sa passionnante mission d’information jusqu’à l’avènement de l’indépendance du Congo en 1960 et au-delà. Avec les bouleversements que ce tournant a suscités, peut-être jusqu’à nos jours. L’histoire ne s’arrête pas, on le sait et, l’ouvrage de Jérôme Ollandet en donne la meilleure preuve. À lire.

 

 

Gankama N'Siah

Légendes et crédits photo : 

Couverture du livre de Jérôme Ollandet/ photo DR

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