Cinéma : Mantuila, un fou de la guitare, fait de l’effet à l’Institut françaisLundi 6 Avril 2015 - 15:30 Les cinéphiles venus assister à l’avant-première du documentaire la nuit du 2 avril à la Halle de la Gombe ont tout de suite réagi à la séquence initiale, à savoir l’inhumation du personnage principal accompagné d’un discours amer. Point d’éloge funèbre pour le grand guitariste. L’oraison funèbre de la mère de feu François Mantuila Nyombo au moment de la mise en terre de sa dépouille était d’une surprenante dureté. Les propos étaient certes durs mais ils n’étaient pas haineux. Un sacré mélange de regrets, remarques tranchantes et de reproches adressés au mort. Dans la foulée, il y avait une pointilleuse critique sur le fait que le disparu n’aimait pas prier. Quoiqu’elle finît par reconnaître qu’ils s’étaient pardonnés mutuellement, elle ne pût cependant s’empêcher d’achever son discours de manière incisive. « …parce que tu n’as rien foutu dans ce monde. Tu étais un fieffé ivrogne, toujours prêt à picoler et insulter… », pouvait-on lire dans le sous-titrage en français proposé en traduction dans la foulée des propos dits en lingala. Les nombreux commentaires entendus le long du moyen métrage étaient la plupart du temps très peu complaisant, assez proches de ceux de la génitrice du défunt. Tous s’accordaient sur le fait que François Mantuila était pétri de talent, un vrai virtuose de la guitare et c’est uniquement pour cela que les intervenants, en majorité des musiciens, lui jetaient des fleurs. Car, aussitôt après avoir reconnu le mérite de l’artiste, chacun ajoutait qu’il était aussi doté d’un bien fichu caractère. Des déclarations qui venaient conforter l’oraison funèbre de la mère qui n’avait pu s’empêcher de relever cet aspect des choses à l’enterrement. Aussi le public choqué dès l’entame du film la comprenait-elle un peu mieux à l’écoute des divers témoignages. Néanmoins, de tous les témoignages entendus, celui de Ray Lema pourrait paraître assez tendre. En effet, il a révélé que le disparu l’avait pris autrefois sous son aile et qu’il s’était créé des liens fraternels de sorte que leurs rapports étaient particuliers. Quoiqu’il n’ait pas fait l’impasse sur le vilain caractère de celui qui avait de lui son protégé, il est apparu qu’il fut l’une des rares personnes qui ne fit pas les frais de son sacré tempérament à l’instar de Jacques Tshimankinda. Ce dernier a du reste eu le privilège d’être le dernier à partager la scène avec feu François Mantuila. Le moment passé sur le podium du JazzKif reste un souvenir indélébile surtout que, à cette occasion, le disparu avait tenu des propos on ne peut plus élogieux à son égard en le présentant comme un chanteur de blues confirmé. Néanmoins, le film s’est achevé sur un ton beaucoup moins acerbe que le début. Bien que là encore, Madeleine, la sœur du défunt qui s’accorde avec la progéniture de son frère qui le traitait de « fou » reconnaisse tout de même qu’il pouvait être adorable à certains moments. Elle dit alors combien « ses filles regrettent beaucoup leur papa. Surtout Ndona, elle l’adorait malgré tout ». Il vaut mieux avoir un fou dans la famille que de n’avoir personne « parce qu’un fou, dit-elle, fait rire, il joue aussi son rôle dans la famille. Maintenant qu’il est parti, je regrette notre fou. Mais c’est le chemin de tous. Il a vécu, qu’il repose en paix. Il a été malade et maintenant là où il se trouve, il ne souffre plus ». Et à Ray Lema de conclure : « Je regrette qu’il n’ait pas eu toute la reconnaissance qu’il mérite. C’est sûr que le pays lui doit comme il doit à beaucoup d’autres. Je ne comprends pas qu’un pays qui soit aussi doté ne puisse pas donner en retour à ses enfants ». Nioni Masela Légendes et crédits photo :Photo 1 : Un extrait de Mantuila, un fou de la guitare
Photo 2 : Le réalisateur Michée Sunzu répondant aux questions du public après la projection
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