Les Dépêches de Brazzaville : Pouvez-vous nous révéler la programmation du Festival ?
Yacouba Konate : La programmation du In est bouclée et nous sommes encore en train de boucler celle du Off. La cérémonie d’ouverture aura lieu au stade Houphouët-Boigny d'une capacité de 55.000 spectateurs, en présence des présidents Abdou Diouf et Alassane Ouattara. Nous nous sommes donné les moyens d’avoir une affiche attrayante avec P. Squre, Salif Keita et Magic System. Dans la programmation du In, nous avons introduit deux nouvelles disciplines : l’humour et le conte. Nous allons très certainement intégrer aussi la mode. Des défilés seront intercalés entre chaque spectacle et nous allons créer une scène avec des défilés. Pour les humoristes il y a une dimension contextuelle de l’humour qui ne passe pas forcément d’un pays à l’autre car les référents ne sont pas les mêmes. Pour les éditions suivantes, nous allons donc demander aux humoristes des choses qui peuvent plaire à l’international. Les arts du cirque seront aussi représentés avec des compagnies de marionnettes, le cirque Mandingue, les grandes personnes de Boromo, de la jonglerie et des troupes d’arts de la rue. Ils seront mis en valeur au cours de la journée consacrée aux scolaires.
À côté du Plateau du In, il y aura, du 6 au 8 mars, des plateaux spécialisés en hip-hop, reaggae/ragga, coupé-décalé/musiques urbaines, zouglou à Yopougon ; un plateau femme au palais de la Culture ; un plateau francophonie avec les lauréats des jeux de Nice ; et un plateau rétro avec les stars des années passées, du jazz ; et un plateau dialogue des religions avec des chorales à Bassam. À Bouake il y aura un plateau mixte pour reprendre toutes ces disciplines. Nous allons augmenter la dimension Festival avec plus d’activités culturelles à l’intérieur des quartiers ainsi qu’à Bouake et Bassam, deux villes de l’intérieur du pays.
LDB : Pourquoi avoir voulu développer la dimension Festival cette année ? Est-ce parce que la dimension Marché du spectacle n’est pas au rendez-vous ?
YK : Pas du tout, nous sortons d’une épreuve et chacun a vécu des scènes d’horreur et des tragédies. Nous voulons proposer aux populations un « rinçage » de leur mémoire, leur donner des instantanés positifs pour éclipser cette mémoire en faveur d’images plus joyeuses. La logique du marché est bien enclenchée mais il y a des reculs avec la crise qu’a connue le pays. Les modèles en vigueur jusqu’aux années 2000 sont en déclin avec l’avènement du numérique, mais le marché existe. Il faut seulement se réadapter aux nouveaux termes des arts de la scène. Il y a un nouveau marché qui est celui des festivals. Nous les faisons venir au Masa pour pouvoir nous fédérer. Dans notre comité de sélection, il y a des directeurs de festivals du Niger, du Cap-Vert, etc., cela permet de découvrir des artistes et nous ouvre des perspectives. Mais il faut intégrer que marché ne veut pas seulement dire exporter en Occident et international ne veut pas dire seulement vers l’Europe ou les États-Unis.
LDB : Vous avez mis les petits plats dans les grands pour le retour du festival. Quel est votre budget ?
YK : On a souvent une culture de la modestie en Afrique. Par exemple on n’ose jamais dire que l’on va bien, on dit toujours ça va un peu. Mais il y a besoin de manifestations qui ont des ambitions élargies. Le Masa essaye de bousculer, de rêver de façon plus audacieuse. Nous avons un budget total de 2 millions d’euros. Historiquement, l’organisation est basée sur une double contribution de l’OIF et du ministère de la Culture de la Côte d’Ivoire. Ce ministère nous a donné 300 millions de FCFA et l’OIF, 200 millions. Nous avons reçu un soutien très fort du district d’Abidjan qui est rentré dans le conseil d’administration pour l’organisation, la sécurité et le protocole. Il contribue aussi au budget à hauteur de 300 millions de XAF. Le secteur privé est très impliqué, et contribue à hauteur de 400 millions de FCFA.
LDB : Comment la sélection des artistes s'est-elle passée ?
YK : La sélection des candidatures s’est faite sur dossiers, qui ont été étudiés par des comités d’experts constitués par discipline. C’est le comité artistique qui fait l’option de sélectionner les troupes artistiques. On ne cherche pas forcément un équilibre entre les différentes régions d’Afrique. En musique, ces experts ont choisi de ne sélectionner que des groupes qui n’ont jamais participé aux éditions précédentes du Masa, et les jurys qui sont producteurs de musique ne pouvaient pas présenter leurs poulains.
LDB : Pour ceux qui ont raté cette édition, quand pourront-ils se présenter pour le prochain Masa ?
YK : Nous prendrons les prochaines candidatures en janvier 2015.