Belles lettres : Poetik Makutano pose ses valises à l’ambassade du Portugal

Mercredi 23 Mars 2016 - 19:12

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Organisée dans le style soirée privée sur invitation, la rencontre spéciale dédiée à la poésie d'expression portugaise, la deuxième du tout nouveau festival de Kinshasa, a réuni une bonne trentaine de personnes la nuit du 22 mars.

Parmi les personnes assises en face de l’assistance, Ana Teresa Côrte-Real entourée des ambassadeurs du Brésil et du Portugal A tous points de vue différente de la soirée d’ouverture qui avait eu pour cadre le bar « O P’tit Marseillais » bordant le mur de l’Institut des Beaux-arts la veille, cette rencontre se voulait plus intimiste. Structurée en quatre parties, elle avait l’avantage sur la première édition de la participation active des maîtres des lieux, en l’occurrence l’ambassadeur João Côrte-Real et son épouse Ana Teresa Côrte-Real.

Consacrée à la lecture de poèmes d’auteurs contemporains d’expression portugaise et ponctuée de façon admirable par la musique de chambre de l’Orchestre symphonique Kimbanguiste (OSK), la soirée du 22 mars a changé le décor du jardin de l’ambassade. C’est avec un hommage à Luis de Camões, poète du XVIe siècle, qu’a été lancée la première partie de la soirée. Le sonnet Changent les temps et changent les désirs avait donné le ton. Six autres textes ont alimenté ce moment initial, à savoir Variation camonienne et Voyage autour du monde de Nuno Júdice, Le Monstre et Voyager ! Perdre des pays ! de Fernando Pessoa ainsi que Mer et Ils naviguaient sur la carte qu’ils dressaient de Sophia de Mello Breyner Andresen.

Il s’en est suivi un intermède musical très apprécié. L’interprétation de Luba, une composition du violoniste Héritier Mayimbi sur fond de folk luba, comme l’indique son titre, a reçu un bel accueil du public hétéroclite venu assister à la rencontre. A cette deuxième partie de la soirée, qui a sucité un immense enthousiasme, a succédé une dernière session de lecture. De quatre, l'on est passé à sept auteurs, tandis que des poètes d’autres pays lusophones entraient dans la danse. C’est ainsi que d’entrée de jeu l’ambassadeur du Brésil fit la lecture de Sur le Matin, un poème de Ruy Espinheira Filho. Et, bien a pris à son homologue, l’ambassadeur du Portugal, de lire à son tour Séduction d’Adélia Prado, une poésie de l’autre auteur du pays du football proposé à l’assistance.Le cinéaste Pitshou Tshiovo lisant la glose d’Arménio Vieira

Les artistes entrent dans la danse

Aux illustres personnalités ont succédé cinq artistes de la place. C’est de la sorte que procédant à la lecture de Nuit, Jonathan Kombe « a introduit pour la première fois Agostinho Neto dans une enceinte officielle portugaise », a confié aux Dépêches de Brazzaville le cinéaste Balufu Bakupa-Kanyinda. Quant à Adrien Mpiana, il a offert de découvrir Tristesse des yeux de Paula Tavares dont le nom, a-t-on appris, figure dans plusieurs anthologies de poésie angolaise publiées au Brésil et au Portugal. Le cinéaste Pitshou Tshiovo a, pour sa part, contribué à une dégustation de la poésie capverdienne en lisant la glose d’Arménio Vieira Glosa Ao Poema De Passarem Aves. Lecture a été faite ensuite, sur un plus poétique, avec le poète Ladain Kandji qui s’est épanché sur le texte de son homologue mozambicain Luis Carlos Patraquin dont il a égrené Animal terrestre, cœur bestial, argile nègre !. Bouclant la boucle et suivi par la dernière prestation de l’OSK, l’acteur et chanteur MoÏse Ilunga a donné une dimension particulière à Je t’ai aimé sans que tu saches. Confession applaudie de l’écrivain, romancier, poète et dramaturge mozambicain António Emílio Leite Couto, dit Mia Couto.

Poetik Makutano, nous a dit le cinéaste Balufu précité, « est le festival de poésie de Kinshasa ». Et de souligner ici que « Makutano veut dire rencontre ou lieu de rencontre. Un village porte ce nom au Kenya. Le mot makutano extrait du vocabulaire swahili garde le même sens en lingala où il est tiré du verbe kokutana, se rencontrer », comme le savent les Kinois principaux locuteurs de cette langue.

Prestation finale de l’OSKBalufu, directeur de la Manufacture de l’imaginaire, organisatrice de l’événement, tient dès lors, Poetik Makutano, pour ce lieu privilégié où « les poètes peuvent se rencontrer dans cette ville d’une façon formelle ». Car, soutient-il : « Nous avons voulu créer un lien entre poètes. Il existe des poètes dans la chanson et ceux qui choisissent de demeurer dans les livres, à l’écrit, et nous avons voulu accorder à chacun l’occasion de s’exprimer ».

Cette tribune de poètes qu’est le festival Poetik Makutano, signale Balufu « est fait avec presque pas de moyens. J'ai parlé aux gens que je connais et, les lusophones se sont proposés. C’est de cette manière qu’a vu le jour la première édition. Les gens se proposent d’intervenir, de participer. Il faut que les Congolais en sachent plus sur leur histoire. On leur enseigne que leur histoire commence avec la conférence de Berlin, mais au XVIe siècle, le Royaume du Kongo avait une ambassade à Lisbonne ». L’initiative Poetik Makutano est née aussi d’une rencontre préalable. « L’épouse de l’ambassadeur du Portugal est une ancienne professeure de Lettres à l’Université de Lisbonne. J’ai eu l’occasion de donner des cours à cette même université », nous a-t-il fait savoir.

 

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Parmi les personnes assises en face de l’assistance, Ana Teresa Côrte-Real entourée des ambassadeurs du Brésil et du Portugal Photo 2 : Le cinéaste Pitshou Tshiovo lisant la glose d’Arménio Vieira Photo 3 : Prestation finale de l’OSK

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