On vous connaissait écrivain, vous voici avec une nouvelle casquette : enseignant de lingala. Expliquez-nous cette démarche.
Je dispenserai les cours de lingala au sein du Réseau international de co-intégration et de co-développement (RICC) un centre de formation professionnelle et continue, agréé par le ministère de la Formation professionnelle créé par Mathurin Mingni. Une partie des populations d’origine africaine ne connaissent pas nos langues. Or une langue c’est une culture, une pensée, une manière d’être, un art de vivre et c’est également une forme de transmission. Quand on enseigne une langue à quelqu’un, on ne se contente pas de communiquer, d’échanger, il y a plein de messages qui se transmettent. On s’en rend compte lorsque l’on passe d’une langue à une autre : on ne dit pas nécessairement la même chose. Parmi les personnes intéressées par les cours, il y a des Africains de toutes origines : nés en Afrique, de la diaspora (Amériques, etc.), qui sont désireux d’apprendre ces langues car c’est une forme de retour aux sources.
Il y a de ce point de vue une nette différence entre Congolais du petit et du grand Congo. Les enfants des seconds, même nés en France, parlent tous lingala contrairement aux premiers. Comment cela pourrait-il s’expliquer ?
Je n’ai pas fait d’études sociologiques là-dessus donc je parlerais uniquement de ce que j’ai pu observer. Lorsque l’on va dans les foyers des congolais de Brazzaville, les gens parlent en français. S’il faut s’hasarder à une explication, je dirais que le président Mobutu qui a dirigé le pays pendant presque 27 ans avait mis en place un système d’enseignement en lingala de la première classe primaire à l’équivalent de la cinquième. Le français et l’anglais étant enseignés au même titre que la biologie, les mathématiques ou l’histoire. Je pense que les gens de cette génération ont perpétué cette tradition et continuent à transmettre le lingala à leurs enfants quel que soit le pays dans lequel ils vivent. Chez nous, ce n’est pas le cas. On a magnifié, voire même quasiment déifié le français. Les Bambara, les Wolofs, Malinké parlent leurs langues et envoient même leurs enfants au Mali un an ou deux, avec des résultats qui sont très positifs, quand ils se rendent compte que le déphasage est trop fort. Et les résultats, sur le plan linguistique, quand les enfants reviennent en France, est excellent.
Vous êtes également impliqué dans le projet de WebTV AfrikiTV, pouvez-vous nous en toucher deux mots ?
J’ai été contacté en effet par Franck Cana pour participer à cette aventure de Média en ligne à laquelle je vais apporter une touche panafricaine. Je vais y animer une émission de 30 minutes dans laquelle j’accueillerai des politiques, des journalistes, des artistes sur des thèmes très variés. L’idée est de donner la possibilité aux Africains connus ou non, qui ont envie de partager quelque chose de pouvoir s’exprimer. Nous n’avons pas la possibilité de nous inviter entre nous pour parler de l’Afrique, hors de notre continent. Dans les émissions où l’on parle de l’Afrique en général, il n’y a aucun Africain et s’il y en a un, c’est en réalité un Européen à peau noire. Je souhaiterais proposer autre chose. Il y a des problématiques de scolarité, de santé, aujourd’hui sur notre continent et je voudrais expliquer les choses, rechercher des solutions, susciter les réactions, des débats. Je suis interviewer mais dans le cas où l’invité insulterait l’Afrique, je me permettrais de sortir de mon devoir de réserve et de leur infliger un carton rouge. Car alors c’est comme si l’on insultait mes parents, mes ancêtres.