Soixante ans de littérature congolaise : les pères fondateurs13-12-2013 18:15 À l'initiative de l'association Agora et de l'écrivain congolais Aimé Eyengué, la dernière manifestation marquant le soixantenaire de la littérature congolaise à Paris a eu lieu le 10 décembre à la Librairie-Galerie Congo. Les écrivains congolais de la nouvelle génération — Obambe Ngakosso, Itoua Ndinga, Virginie Mouanda — et le critique littéraire Zacarie Acafou sont revenus, sous la modération de Martin Lemotieu, sur les figures tutélaires de la littérature congolaise. La deuxième partie de la soirée a été dédiée à cette autre forme d'écriture qu'est la musique avec Nzongo Soul, Soum Carol et Armand Mandziono L'esprit du proverbe malgache « honte à celui qui ne fait pas mieux que son père » a plané sur la soirée dédiée aux soixante ans de la littérature congolaise organisée à la Librairie-Galerie Congo. En quoi peut-on appeler certains écrivains les pères fondateurs ? Y a-t'il un esprit que les aînés ont insufflé aux générations suivantes ? Comment ce feu sacré est-il entretenu pour assurer la relève ? Autant de questions auxquelles les écrivains Obambe Ngakosso, Itoua Ndinga, Virginie Mouanda et le critique littéraire Zacarie Acafou ont tenté de répondre. Soixante ans après la parution de Cœur d'Aryenne, le premier roman de Jean Malonga, en passant par Sylvain Bemba, Tchicaya U Tam’si, Sony Labou Tansi ou Henri Lopes, le Congo peut se targuer d'un patrimoine littéraire exceptionnel, qui en fait une particularité en Afrique. Les « Ba lakisi nzela » de la littérature congolaise sont des écrivains polygraphes, cultivés, qui ne s'accrochent pas à un seul genre littéraire. Ce sont en outre des écrivains nationalistes, passionnés des terroirs du Congo et qui n'hésitent pas à passer au vitriol les systèmes politiques, y compris lorsqu'ils en font eux-mêmes partie, tels les écrivains-ministres Henri Djombo ou Henri Lopes. Le Congo est une République des lettres. Pour le critique littéraire Zacharie Acafou, il y a une forme d'innovation dans la littérature congolaise et le Congo est le pays africain le plus productif sur le plan littéraire. Innovation dont se réclament les écrivains de la nouvelle génération qui, s'ils ne refusent pas de manger dans la marmite de Koka-Mbala de l'écriture laissée par leurs aînés, souhaitent tracer leur propre voie. Virginie Mouanda, originaire du Cabinda, se dit influencée par le théâtre de Sony Labou Tansi, « une écriture qui nous ramène à nos sources et nous donne une identité », ainsi que par le travail d'Henri Lopes. Itoua Ndinga et Obambe Ngakosso ont déploré de n'avoir réellement découvert la littérature congolaise que sur le tard, après avoir quitté le continent, faute de transmission dans le cadre scolaire. Avis commun des auteurs, « en littérature, on doit avoir la liberté », assène Obambe Ngakosso, et Itoua Ndinga de renchérir : « La littérature n'a pas de nationalité, elle est sans pièce d'identité. C'est un bien universel, car les sujets abordés par les auteurs congolais sont aussi abordés par d'autres ». Toutefois Obambe Ngakosso confesse l’influence d'Emmanuel Dongala et une admiration pour son courage, lui qui a dénoncé certains travers de la société tout en vivant au Congo. Jacques Chevrier, éditeur de Jazz et vin de palme de Dongala au temps de la censure, et fin connaisseur de la littérature et des écrivains congolais, a appuyé l'hommage de Obambe Ngakosso en livrant son témoignage sur cette période. Mais le flambeau de l'écriture se transmet entre auteurs, et il existait une formation des écrivains par les écrivains au Congo. Ainsi, le modérateur de la discussion, Martin Lemotieu, rappelait que Tchichelle Tchivela fournissait ses condisciples en romans sud-américains, par exemple, ceux de Gabriel Garcia MArquez, leur faisant ainsi découvrir un autre style d'écriture. En deuxième partie de soirée, les musiciens Nzongo Soul, Armand Mandziono, Soum Carol, co-fondateur de l'orchestre Zimbabwe, orchestre phare des années 1970, sont revenus sur leur parcours musical et l'état de la musique congolaise aujourd’hui. Pour Nzongo Soul, il faut que les musiciens congolais puissent partager leur musique avec le reste du monde tandis que Soum Carol ambitionne de redonner sa noblesse à la femme congolaise à travers sa musique, elle qui est trop souvent avilie par la bestialité des chansons actuelles. Rose-Marie Bouboutou Légendes et crédits photo :Photo 1 : De gauche à droite, Obambe Ngakosso, Itoua Ndinga, Martin Lemotieu, Virginie Mouanda, Zacarie Acafou (© Adiac).
Photo 2 : Nzongo Soul, Soum Carol et Armand Manziono (© Adiac). |