Richi Mbebele : « Je montrerai toujours le côté que les gens ne perçoivent pas »

Vendredi 8 Juillet 2016 - 20:00

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Le réalisateur et producteur de Pointe-Noire est hôte du Festival international du cinéma de Kinshasa (Fickin) où son film Grave Erreur a été projeté l’après-midi du 6 juillet. Le film dans lequel il joue vraisemblablement le rôle du méchant a été un véritable coup de cœur des cinéphiles. Dans cet entretien avec les Dépêches de Brazzaville, il revient sur le sujet de son film et affirme qu’il aime à sortir des sentiers battus en parlant de certains aspects de la nature humaine comme il l’a fait dans ce long métrage récipiendaire du prix de la meilleur fiction au Festival Ya beto de Pointe-Noire en avril dernier.

 

Richi Mbebele au Festival international du cinéma de Kinshasa, FickinLes Dépêches de Brazzaville (LDB) : Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire et réaliser Grave erreur, y a-t-il une histoire là-dessous  ?

Richi Mbebele (RM) : Non. C’est suite à une simple observation. Parmi tous les sujets que j’ai observés dans la société, j’avais envie d’expliquer aux gens cet aspect-là des choses. Très souvent, je rencontre des gens qui se plaignent disant : « Il m’a fait ceci ou cela, je lui avais donné tout mon amour et il m’a trahi. Je ne comprends pas, c’était pourtant quelqu’un de bien ». Moi j’ai envie de leur dire mais il faut savoir que dans cette personne il y a en fait deux tendances. On parle même de la nature animale de l’homme. Et, il faut savoir qu’elle remonte parfois et qu’elle fait des dégâts. Parce que l’on a vu des gens poser un acte et le regretter par la suite. C’est quand même curieux ! Tu poses un acte et après tu dis, je ne sais pas ce qui m’a pris. Quand la conscience te revient, tu te rends compte qu’il y avait comme une autre pulsion, une autre force qui t’a poussée à le faire. Et moi, c’est ce que j’essaie de mettre à la disposition du public pour qu’il ne soit pas tout le temps surpris mais plutôt qu’il comprenne que lorsque quelqu’un se met à dire des choses qu’il ne devrait pas dire, il faut lui laisser le temps de le faire. Après, il reprendra ses esprits, reviendra à lui et va réaliser lui-même qu’il n’a pas été correct. Et donc, à la fin, la personne regrette. Mais quand on la prend au mot et que l’on reste sur ses paroles, c’est alors que des conflits se créent. On a vu des gens qui ne se parlent plus, des couples se séparer, des amitiés se briser seulement parce qu’on ne comprend pas qu’il y a cette ambivalence. J’ai placé le tableau avec la balance dans la chambre pour cela, pour montrer que l’on est fait de ces deux tendances-là.

La pochette du film Grave erreurL.D.B : Il y aurait tellement à savoir sur la nature humaine ?

R. M : Oui, beaucoup. Il y a tellement de choses à savoir et ce que j’ai dit dans le film Grave erreur n’est qu’une infime partie de ce qu’il y a à savoir sur la nature humaine. Parce que l’être humain pour moi, ce n’est pas son physique, c’est sa pensée, ses sentiments, ses actions. Ce qui nous mène à nous demander en face de ses agirs, ça vient d’où ça ? C’est quoi ça ? Il est aussi un fait, eu égard à leurs agissements, certains hommes sont traités d’animaux. Il y a beaucoup à apprendre et à dire sur la nature humaine. Dans Grave erreur, Fred est quelqu’un de très manipulateur, on le voit tout de suite. Mais ce qui compte après, c’est à quoi sert sa manipulation ? Dans le film, par exemple, cela sert à sortir Hervé de l’ignorance. Quand à table, Fred lui dit que l’humain est fait de deux natures, tout de suite, il s’est rebiffé, s’est protégé derrière la foi chrétienne, s’est renfermé en disant que le côté ésotérique de la question moi je ne connais pas mais plutôt le côté exotérique, c’est-à-dire ce que tout le monde sait. Et, cette information sur la nature bipolaire de l’être humain, je ne la connais pas. En vivant cette mésaventure avec Édouard, au final il dit même, c’est vrai, je suis chrétien, mais j’ai une conscience. Donc, s’il a une conscience, c’est qu’il reconnait avoir les deux natures aussi parce que les deux natures passent par la conscience pour s’exprimer.

 

L.D.B : Avez-vous fait de la psychologie, qu’es-ce qui vous pousse à vouloir ainsi parler de la nature humaine ? Est-ce un besoin de révéler des choses enfouies auxquelles l’on ne fait pas toujours attention ?

R. M : Oui, c’est cela. Je n’ai pas fait de psychologie, non. Mais, c’est juste que je suis très observateur. Et, d’ailleurs à l’instant où nous parlons, je vous observe en fait. Je suis très, très observateur. Et, chaque fois que je me place sur un angle donné, j’arrive à percevoir beaucoup de choses sur l’homme, la vie, nos relations, celle de l’homme avec la nature, etc. Je vois beaucoup de choses et c’est ce que je dis ensuite dans mes films. Je montrerai toujours le côté que les gens ne perçoivent pas. Après, autour de ça, je mettrai ce que les gens sont habitués à voir. Mais dans le fond, je dis beaucoup de choses et ceux qui arrivent à pénétrer les profondeurs, hé bien !, c’est tant mieux pour eux.

L.D.B : Il peut arriver que l’on voit certaines choses mais que l’on choisisse de ne pas s’y attarder. Est-il besoin de tout passer au peigne fin dans la vie  ? A-t-on toujours besoin de prêter attention à tout et ne faire l’impasse sur rien ?

R. M : Je pense surtout que l’être humain a besoin de se connaître. C’est quelque chose de grand que nous portons. La bible même dit que nous sommes faits à l’image de Dieu lui-même. Donc, il y a tant de choses à connaître sur l’homme qu’à mon avis si aujourd’hui on tombe dans la dépravation, on fait ce qui n’est pas normal, c’est parce qu’on ne sait pas d’où cela vient. Qu’est-ce qui désire cela en notre être, est-ce nous-mêmes ou d’autres besoins infernaux qui nous sont extérieurs… ? Bref, je considère que l’être humain est un mystère. Et moi, j’aime creuser là-dessous, faire une recherche dans ce sens là. Ma recherche, je ne la fais pas dans un centre quelconque. Je la fais en observant les gens. Quand quelqu’un pose un acte aujourd’hui, demain il en pose un autre, j’essaie de comprendre pourquoi. Hier il était bon, joyeux, aujourd’hui, il arrive l’air renfrogné, pourquoi ? Qu’est-ce qui se passe, d’où vient ce côté alternatif ?Richi Mbebele en plein tournage de Grave erreur

L.D.B : Quel sera le propos de votre prochain film  ?

R. M : Je suis entrain de travailler sur un court métrage. Je crois que je vais parler du Sida. Comme le sujet n’a jamais été traité, Je vais essayer d’apporter mon point de vue sur cette question-là. Je vais parler à la fois des personnes qui sont atteintes et des personnes qui peuvent, sont susceptibles, de contracter le virus. J’essaie de parler de ces deux cas mais comme on ne l’a encore jamais fait. Et, je ferai bien sûr la suite de Grave erreur.

 

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Richi Mbebele au Festival international du cinéma de Kinshasa (Fickin) Photo 2 : La pochette du film Grave erreur Photo 3 : Richi Mbebele en plein tournage de Grave erreur

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