Les Dépêches de Brazzaville : Pourrait-on connaître la raison de la présence de Pauline Mvélé à Kinshasa ?
Pauline Mvélé : Je suis à Kinshasa dans le cadre du Festival Vision documentaire et pour participer à la création du Réseau des documentaristes d’Afrique centrale, le Rédoac. Je suis venue présenter mon film documentaire Sans famille qui traite du problème de la réinsertion des détenus au Gabon. Je me suis intéressée à la situation des anciens prisonniers une fois sortis de prison. Sans famille est en fait le nom donné à la prison centrale de Libreville.
Quelle est la raison d’être du Rédoac ? Quels sont ses objectifs à court, moyen et long termes ?
Nous nous sommes dits qu’il fallait se mettre ensemble pour pouvoir faire de grandes choses. Nous avons donc créé le Rédoac, dont je suis la vice-présidente, pour faire la promotion du documentaire en Afrique centrale. À court terme, nous devons faire reconnaître par voie officielle le réseau qui vient de se créer ici au Congo et en mettre l’administration en place de manière pratique. Le comité exécutif doit travailler sur le plan annuel du réseau, mais je ne peux pas en dire plus pour l’instant. Néanmoins, il y a de bonnes choses qui se préparent pour l’avenir.
Quelle est la réelle attente des réalisateurs d’Afrique centrale vis-à-vis du Rédoac ?
J’ai pour maxime : « Si tu veux aller loin, va seul, mais si tu veux aller très, très loin, va avec les autres ! » Et puis, notre métier, on ne le fait pas seul. Le cinéma est un travail d’équipe. Seul tu ne peux réaliser un film, il faut une équipe avec toi. En même temps quand tu as fini ton film, seul tu ne peux pas tout faire. C’est donc utile de travailler en réseau. De toutes les façons, la nécessité de la création d’un réseau n’est plus à démontrer. Nous le voyons même dans d’autres sphères d’activité, que ce soit dans le secteur agricole ou encore celui des femmes. On voit bien que lorsque les femmes forment des groupements ou se mettent en association, elles parviennent à faire beaucoup de choses. C’est pareil pour le cinéma, si l’on se met ensemble nous pourrons faire de grandes choses.
Pensez-vous qu’avec le Rédoac, le cinéma se portera mieux dans la sous-région ?
Oui, je crois. En considérant les autres sous-régions, on voit qu’en Afrique de l’Est, du Nord et de l’Ouest ils sont vraiment regroupés en réseaux ou en associations et arrivent à faire beaucoup de choses ensemble. Et nous, d’Afrique centrale, nous avons un petit problème d’intégration qui doit être résolu. Il ne faut pas que cela empiète sur la création documentaire. C’est donc pour cela que nous avons décidé de nous mettre ensemble afin de briser toutes nos barrières et aller de l’avant.
Quels seraient les problèmes spécifiques aux cinéastes du Gabon et de la sous-région d’Afrique centrale ?
Je crois que les réalités sont identiques partout. Le cinéma en Afrique a des problèmes de production. À chaque fois que nous faisons un film, nous sommes obligés d’aller demander des fonds en Europe. Au Gabon, il y a des problèmes de production, de distribution, mais ce n’est pas une réalité propre à ce pays. Ce sont des problèmes spécifiques à l’Afrique francophone, je pense. Les anglophones ont une autre manière de fonctionner. Donc si nous nous mettons ensemble, nous n’aurons pas besoin de recourir aux mêmes fonds car finalement à qui donne-t-on et à qui ne donne-t-on pas ? Se mettre en réseau va permettre de minimiser certaines difficultés.
Quelle est la place du film documentaire au Gabon ?
Le film documentaire a une grande place au Gabon. L’État gabonais s’est rendu compte qu’il fallait créer une émulation autour du documentaire et donc il a créé le festival Les Escales documentaires qui en est à sa neuvième édition cette année. La seconde bonne chose, c’est que chaque année l’État lance des appels à projets pour produire des documentaires faits et écrits par des Gabonais. Moi, si je suis à ce jour réalisatrice, c’est grâce à cet appel car avant j’étais journaliste. Mon projet avait été retenu et j’ai pu faire des films grâce à l’État gabonais.