Patrimoine mondial : le Congo vers la Route de l’esclave à partir de 2014Dimanche 5 Janvier 2014 - 19:30 Si le Sénégal a son île de Gorée, le Bénin son port d’Ouidah..., le Congo s’apprête à construire son musée de l’Histoire de l’esclavage au port d’embarquement de Loango, où les hommes valides ont quitté l’Afrique pour un voyage sans retour. Le ministre de la Culture et des Arts, Jean Claude Gakosso, y a effectué en novembre un voyage pour voir le lieu où sera implanté ce musée, dont les travaux débuteront cette année. C’est l’un des projets phares de 2014, qui ne fait pas oublier l’année 2013 ---riche culturellement Le projet la « Route de l’esclave » est un projet international qui date de 1998. C’est l’Unesco, institution internationale des Nations unies pour la culture, la science et l’éducation, qui a voulu raconter l’histoire de l’esclavage, qui a fait tellement de ravages dans beaucoup des pays, notamment africains. Pour cette organisation, la « Route de l’esclave » ou la traite négrière ne doivent plus être vues en termes de lamentations pour les pays qui ont subi l’esclavage. Certes, la traite négrière et la colonisation ont causé du tort à l’Afrique et aux Africains, ce qui explique d’ailleurs le complexe que les Noirs peuvent avoir envers des Blancs, ou les colonisés envers les colonisateurs. Pourquoi la « Route de l’esclave » ? Parce que les pistes suivies par les esclaves doivent être considérées comme des pistes pour la mémoire pour le monde entier. C’est pourquoi, le Congo, qui est pays membre de l’Unesco, et qui a vu ses fils valides déportés vers l’Europe et l’Amérique pour un voyage sans retour, a entrepris de construire un musée de l’Histoire de l’esclavage à Loango, dans le département du Kouilou, dont les travaux débutent cette année. La construction de cet édifice s’inscrit dans le cadre de ce projet de la « Route de l’esclave ». Une fois ce musée construit, l’Unesco pourra le classer au patrimoine mondial ; ce qui lui procurera des avantages, tels que des assistances matérielle, humaine, et financière. Et le site deviendra alors une destination touristique ou patrimoniale protégée. Les sites majeurs à protéger À propos des sites à classer dans le patrimoine mondial de l’Unesco, en 2008, le Congo a envoyé une liste indicative à l’organisation pour protéger les sites majeurs, parmi lesquels figurent le port d’embarquement des esclaves à Loango ; la cité royale de Mbé ; et les trois sites naturels : le parc naturel de Conkouati ; le parc d’Odzala et Nouabalé-Ndoki. Parmi ces trois sites, un a déjà été classé au patrimoine mondial : il s’agit de la tri-nationale Sangha, Nouabalé-Ndoki. Ce classement lui confère dorénavant une protection. Le directeur général du patrimoine et des archives, Samuel Kidiba, nous a rappelé que le Congo avait voté une loi en 2010 qui protège les sites naturels et culturels. Ce qui est une grande avancée pour le pays. En ce qui concerne le Congo, Samuel Kidiba, précise que c’est en 2002 que des propositions ont été faites au ministre de la Culture et des Arts pour que les deux pistes de l’esclave soient reconnues. Premièrement, la piste de la route Brazzaville-Pointe-Noire qui est reliée par la piste navale du fleuve Congo, parce que les esclaves sont venus par le fleuve du nord Congo, de la RDC, du Cameroun, de la RCA et même du Tchad, et ont débarqué derrière la Mairie centrale de Brazzaville, au port Léon. C’est de là qu’ils prenaient la route pour Pointe-Noire, celle suivie par le chemin de fer Congo océan (CFCO). Le CFCO n’est autre que la piste des caravanes au Congo. La deuxième piste est celle du sud-ouest qui part de la Cuvette ouest jusqu’à la Lékoumou pour aboutir à Loango. Au niveau international, il y a celle dite de Mayoumba qui part du Gabon, puisque les esclaves du Gabon sont venus aussi à Loango. En plus de celle de Mayoumba, il y a la piste de l’Angola. C’est pourquoi on parle de Kongo avec grand K, parce que les esclaves venaient tous d’Afrique centrale. Pour le directeur général du patrimoine et des archives, ce projet est en bonne voie. Les contacts ont été pris avec l’Unesco, l’Icom, l’École du patrimoine africain, pour étudier ensemble comment valoriser ce site. Ce projet qui est une volonté du président de la République devrait naître en 2014. En février 2013, le chef de l’État avait invité les séminaristes venus pour le festival Étonnants Voyageurs à visiter le site de Loango. Pour cette année 2014, outre le Musée national de Loango, d’autres projets sont prévus, tels que la cité royale de Mbé, le palais de la culture… L’année 2014 sera également marquée par la commémoration du centenaire de la Première Guerre mondiale de 1914-1918. La localité de Mbirou, située au nord du Congo, dans le département de la Sangha, sera à l’honneur. Un grand projet y sera développé, précisait en décembre 2013 l’ambassadeur d’Allemagne en République du Congo, Thomas Strieder, lors de l’entretien qu’il avait eu avec la directrice générale du mémorial Pierre-Savorgnan-de-Brazza, Bélinda Ayessa. Ce petit village de Mbirou a été le théâtre de combats entre soldats français et allemands. Une stèle à leur mémoire est érigée depuis 1915 sur le lieu même où sont tombés ces soldats. 2013, une année particulièrement riche sur le plan culturel L’année qui vient de s’achever a été très fructueuse au plan culturel avec la tenue de plusieurs activités. La première grande activité culturelle de l’année 2013, a été le festival Étonnants Voyageurs, l’un des plus importants festivals de littérature dans le monde, qui s’est déroulé du 14 au 18 février, sur le thème L’Afrique qui vient. Des sujets sur la littérature ont été débattus lors de ce festival, par plusieurs hommes de lettres d’Afrique. Y a-t-il une littérature nationale ? Les écrivains contre la censure ; La littérature se doit-elle d’être politique ? Affaire de style avant tout, ou de contenu ? L’avenir du roman ; tels ont été les sous-thèmes spécifiques de ce grand rendez-vous littéraire. Des concerts ont été donnés par des groupes congolais : Les Bantous de la capitale ; Extra musica zangul ; Clotaire Kimbolo ; Nzété Oussama sexy chocolat… La sape a été également de la partie. Elle a été notamment traitée de manière académique et universitaire, avec la présence du Pr Lydie Moudileno, enseignante aux États-Unis, qui a consacré des études sur le sujet. L’autre activité qui a marqué l’année 2013 a été l’exposition des photos inédites dénommée : L’épopée Savorgnan : un voyage en images ; ouverte par le président de la République, au mémorial Pierre-Savorgnan-de-Brazza, le 8 mars, en présence de la conservatrice des archives du Capitole de Rome, Elisabetta Mori et de l’ambassadeur de l’Italie au Congo, Nicolo’ Tassoni Estense. Cette exposition qui incarne une partie de l’histoire congolaise a été marquée par une série de photos retraçant les périples de l’explorateur français d’origine italienne. Il s’agit des images de Pierre Savorgnan de Brazza lors de ses différents voyages au Congo, représentant un fond documentaire légué par son frère, Giacomo, découvert dans les archives du Capitole de Rome en Italie. La musique a été aussi au rendez-vous de 2013 avec le Fespam. Cette fête a eu lieu du 13 au 20 juillet sur le thème : Les musiques africaines, vecteur d'authenticité et facteur d'émergence. Bien avant la tenue de cette édition, le ministre de la Culture et des Arts, Jean Claude Gakosso, avait procédé au début du mois d’avril à son lancement national dans la sous-préfecture de Gamboma, dans le département des Plateaux. Puis, le 8 juin, il a procédé au lancement international dans le somptueux cadre du théâtre de Soweto en Afrique du Sud ; cette édition a été dédiée à Nelson Mandela, le père de la nation arc-en-ciel. Une forte délégation sud-africaine avait été programmée lors de l’ouverture officielle de la neuvième édition du Fespam le 13 juillet par le président de la République du Congo, Denis Sassou N’Guesso, en présence de la directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova. Plusieurs activités y ont été organisées au cours de cette neuvième édition, comme le symposium international sur la musique africaine qui a réuni du 15 au 18 juillet, plusieurs spécialistes de la culturel et des arts d'Europe, d'Amérique et du continent africain pour une analyse approfondie du thème central de l’édition ; une exposition des instruments traditionnels de musique, considérée comme un haut lieu de recherche, de sauvegarde et de promotion du patrimoine culturel matériel et immatériel africain. L’élection Miss Fespam a été organisée, le 17 juillet, et c’est la Rwandaise Aurore Kayibanda Umutesi, âgée de 21 ans, qui a été élue ambassadrice du Fespam en 2013. Le théâtre congolais a été aussi à l’honneur en juillet dernier au Festival d’Avignon qui, pour la première fois depuis sa création, a connu la participation d’un dramaturge africain, le Congolais Dieudonné Niangouna, qui depuis des années redore le blason et participe au rayonnement du théâtre africain. Les jeux de la Francophonie en septembre ont une fois de plus permis aux artistes congolais de faire valoir leurs talents dans la photographie, le conte et le hip hop. En arts plastiques, l’année 2013 a été marqué par la participation des peintres de la prestigieuse école de peinture de Poto-Poto au Concours de la peinture contemporaine de Russie, qui préalablement se faisait en circuit fermé. Ces peintres de Poto-Poto, dont l’aura de l’école ne cesse de croître, ont représenté toute l’Afrique à ce concours qui a réuni plus de six cents artistes. Ils y ont gagné trois prix : une grande fierté pour ces peintres qui, quelques mois après cette brillante participation, ont été de nouveau invités, cette fois-ci au Congrès international des restaurateurs de Moscou qui a eu lieu au mois de septembre, puisque l'école de Poto-Poto pratique aussi la restauration des œuvres d’art (toiles et sculpture). L’une des grandes activités culturelles de 2013 a été l’exposition internationale du Kiébé-Kiébé à Salvador de Bahia au Brésil, grâce à l’appui multiforme du cabinet du chef de l’État, de l’intérêt croissant exprimée par le directeur général des Dépêches de Brazzaville, et la participation active de la directrice du musée galerie du Bassin du Congo, également conseillère à la culture et aux arts du chef de l’État, Lydie Pongault, ainsi que de Graçe Teixeira, responsable du Musée afro-brésilien (Mafro) de l’université fédérale de Bahia. Cette exposition ouverte du 9 septembre au 29 novembre a connu une avant-première à Brazzaville. Elle a été un haut lieu de dialogue et d’échanges d’expérience… Enfin, Brazzaville, la capitale du Congo, fait dorénavant partie du Réseau des villes créatives de l’Unesco, sous la thématique de la musique. Elle devient ainsi un modèle régional dans le cadre de la promotion du patrimoine, des industries et du tourisme culturels. C’est à l’issue du sommet de Pékin en Chine, du 20 au 23 octobre, qu’elle a été inscrite officiellement Ville créative par la directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova. Bruno Okokana et le Service culture |