Patrimoine : la basilique Sainte-Anne, un joyau architectural riche d’enseignements

L’idée de construire la basilique Sainte-Anne remonte à 1940. L’initiative des représentants de l’Église catholique avait vite rencontré l’assentiment des politiques de cette époque coloniale. Le gouverneur de l’AEF, Félix Eboué, décida du lieu où cet édifice devrait être érigé ; à la jonction des quartiers européen et indigène, qui marque la frontière entre ce qu’on appelle aujourd’hui le centre-ville et la cité africaine. 

Mais, la réalisation d’un tel projet en pleine guerre mondiale n’était pas chose aisée. Il fallait des financements. Un livre d’or fut donc ouvert pour la collecte des fonds. Les populations indigènes et les cadres coloniaux exerçant à Brazzaville seront mis à contribution. Ils s’y donnent à cœur joie. Le gouverneur Bayardelle, le général Larminat, le médecin général Adolphe Sicé et le général Leclerc, emboîtèrent le pas. Mais toutes ces contributions étaient loin d’être suffisantes.

Même les apports étrangers, par le vicaire apostolique de Dakar, Monseigneur Lefèvre, son Altesse Royale le comte de Paris, le roi Mohammed V et l’empereur d’Ethiopie, cités parmi les hautes personnalités à mettre la main à la pâte, ne suffisaient pas. À l’occasion de l’inauguration du stade Félix Eboué en 1944, le général De Gaulle faisait un don de 800.000 Francs au projet.

Pour sa mise en œuvre, les responsables de l’Église catholique de Brazzaville avaient pensé à un architecte inspiré du style égyptien et qui était basé à Léopoldville (actuelle Kinshasa). Faute de diligence, ils se sont retournés vers un architecte qui venait d’arriver à Brazzaville, avec les troupes françaises : Roger Lelievre dit Errel, de son nom de guerre. Dès que le projet lui fut soumis, il prit une feuille de papier, le crayon et dessina le plan de la basilique auquel était associé un stade et un presbytère.

Il fallait, toutefois, pour ériger le vaisseau de Sainte-Anne, une main d’œuvre qualifiée. Cette expertise sera apportée par des Italiens assignés à Brazzaville du fait de la guerre. L’un d’entre eux, monsieur Gramignan, accepta de participer au projet. Le père Paul Fourmont, bâtisseur de la paroisse de Makoua, s’engagea pour la fabrication des briques à base de la pierre tirée du gré abondant aux bords du Djoué. Ces matériaux seront utilisés pour la construction, l’embellissement des assises, la façade et les arcs boutants. Des tuiles en céramique fabriquées à Aix-en-Provence en France permirent de couvrir le toit.

La décoration du lieu de culte sera confiée aux artistes congolais dont Benoit Konongo. Les portes ont été décorées, ornées d’illustrations bibliques en cuivre battu qui sont l’œuvre de graveurs congolais regroupés par l’entrepreneur Côme Miekitila. Gravés en bois de fer sculpté, les crucifix sont comptés parmi les éléments de décoration, tout comme les statues de Sainte-Anne, de la Sainte-Vierge-Marie, de Saint-Joseph et de la Sainte-Thérèse. La basilique Sainte-Anne dite « église des mains jointes » est une bâtisse dont le toit représente une pirogue renversée.

Inaugurée le 1^er novembre 1949, la basilique Sainte-Anne du Congo a été construite de 1943 à 1951, grâce au génie créateur d’Errel. Le 28 juillet 2013 ce monument, restauré entre temps, célébrait ses 70 ans. Avec son clocher culminant à 85 mètres et ses 22 mètres de hauteur sous voûte, la basilique fascine toujours et mérite de s’ouvrir davantage aux visiteurs. Nous y reviendrons.