Littérature : Le général Benoît Moundélé-Ngolo présente son septième ouvrage, « Fantasmons ensemble un instant dans un Snoprac »Samedi 28 Septembre 2013 - 8:08 Dans le jardin municipal qui jouxte l’hôtel de la préfecture, le général Benoît Moundélé-Ngolo, qui avait célébré le matin même ses soixante-dix ans en la cathédrale du Sacré-Cœur de Brazzaville, a présenté en soirée son septième ouvrage, Fantasmons ensemble un instant dans un Snoprac, publié aux Éditions Hemar, comme pour commémorer ses trente ans d’écriture. Que peut-on retenir de sa production littéraire et que se cache-t-il derrière ce titre ? Les professeurs André-Patient Bokiba, de l’université Marien-Ngouabi, et André T. Lukusa-Menda, de l’université pédagogique nationale de Kinshasa, membre de l’association des critiques littéraires de Kinshasa, ont dans leurs critiques, édifié l’auditoire. S’agissant du titre de cet ouvrage, le professeur André-Patient Bokiba retient le mot « fantasmons » qu’il trouve important. Le fantasme, explique-t-il, est une représentation imaginaire qui traduit un besoin plus ou moins conscient. Ce titre est donc une exhortation. Le général Benoît Moundélé-Ngolo tente dans cet ouvrage de définir sa relation en tant que militaire et revendique en même temps le droit d’avoir un discours politique en raison de sa fonction. En effet, le problème essentiel de l’auteur en dehors des contenus est le problème de la communication. Concernant la communication, relevons l’interpellation constante du lecteur. Dans le texte Les pensées du jour, une série de réflexions morales indique l’orientation de l’ouvrage qui a une dimension morale tout à fait essentielle. Un autre texte, qui appartient à la littérature universelle, est celui qu’il intitule Que ferai-je si je devenais président de République ? C’est un thème tout à fait récurrent parce que la figure du président, de l’homme d’État, du magistrat suprême, est une figure qui fascine tout le monde, car c’est l’homme qui assume dans la cité le rôle primordial de magistrat suprême. Au centre de ce texte qui est un ensemble de propositions, il y a le fantasme au sein duquel Moundélé-Ngolo donne sa conception de président. Le texte Jeux de mots par ailleurs est un texte qui a un caractère tout à fait ludique. De la communication, il y a chez l’auteur le sens de la mise en scène. C’est le cas par exemple des textes : Les réponses du berger à la bergère où il y a une espèce de substitution de personnalité qui est tout à fait importante ; Bon anniversaire papa, joyeux anniversaire pépé (un texte tout à fait emblématique, qui est un aspect important de cette mise en scène) dans ce texte on peut s’interroger si ce sont les enfants ou les petits enfants qui sont l’auteur du texte. Il y a une espèce de dédoublement qui fait qu’il y a un renversement de situation, car ce sont les enfants et les petits enfants qui s’expriment. Le professeur André-Patient Bokiba pense qu’il y a plusieurs dimensions dans cet ouvrage, notamment la dimension morale qui se résume à la quête de la vérité, parce qu’elle consiste pour l’auteur à fustiger un certain nombre de comportements sociétaux : la fausseté ; la duplicité ; l’hypocrisie. Il y a aussi la dimension spirituelle qui est tout à fait essentielle, à savoir la croyance en Dieu. Les trois grandes figures de Benoit Moundélé-Ngolo Pour le professeur André T. Lukusa-Menda, le style de Benoît Moundélé-Ngolo, développe une écriture de la passion, la passion dans le double sens du supplice et de l’énergie qui suppose un engagement vital. En effet, le style d’un écrivain procède d’un choix éthique. Et pour cerner ce choix éthique de Benoît Moundélé-Ngolo, le critique pense qu’il faut d’abord constater que la grande figure de rhétorique développée par l’auteur de l’œuvre est de l’alibi. S’agissant par exemple de l’alibi géographique, le pays dont on parle n’est pas celui-ci que l’on habite, c’est un pays imaginaire qui pourrait s’appeler la République de Lokuta. Quant à l’alibi des personnages, ce héros national Ollomâ gnama que l’on évoque n’est pas le héros auquel on pense. La veuve joyeuse n’est pas une Congolaise bien déterminée. Il n’y a pas deux femmes, aspirant l’une et l’autre à la gloire de Messaline, entretenant des rapports de meilleures amies. Il y a seulement l’écrivain Moundélé-Ngolo et son double, explique-t-il. « Ici, comme dans les romans, on peut dire que toute cette histoire est entièrement fictive, toute ressemblance avec des personnes réelles ne peut être qu’un fait de pur hasard. » La deuxième grande figure qui caractérise le style de Benoît Moundélé-Ngolo, estime le professeur André T. Lukusa-Menda, est l’ironie. Cette méthode fondée par Socrate n’a pas pour objectif que de se moquer, mais aussi d’amener les hommes à sortir de l’ignorance vers la connaissance car, pensait ce grand homme de la connaissance, du bien découlait la bonne conduite. L’acharnement contre La Veuve joyeuse ou contre La Meilleure Amie n’ont pas pour objectif la moquerie, mais plutôt de les amener à changer de comportement. C’est d’ailleurs ce qu’écrit l’auteur : « Il y a des feux qui brûlent pour détruire comme il y en a qui le font pour purifier. » L’ironie est donc un feu qui brûle pour purifier, et ce qui est très intéressant, c’est que l’auteur s’applique cette ironie à lui-même, mettant dans la bouche de ses enfants et de ses petits-enfants le reproche, à lui adressé, de s’être évertué toute sa vie à enrégimenter tout le monde, à se prendre pour un modèle à suivre. De Du Coq-à-l’âne à Fantasmons ensemble un instant… les masques tombent, les fleurets mouchetés s’estompent, Benoît Moundélé-Ngolo écrit sans voile. Et comme il le fait dire lui-même par la bouche de sa progéniture, il enseigne désormais sans mettre de gants. « L’écriture de Moundélé-Ngolo est un combat pour affirmer la pertinence toujours actuelle de ces valeurs. Tout donne à croire que cette écriture est désormais ainsi comprise. Elle devient un engagement social de l’écrivain qui s’exprime de plus en plus sans fard », juge le professeur André T. Lukusa-Menda. Le général Benoît Moundélé-Ngolo, qui n’a pas voulu répondre aux questions, estime attendre la grande rencontre où les gens pourront discuter sur l’ensemble de son œuvre. « Je reconnais avoir vécu 70 ans soit 140 saisons bien comptées dont 70 sèches et 70 pluvieuses au cours desquelles je me suis évertué à gribouiller en français pendant 30 ans, alors que beaucoup n’ont pas réussi à le faire. C’est une chance inespérée que je viens d’avoir grâce à Dieu. En effet, depuis ma naissance je n’ai jamais célébré un seul anniversaire. Pour cet ouvrage, je plaide non coupable et je jure de ne pas répondre à une seule de vos questions, parce qu’ayant été invité à prendre part à la présentation. Maintenant, il ne me reste plus qu’à organiser peut-être plus tard des conférences sur l’ensemble de mes œuvres et ce jour-là je parlerai de manière très volubile. » Rappelons que le général de division Benoît Moundélé-Ngolo, est un ancien ministre, ancien maire de la ville de Brazzaville, actuel préfet du département de Brazzaville, écrivain et libre penseur… Avec sept titres à son actif à ce jour que sont Un peu de tout, À bâtons rompus, Du Coq à l’âne, Libres Pensées, Lettres ouvertes ou Mea Maxima culpa, À lire si vous avez un peu de temps, il trouve sa place dans la République des lettres congolaises. Bruno Okokana Légendes et crédits photo :Photo 1 : L’ouvrage du général Benoît Moundélé-Ngolo. (© DR) ;
Photo 2 : Lors de la présentation de l’ouvrage. (© DR) ;
Photo 3 : Les enfants et petits-enfants commémorant l’anniversaire de Benoît Moundélé-Ngolo. (© DR)
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