Hassim Tall Boukambou : « permettre aux Africains de connaître leur histoire »

Lundi 7 Décembre 2015 - 19:15

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Révolutionnaire(s) est le nouveau film réalisé par Hassim Tall Boukambou. Il y retrace à travers des images d’archives l’histoire de  la revolution congolaise de 1963. Producteur d'émissions télévisées depuis  plus de vingt ans, il réalise des films documentaire et touristique pour l’Afrique et les villes africaines dans le cadre de deux collections : Couleurs urbaines et couleurs. Dans une  interview aux Dépêches de Brazzaville, il revient sur son nouveau film dont la parution est imminente et qui a déjà  été présenté en avant-première en France et à Brazzaville.

Les Dépêches de Brazzaville : Pouvez-vous nous parler du film que vous venez de réaliser, intitulé Révolutionaire(s) ?

Hassim Tall Boukambou : Une fois de plus en 2013 j’ai fait un simple constat que l’on fêtait un anniversaire qui semblait être passé inaperçu, c’est à dire les cinquante ans de la révolution congolaise de 1963. Nous avons pensé qu'à travers ce  film, nous pouvions contribuer à l’édification de la mémoire collective. En 2010 nous avons produit "couleurs Congo" dans le cadre du cinquantenaire du Congo qui présentait la faune, la flore, la diversité du Congo et en 2013 on s’est dit que c’était pour nous une façon d’apporter une grille de lecture assez large de l’histoire du congo en particulier et de l’Afrique en général. On a donc souhaité réaliser "Révolutionnaire" et il a fallu deux ans de travail pour aboutir à ce résultat qu’on a pu voir lors des avant-premières en France et à Brazzaville.

LDB : Après la découverte de ces archives, quelles démarches avez-vous entreprises pour réaliser ce film?

HTB : Ces archives ont été conservées par mon père qui les avait enterrées pendant les guerres que le Congo a connues et ensuite déterrées. Il fallait donc les restaurer pendant au moins cinq ans à six mois ensuite aller collecter toutes les images d'archives de notre histoire. Malheureusement au Congo nos archives sont souvent à l'abandon, il faut une sacrée fortune pour restaurer ces images. Chemin faisant on s'est tourné vers des pays qui ont des représentations diplomatiques au Congo et qui ont pu nous retrouver des archives audiovisuelles congolaises en Chine, en Rusie et aux Etats- Unis. Cette collecte d'images nous a permis de pouvoir reconstruire ce puzzle on ne se fiant pas à une seule source mais à plusieurs sources pour avoir à la fin l'histoire la plus crédible des différents acteurs de l'époque.

LDB : Quelles étaient vos attentes en faisant ce film.

HTB : J’appartiens à une génération ou nous avons salué le drapeau et c’était les trois glorieuses, l’hymne que nous chantions. En 1991 lors de la conférence nationale j’avais dix-neuf ans et tout le monde disait que la démocratie était un nouveau souffle et nous avons dans ma génération été abreuvé de l’amour du Congo. Ce que j’ai pu constater c’est qu’à la chute du mur de Berlin et lors de la Conférence nationale on a vu des langues se délier et on s’est dit que nous vivions des moments historiques dans notre pays. Et Comme beaucoup de Congolais, à vingt-cinq ans  je me  suis posé  beaucoup de questions, à savoir d’où venait cette violence politique, chez les Congolais. Pendant plusieurs années ces questions m’ont permis de comprendre les pays africains d’où cette démarche avec les collections que nous avons lancées pour découvrir l’Afrique. C’est une façon  de permettre aux gens de se découvrir et de se comprendre ainsi que l’espace géographique auquel ils appartenaient. Nous avons voulu rajouter une dimension historique à notre collection pour pouvoir comprendre l’histoire de manière la plus large possible sans complexe et  de manière dépassionnée.

LDB : En suivant le film on trouve la quasi-totalité  des acteurs de cette révolution sauf que vous  laissez le public dans le suspense.

HTB : Nous avons  raconté l’histoire du Congo entre 1945 et 1991 avec un moment fort qui est la révolution congolaise car pour certains, c’était la seconde indépendance du Congo. De  cette révolution est issue le parti congolais du travail qui est le parti au pouvoir. C’est une manière de découvrir notre histoire à travers différents acteurs générations après générations. On passe du président Fulbert Youlou au président actuel tout en essayant de comprendre les mécanismes qui aboutissent à la concrétisation d’une révolution. Cette révolution congolaise n’est pas une histoire propre au Congo mais c’est à la fois un reflet de l’histoire africaine particulièrement  et aussi le reflet de tout ce qui se passe lors des révolutions. il y a plusieurs étapes dans une revolution. En parlant de la révolution congolaise on peut la comparer aux révolutions américaine, russe, cubaine etc…

ll y a toujours des acteurs qui initient une révolution et souvent, elle leur échappe à un moment donné. et ensuite  la révolution qui dévore ses enfants et au Congo c’était le cas du président Marien Ngouabi comme Ange Diawara etc.. et la troisième phase est le généralisation de la violence politique qui peuvent se traduire par des éliminations physiques l’enrichissement illicite. Si il y a une chose qu’on peut retenir de toutes ces révolutions c’est qu’il y a des acquis et des échecs et l’un des acquis au Congo c’est l’accès du plus grand nombre à l’éducation gratuite d’où le taux élevé de l’alphabétisation.  De 1963-1968 c’est au moment où les bases de l’industrialisation du Congo ont été posées. L’histoire continue son cours et pour comprendre ce qui se passe, il faut se remémorer du passé.

LDB : avez-vous un autre projet de film dans le même genre ?

HTB  : nous avons toujours la volonté de produire des films aussi bien de ce genre. "Révolutionnaire" n’est qu’un premier épisode car nous sommes entrain de nous intéresser à la période de 1870 à 1945.  Ensuite il y aura d’autres volets pourquoi ne pas parler de l’histoire des révolutionnaires qui sont des officiers progressistes comme Marien Ngouabi, Thomas Sankara et Mathieu Kerekou car ces personnes ont marqué l’histoire contemporaine de l’Afrique. Nous avons l’intention de continuer à produire des films documentaires historiques pour permettre aux africains de connaitre cette histoire qui n’est pas encore enseignée dans nos écoles. Les curieux la découvrent au hasard dans les lectures. L’histoire doit s’apprendre très tôt pour se projeter après comme citoyens.

Hermione Désirée Ngoma

Légendes et crédits photo : 

1- Hassim Tall Boukambou

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