Doctrovée Bansimba: « À travers mes productions, je chante la poésie du monde, celle d’Afrique et d’ailleurs »Dimanche 3 Septembre 2017 - 9:54 Née au Congo Brazzaville, Doctrovée Bansimba est une artiste plasticienne. Prolixe et polyvalente, elle est l’une des grandes figures contemporaines de la peinture et de la sculpture congolaise qui fait la fierté de son pays dans l’hexagone où elle réside actuellement. Par cette interview, elle nous révèle son parcours, les souvenirs et les rêves de sa vie d’artiste.
Les Dépêches de Brazzaville : Doctrovée Bansimba, parlez-nous de votre parcours artistique. Doctrovée Bansimba : Tout a commencé dès la tendre enfance au Congo à Brazzaville par les gribouillis de l’école maternelle, ensuite par des dessins au sol sous forme de contes, entourés des amis d’enfance, par le modelage d’argile au bord du Djoué, aussi des petits objets récupérés ici et là : les chutes de tissus et les poupées qui parfois se terminaient d’être brûlés par ma mère. L’envie d’en faire un peu plus se transformait en une joie de me rendre plus utile, je faisais des morceaux choisis d’entrée en classe de sixième pour les autres déjà au CM1. Au collège, je rêvassais de faire les beaux-arts après le B.E.P.C, un rêve opposé par l’autorité parentale et je m'étais retrouvée au lycée technique 1er Mai. Déjà au collège et au lycée, je peignais les murs des maisons et je dessinais sur les murs des boutiques les bouteilles de jus, des morceaux de viande, des tranches de saucisson, une sorte de Street art commercial. Après l’obtention du baccalauréat en 2006, je fais à la fois l'École nationale des beaux-arts et l'Académie des beaux-arts de Brazzaville de 2007 à 2011 entre autres la sculpture et la peinture à chevalet, ajoutant des expériences en ateliers auprès d'anciens de la scène artistique congolaise comme Rémy Mongo le sculpteur et un certain maître Ship. À partir de 2012, j’ai enchaîné résidences de création, rencontres internationales, ateliers et récompenses. La même année, je reçois le premier prix de peinture à l'issue des premières Rencontres internationales d'art contemporain des ateliers où j’ai présenté en 2013 une exposition sous le titre de «soustraction » parlant des personnes en condition de handicap réduites de la société, face aux différentes barrières, aussi du regard de l’autre. J’ai été récipiendaire de Sanza en 2016. J’ai fait un portrait de Serge Gainsbourg qui a fait la une du magazine français de Street Art, à l'occasion de la célébration du vingtième anniversaire de la mort de l'artiste sur le mur de sa maison. J’ai eu à animer plusieurs des ateliers d’arts plastiques pour enfants de tout âge sans aucune distinction de rang social dans les rues, les écoles, les maisons. LDB : Quels sont vos plus beaux souvenirs ? DB : Chaque fois que j’ai devant moi un support vide, une pensée en accord avec mon état d’âme fusionnant avec mes instruments de prédilection; rendre palpable une œuvre d'art qui au départ n’était qu’une simple pensée, sourire la naissance de cette œuvre qui vit, sourit et fait cogiter les autres, ce sont mes plus beaux souvenirs mes moments les plus forts de mon parcours artistique LDB : Que visez-vous à travers votre production artistique ? DB : À travers mes productions, je parle et fais véhiculer les messages, je chante la poésie du monde : celle d’Afrique et d’ailleurs, je déclame la succession des verres : verres de douleur, douleur de soi douleur de l’autre; les verres de rites, d’étreinte, de joie de vivre, de barrière, du regard de l’autre, de toute sorte de guerre, de celle qui ne se vit pas qu'à travers les crépitements des armes, je déclame les vers de la nature, nature de l’homme, qu’elles soient aussi une sorte de thérapie pour les uns et les autres. LDB : Des souhaits pour l'avenir ? DB : Mon souhait a toujours été que ma patrie retrace et fasse de l’histoire de son art un programme pédagogique, qu’elle juge l’art et l’artiste de son pays à sa juste valeur, qu’elle leur donne une grande visibilité, favorise les échanges culturels, donne l’opportunité aux artistes d’aller faire découvrir leur art et de découvrir celui des autres, qu’elle crée des activités culturelles sérieuses, des espaces favorables d’expression pour artistes, des musées, et tout ça pour de vrai, qu’elle préserve précieusement son patrimoine culturel; et surtout d’arrêter de transformer les salles de cinéma et autres en une sorte de supermarché ou d’église pour un perpétuel épanouissement et développement.
Propos recueillis par Aubin Banzouzi Légendes et crédits photo :Photo 1: L'artiste congolaise Doctrovée Bansimba dans son atelier
Photo 2 et 3: Les oeuvres de l'artiste Notification:Non |