Les Dépêches de Brazzaville : De quelle manière vous êtes-vous lancé dans le métier d’arrangeur de son ? Avez-vous suivi une formation spécifique ?
Les arrangements de musique sont nés de l’amour que j’avais déjà très jeune de cet art. J’ai commencé à l’âge de 12 ans, plus au moins, avec des petits bricolages. À l’aide d’une radiocassette je faisais des enregistrements hasardeux. Puis, j’ai découvert la MAO, des techniques de mixage audio pour des créations assistées sur ordinateur. Et avec des logiciels que m’ont donnés des amis, j’ai approfondi mes connaissances. L’encouragement ensuite est venu des amis, émerveillés par les résultats. Puis les sollicitations se sont accumulées année après année. J’ai alors cherché à mieux m’équiper. C’est un univers que j’aime bien, qui permet d’exprimer ce que l’on ressent. C’est un travail que je fais avec cœur. Et quand on est inspiré par quelque chose, on arrive à l’exprimer en rendant des résultats qui en étonnent plus d’un, surpris surtout par le fait que je n’ai pas de formation particulière. Je me suis formé en me documentant. Mais il y a eu aussi l’encouragement des plus grands noms, des aînés comme Freddy Kebano, Tchopal State dont les conseils m’ont été précieux. Et il m’arrive encore d’aller vers eux dans les difficultés de parcours que je rencontre.
Quels sont les instruments, même traditionnels, que vous utilisez pour répondre à des besoins typiquement de chez nous, disons « africains » ?
Je vais commencer par parler de l’indispensable « maraca » utilisé presque à chaque fois pour toutes les sonorités provenant des profondeurs de notre pays. Sans oublier nos tambours africains. Toutefois, les logiciels dont nous disposons servent à combler des besoins en rythmes très saccadés pour ne pas avoir à apporter en studio toutes sortes d’instruments encombrants. Mais je tiens à préciser que nous avons surtout le devoir de satisfaire nos clients. Nous leur offrons la possibilité de présenter leurs œuvres de tous genres : rumba, religieux, rap ou encore le coupé-décalé très demandé en ce moment. Dans de rares cas, nous enregistrons aussi des groupes en acoustique, avec leurs propres instruments traditionnels…
Quelles sont les difficultés particulières dans ce secteur ? L’amour pour le métier suffit-il à les combler ?
Vous venez de visiter les lieux : ce n’est pas un studio qui démontre que j’ai eu au départ des moyens importants pour débuter dans le secteur. Ce n’est pas semblable avec ce qui se fait en Europe en termes d’investissement, de financement des matériels. On fait avec les moyens du bord. Nous sommes dans un pays où la musique n’est pas assez prise en compte, bien que les gens qui aiment écouter de bons morceaux soient nombreux. Une des preuves de ce que j’affirme vient du côté des instruments : nous sommes contraints, lors de grands festivals, de les emprunter à l’étranger. Nos difficultés résident dans le fait que nous nous débrouillons avec les instruments que nous trouvons sur place à Brazzaville. S’il y a en vente des instruments dernier cri, nous cherchons à nous les procurer sans trop espérer les commander en Europe, ce qui représenterait un coût non négligeable.
Vous avez la côte auprès des artistes, tous veulent s’attacher vos services. Comment l’expliquez-vous ?
Je ne peux pas l’expliquer avec exactitude, c’est peut-être le fruit d’années de travail, peut-être aussi la conséquence de ce que je vis. Je suis moi-même musicien, je chante, je connais et j’aime la musique que je présente. Je peux être un complément avec ceux qui viennent vers moi, sans déformer leur création.