Concours de sape : Hassan Salvador lauréat de la première édition « La Citoyenneté dans la sapologie »

Lundi 28 Juillet 2014 - 15:45

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Organisée par le Cercle des amis de Mauricette Channelle-Dynamique force (CAMC-DF), la soirée élective a eu lieu le samedi 26 juillet au bar restaurant La Main bleue chez Guy Mankoundia, en présence de Maxime Foutou, directeur du Bureau congolais du droit d’auteur, représentant le ministre de la Culture et des Arts

Cette compétition qui a mis aux prises neuf sapeurs, a pour but de lutter contre les idées reçues selon lesquelles, les sapeurs seraient des gens vulgaires, sans scrupules et qui n’ont rien à apporter dans la société.

Mauricette Chanelle, présidente de l’association CAMC-DF, a justifié l’organisation de cette compétition par le fait qu’à la base, son association défend les valeurs non seulement politiques mais plus à caractère socio-culturel. C’est pourquoi, ils ont voulu faire valoir la culture congolaise en organisant ce concours. « Notre père de la nation nous l’a démontré par sa façon de s’habiller, que la sapologie fait partie de notre culture, et aussi, rééduquer les sapeurs, leur permet de comprendre que la sapologie n’est pas la vulgarité. On peut être sapologue tout en respectant les valeurs humaines et tout en mettant en avant le respect de l’autre, tout en égayant ceux qui s’y intéressent. »

Il a fallu trois passages pour départager les neufs sapeurs que sont : le doyen Venus Mougany, 76 ans, 1,50m, 45kg, hôtelier de profession, très leste et faisant la taille de son poids ; le designer congolais Eric Kanga, qui a fait son entrée sur scène avec son drapeau arborant les couleurs nationales, question d’exprimer son caractère vestimentaire national ; Jean Remy Malonga dit ya Lélé, 49 ans, 1,80m, 79kg, très modeste regardant sa montre en décontracté sans ceinture ; Yves François Gatsongo, 48 ans, 1,72m pour 67kg, sortie en tenue coloniale ; Pélagie Ngoro-Kiba, 43 ans, 1,74m pour 75kg ; Idriss Bandzoulou, 43 ans, 1,76m, 65kg ; Hassan Salvador, 34 ans, 1,82m, 87kg ; Emann Diafouka ; et Hérold Bantsimba, 25 ans, 1,86m, 75kg.

Ces trois passages exigeaient des tenues décontractées, puis dépareillées (demi-quart), et en complet veste. Il était aussi question de se présenter et d'occuper la scène par le mariage des couleurs et par les modes les plus récentes. Ce n’est que de la sorte que les membres du jury, présidé par Maxime Foutou, secondé de Caroline Massaka et de Blanchard Nzeza, avec deux françaises venues de Paris, pouvaient mentionner les points au passage de chaque candidat, sous le contrôle de l’huissier de justice, maitre Hervé Tela N’Simba.

La sape étant le statut artistique des personnes élégantes, le réglage des couleurs a valu son pesant d’or. C’est ainsi que les sapeurs, tous habillés en sur mesure durant les trois passages, ont dandiné chacun soit avec un cigare à la main, soit avec un parapluie fantaisiste. Toutes les griffes ont fait leur apparition durant ce concours. Surtout que chez les sapeurs tout est griffé. Ils étaient en spencers ou en tenues coloniales pour Yves François Gatsongo dit Yves Saint Laurent ; en redingotes pour Pélagie Kiba-Ngoro ;  en prince de Galles ou pieds de poule, avec des chaussures John Foster pour Eric Kanga ; et des chaussures peau de caïman pour Hassan Salvador. Pendant ce temps, le doyen Venus Mougany, définissait la sape tel qu’il l’entend. « La sape est l’art de s’habiller et de paraître. Je suis habillé en made in Congo ». Si Venus Mougany et Hérold Bantsimba préfèrent le made in Congo, Jean Remy Malonga dit ya Lélé, a opté pour Pierre Cardin jusqu’au dernier jour de sa vie.

L’initiative et l’endroit ont été appréciés par la plupart des spectateurs. C’est le cas de Candy de Bel Air. « C’est une très bonne initiative. Quant au bar La Main bleue, il a été pour moi jusque-là comme un rêve. Aujourd’hui, je viens de réaliser ce rêve, grâce à cet événement. »

De caractère honnête, Mauricette Chanelle a préféré respecter ses propos. Car, en fait, dès le départ le prix à gagner était celui d’un million. Mais, avec un coeur de mère, elle a pensé encourager d’autres candidats qui ont marqué de par leur savoir-faire. C’est par exemple le cas du designer congolais Eric Kanga pour son originalité ; de Pélagie Kiba-Ngoro, unique femme à prester ; de Venus Mougany, un doyen de 76 ans qui a valorisé la couture locale ainsi qu’Hérold Bantsimba, qui lui aussi a valorisé les coupes d’Eric Kanga durant ses trois passages. 

Verdict du jury et réaction des heureux récipiendaires

Après les trois passages, ainsi qu’un passable supplémentaire entre les deux candidats jugés favorables, à savoir, Hassan Salvador et Eric Kanga ; le jury présidé par Maxime Foutou, représentant également le ministre de la Culture et des Arts, a rendu public son verdict.

Le premier prix assorti d’une cagnotte d’un million de FCFA a été remporté par Hassan Salvador ; le deuxième prix assorti d’une somme de 150.000 FCFA par Eric Kanga ; le troisième prix plus une cagnotte de 100.000 FCFA par Pélagie Kiba-Ngoro. Les quatrièmes prix ex-aequo ont été attribués respectivement à Venus Mougany et Hérold Bantsimba, chacun d’eux recevant une somme de 25.000 FCFA.    

Hassan Salvador, premier prix a exprimé sa satisfaction suite à son sacre : « Je suis très satisfait de ce prix que je viens de gagner. L’ambiance a été bonne. Nous sommes des sapeurs, mais ce n’est pas notre métier. On peut être ministre, officier militaire, ingénieur, docteur, pasteur ou encore ouvrier, mais on est sapeur. Ce n’est pas incompatible avec la vie sociale. Le grand souci c’est qu’on nous traite de malsains, de voyous, alors que l’on ne l’est pas. Effectivement, il y a quelques décennies, la sape était l’affaire des délinquants ; présentement les données ont changé. »

Il a aussi apprécié l’initiative de Mauricette Chanelle d’organiser cet événement. Car, la sape dit-il, est un mouvement apolitique. Quant à son appartenance et celui de la sape, Hassan Salvador, a précisé : « Je suis sapeur du Congo, mais le hasard fait que je réside à Poto-Poto dans le troisième arrondissement de Brazzaville. En outre, lorsqu’un tailleur confectionne les habits, ce n’est pas pour un seul quartier de Brazzaville, mais pour tous les sapeurs du Congo. »   

Eric Kanga, deuxième prix, a tenu lui aussi à remercier Mauricette Chanelle pour cette initiative très louable visant à rassembler la jeunesse congolaise : « Je pense que c’est une prise de conscience pour notre jeunesse, qui doit comprendre qu’il s’agit là, de défendre les couleurs de la nation. Aujourd’hui, la sape est devenue un grand patrimoine culturel. Le 15 août prochain, nous serons à Sibiti dans le département de la Lékoumou. Le président de la République nous réserve un carré spécial, autant dire qu’il y a de la considération. De l’autre côté du revers de la médaille, je pense que l’on doit porter des masques. C’est vrai, mais ce qui a fait ma distinction, c’est que je suis styliste-modéliste-créateur. Je m'en suis donc remis à la sagesse des membres du jury qui ont décidé. Je suis très fier et m’incline devant leur décision. »

 

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : La présidente de l'association CAMC-DF pose avec les membres du jury Photo 2 : Les candidats attendent le verdict Photo 3 : Hassan Salvador lauréat de la première édition