Comédie : Mira Mikanza incarnait cinq personnages et en avait créé une centaine

Samedi 17 Mai 2014 - 1:15

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Plus connu dans la peau de Koko Souing, l’artiste, décédé à l’aube du 11 mai, s’était aussi présenté notamment comme Jack Boul, Seskoul, the King of pop corn, Mukalenga Jacksona et Pao Antoine 1er , « le roi de tous les Nkovia » sur le petit écran

 L’affiche donnant un aperçu de la tournée de Mira MikanzaLors d’un entretien accordé aux Dépêches de Brazzaville le 29 juin 2013, l’illustre disparu s’était présenté de la sorte : « Mira est un comédien qui s’amuse à incarner des personnages de fiction en faisant de la parodie. » Si le très apprécié Koko Souing est resté gravé dans l’esprit de l’ensemble des Kinois, un esprit aussi imaginatif que le sien ne pouvait se contenter de cet unique rôle. Artiste-né, fruit de l’union de deux comédiens, en l’occurrence du regretté dramaturge Mikanza Mobyem et de Jacquie Ndjoku, il avait développé quatre autres personnages en parallèle. Mais il va sans dire que son imagination fertile s’est trouvée affermie par les « passages à l’Académie des Beaux-Arts et l’Institut national des arts ». En effet, c’est en ces termes qu’il a qualifié sa fréquentation des deux grandes institutions d’arts où il ne mènera pas ses études jusqu’à la fin.

Dans la peau de Seskoul, Mira avait choisi d’imiter feu le président Mobutu. Un peu comme pour Koko Souing, la caricature de l’ancien patron de la Monuc, William Lacy Swing, il n’était pas allé bien loin. D’ailleurs, il s’était carrément contenté de reprendre le surnom populaire de l’ancien président du Zaïre, notre actuelle RDC. Là encore, une fois dans son jeu d’imitation, il ne se limitait pas à l’expression de Seskoul, quitte à rendre son ton autoritaire et la gestuelle qui l’accompagnait. En effet, il était allé jusqu’à imiter son port vestimentaire. La toque en peau de léopard, l’abacost et l’inséparable canne de l’« aigle de Kawélé ». Mira était à l’aise dans l’un et l’autre des registres différents des deux grands personnages politiques.

Il n’y avait pas que les politiques qui faisaient l’affaire de Mira. Quoique pour ses parodies il avait pris soin de choisir des personnages populaires de grande notoriété, il prenait également plaisir à parodier les stars de la musique. Et comme par le pur des hasards, là encore, il avait choisi un Américain et un compatriote. Il y avait d’une part Mukalenga Jacksona. À entendre ce nom, il n’était pas difficile de deviner qu’il allait s’amuser à camper le rôle de Michaël Jackson. Pareil pour le cas du fameux Pao Antoine 1er. Ici, de Mopao, l’un des plus populaires surnoms du musicien Antoine Agbepa, alias Koffi Olomidé, il s’était contenté de garder la dernière syllabe. La subtilité n’échappait à personne. Dans la peu des deux chanteurs, il faisait encore mouche.

La télévision source d’inspiration Feu Mira Mikanza dans la peau de Seskoul

Toujours paré pour la comédie, un peu comme un malin qui a plus d’un tour dans son sac, Mira ne se lassait pas de créer. Lors de l’entretien qu’il nous avait accordé, d’un air fort malicieux il nous confiait avec un sourire en coin : « Dans mon tiroir, j’avais beaucoup de personnages et aujourd’hui j’en ai à peu près une centaine ». Et de nous expliquer d’où lui était venue l’idée de se mettre à la parodie  : «  Je suis né à l’époque Mobutu, dans les années 1970. Nous n’avions à l’époque qu’une seule chaîne de télévision. Très tôt, j’ai commencé à imiter inconsciemment les choses que j’aimais ou qui me plaisaient. » Mira avait des petites anecdotes rattachées à certains personnages. Il nous a affirmé tour à tour : « Il ne se passait pas un jour sans que l’on ne voie le président à la télévision » et donc, il avait pris goût à l’imiter. Dans le cas du King of pop, qu’il a rebaptisé King of pop corn, c’était un peu la fascination qu’exerçait l’interprète de Thriller sur le préadolescent qu’il était alors. De nous raconter alors  : « La première fois que j’ai vu Michaël, j’avais 12 ans, et la suite c’est qu’aujourd’hui, je chante et je danse comme lui ». Et de poursuivre : « Cela s’est produit de la même façon pour Koffi. Je devais avoir entre 12 et 14 ans, je ne me suis pas arrêté à faire seulement la voix, je suis allé plus loin… »

Lors de cet entretien d’il y a quelques mois, Mira nous avait confié qu’il était en passe de regagner le devant de la scène. Il avait parlé d’un « come back qui commence timidement ». Et pour preuve, les jours suivants, en juillet, il avait participé au Skiff, le célèbre festival de Goma dédié au cinéma dans le cadre d’un programme porté par l’Association culturelle troupe des Atlantes (Acta) dont il était coordonnateur. Du reste, dans son agenda il avait planifié une campagne culturelle de sensibilisation circonscrite dans une tournée provinciale articulée autour de sept activités sur le thème amour, paix, unité dans le contexte de la RDC, pays en postconflit. Il disait ressentir le besoin d’« apprendre aux Congolais à aimer leur pays et à s’aimer eux-mêmes ». Un noble exercice que la grande faucheuse l’aura empêché d’accomplir.

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : L’affiche de la tournée de Mira Mikanza. (© DR) ; Photo 2 : Feu Mira Mikanza dans la peau de Seskoul. (© DR)