Cinéma : « Je ne suis pas une sorcière », le film de Rungano Nyoni

Samedi 23 Décembre 2017 - 11:26

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Le film sorti cette semaine en France raconte l’histoire de la petite Shula, 9 ans, accusée par une villageoise de lui avoir jeté un sort. Elle est envoyée dans un camp de "sorcières" géré par l'Etat et une monarque locale. L’enfant a alors le choix de rester ou de s'en aller, au risque de se voir transformée en chèvre...

A travers ce conte moderne, déjà présenté en mai dernier à la Quinzaine des réalisateurs au festival de Cannes, la cinéaste zambienne Rungano Nyoni voulait parler de « la difficulté à briser les règles, aussi absurdes et ridicules soient-elles ».

Ce désir a amené la cinéaste, née en Zambie, élevée au Pays de Galles et qui vit aujourd'hui au Portugal, à s'intéresser aux camps de "sorcières" qui existent en Zambie ou au Ghana. Elle a été la première Zambienne de l'extérieur à y passer plusieurs semaines. 

La majorité des quatre-vingts femmes qui y vivent sont âgées, « souvent des veuves » dont la famille voulait se débarrasser, mais il y avait aussi « des femmes fortes, dont certaines avaient un commerce qui marchait très bien », suscitant des jalousies, explique-t-elle.

Ces femmes ont été accusées de sorcellerie sous divers prétextes. L'histoire la plus absurde qu'ait entendue Rungano Nyoni est celle d'une femme ayant fait une chute en allant chercher de l'eau, et qui a accusé une autre de lui avoir jeté un sort. Cette scène a inspiré l'ouverture du fim.

« Je ne connaissais pas assez bien le sujet pour en parler de manière réaliste, d'une façon qui me satisfasse pleinement », dit Rungano Nyoni à l’AFP pour justifier son choix d'un conte. 

Ce parti pris lui a offert une grande liberté dans la narration, pas toujours linéaire, et l'esthétique de son film, tourné comme une série de tableaux soignés.

Nul ne saura jamais d'où vient Shula et quelles pensées elle abrite derrière son petit visage buté. La réalisatrice a aussi pu symboliser la subordination de ces femmes, condamnées à travailler dur aux champs, par un long ruban rattaché à une bobine, qui limite leurs déplacements, et exhibées de temps en temps devant des touristes. L'état d'esprit de la petite fille, joué par Maggie Mulubwa, est exprimé à travers la végétation, d'abord verdoyante, puis de plus en plus sèche.

Le responsable du camp comprend vite tous les avantages qu'il peut tirer de cette petite sorcière, utilisée lors de simulacres de procès ou traînée sur un plateau de télévision pour vendre des produits.

Awa LK

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