Mise au point de l’ambassade de Turquie

Samedi 10 Février 2018 - 18:13

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J’ai constaté avec plaisir la présence dans votre édition du 9 février d’un article consacré à la visite au Vatican du président de la République de Turquie, SEM Recep Tayyip Erdoğan. Il s’agit sans conteste d’une actualité politique importante et je partage l’analyse de votre rédaction qui souligne les convergences dans les approches des deux Etats, notamment sur Jérusalem, la Palestine et les réfugiés.

Comme tout bon article de presse, celui-ci émet aussi des critiques ; en l’occurrence sur les mesures prises en Turquie après la sanglante tentative de coup d’Etat du 15 juillet 2016. En effet, pour assurer le salut de la nation, l’Assemblée nationale a voté un régime d’état d’urgence prévu par la Constitution et conforme à la Convention européenne des Droits de l’Homme. Certains droits sont malheureusement temporairement restreints. Les mesures prises, aussi spectaculaires qu’elles soient, sont néanmoins nécessaires, mais il est tout aussi nécessaire d’en discuter pour maintenir la longue tradition démocratique de notre pays. Je ne suis donc pas contrarié de voir Les Dépêches faire allusion à ce débat.

Je dois cependant évoquer un point de l’analyse que je considère comme erroné : la communauté chrétienne aurait « fait les frais » d’un regain de religiosité islamique en Turquie. S’il est question d’un tel regain, plutôt que d’une manifestation publique plus libre de la foi déjà existante au sein de la population, sujet de débat inabouti dans tous les pays laïcs comme les nôtres, notamment en Europe, cela n’a en tout cas pas nui aux communautés religieuses minoritaires. 

Les citoyens faisant partie de ces minorités bénéficient, depuis les textes fondateurs de notre république, d’un statut spécial leur permettant de gérer leurs propres écoles, leurs lieux de culte, leurs fondations, leurs associations, leurs hôpitaux et leurs médias, tout en ayant les mêmes droits que le reste de la population.

Le code pénal turc, renouvelé sous la majorité présidentielle actuellement au pouvoir, interdit toute incitation à la haine religieuse. La propagation des convictions religieuses est libre ; empêcher des personnes de diffuser ou d'exprimer leurs croyances religieuses par le recours à la force ou la menace constitue une infraction.

De plus, certaines doléances importantes des minorités ont été résolues, toujours sous le gouvernement actuel. Elles concernaient notamment un problème d’inscription au registre foncier de biens acquis par des fondations religieuses qui découlait d’une jurisprudence erronée du passé.  Une nouvelle législation a permis de réaliser l’inscription de 333 tels biens appartenant aux différentes fondations chrétiennes et juives et de les compenser pour 21 autres biens indûment retirés à leurs propriétaires mais qu’il était devenu impossible de restituer.

Entre-temps, des églises sont restaurées par l’Etat. Certaines sont rouvertes au culte après des années d’interruption. Le mois dernier, le président de la République a participé à la cérémonie de réouverture après rénovation de l’église bulgare Sveti Stefan d’Istanbul, vieille de 120 ans, en compagnie du Premier ministre bulgare.

Un paquet de réformes démocratiques adopté en 2014 a, par ailleurs, permis d’étendre l’éventail des libertés religieuses. Les citoyens turcs chrétiens bénéficient donc d’une meilleure liberté de conviction et poursuivent paisiblement leur vie dans ce pays où ils ont toujours été chez eux. En témoignent les innombrables sites chrétiens de Turquie que j’invite les congolais à découvrir, comme l’Eglise Saint-Pierre de Hatay, l’endroit où le mot « chrétien » aurait été prononcé pour la première fois, ainsi que la maison de la Vierge Marie à Selçuk et l’Eglise Saint-Nicolas à Antalya.

 

Can Incesu, ambassadeur de Turquie au Congo

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