Démission de Robert Mugabe : la non-violence l'a emporté

Mardi 21 Novembre 2017 - 19:15

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De guerre lasse, pourrait-on dire à propos de ce qui s’est passé, le 21 novembre, au Zimbabwe. La démission du chef de l'Etat met fin, de la façon la plus élégante, à une crise qui pouvait dégénérer.

Le père de l’indépendance zimbabwéenne, Robert Gabriel Mugabe, 93 ans, dont trente-sept sur le métier, vient de quitter le pouvoir, après quelques jours de confusion, durant lesquels, et le chef de l’Etat, et les militaires engagés à le faire partir, ont mis en avant leur volonté de sortir de la crise sans violence. Autant dire que dans ce pays qui a gagné son indépendance en 1980 au prix de lourds sacrifices contre le colonisateur, le sens du devoir et de l’unité nationale, le sens de la pondération a gardé un certain charme.

Au long de ces jours d’incertitude où les deux principales villes du pays, Harare, capitale politique, et Bulawayo, capitale économique, ont vu de nombreux manifestants prendre la rue, des incidents du genre de ceux auxquels on assiste ailleurs en Afrique, entraînant mort d’hommes et incendie des édifices, n’ont pas eu droit de cité. Les civils, comme les militaires, ont à l’unisson passé le message d’apaisement, l’essentiel, en tout état de cause, ayant été de trouver une solution à la crise politique créée par la lutte de succession dans laquelle, finalement, le vieux leader, l’un des plus anciens chefs d’Etat en poste, a joué et perdu. Sa femme, Grace Mugabe, par qui tout est arrivé, pourrait-on dire, aura sans doute le temps, en se regardant elle-même dans le miroir, de se rendre compte de l’erreur qu’elle a commise ou fait commettre à son époux de président en agitant sa ferveur de lui succéder à la tête du pays.

« J'ai choisi volontairement de démissionner. Cette décision a été motivée par mon désir d'assurer un transfert du pouvoir sans problème, pacifique et non violent.", a laconiquement répété le président de l’Assemblée nationale, Jacob Mudenda, qui lisait la déclaration du président démissionnaire, laissant éclater la joie des Zimbabwéennes et Zimbabwéens, qui c’est peu dire, attendaient ce moment depuis un petit temps. Sa déclaration de la veille, au cours de laquelle le désormais ancien président du Zimbabwe préconisait la tenue au mois de décembre du congrès de son parti, la Zanu-PF, n’aura été qu’un moyen pour lui de préparer et amortir son départ.  

Il reste à celui qui prendra sa suite, sans doute son ex-vice-président, Emmerson Mnangagwa, de combler les attentes de ses compatriotes. En assurant une transition tranquille vers l’introduction des réformes que ces derniers sont en droit d’espérer. Le mandat de Mugabe devant normalement s’achever l’année prochaine, le temps sera venu peut-être aussi d’organiser l’élection présidentielle afin de doter le pays d’institutions stables.

Mais, le dénouement qui vient de se produire peut aussi être source de désillusions pour une opposition zimbabwéenne visiblement prise de court par les événements. Le départ du président Mugabé s’étant réalisé dans une espèce d’arrangement interne au parti au pouvoir, il faudra à Morgan Tvangiray, leader du Mouvement pour le changement démocratique, beaucoup de tact pour rebondir, lui que la lutte de plusieurs années contre le régime de la Zanu-PF a été un quitte-énergie, voire un quitte-santé.

Dans la droite ligne des pays que l’on disait à l’époque de la ligne de front, du temps de la lutte contre le régime d’apartheid, en Afrique du Sud, les partis « historiques » en Angola, en Namibie, au Mozambique, finalement donc au pays de Mandela, et dans bien d’autres Etats de cette région, ont tendance à contrôler les alternances au pouvoir. En sera-t-il, sait-on jamais, pour la Zanu-PF, qui semble pour le moment avoir le contrôle de la situation, et peut-être aussi des changements attendus ? On sait aussi que le sort de son fondateur est désormais aussi entre ses mains.

Gankama N'Siah

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