Santé publique : l’OMS liste 12 « superbactéries » contre lesquelles il faut mettre au point de nouveaux antibiotiques

Mardi 28 Février 2017 - 10:42

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L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rendu publique lundi une liste de 12 familles de bactéries contre lesquelles elle juge « urgent » de développer de nouveaux traitements, afin de faire face au défi de santé préoccupant que représente la résistance aux antibiotiques.

Expliquant les raisons de la publication de cette liste, l’OMS a assuré que « cette liste a été établie pour essayer d’orienter et de promouvoir la recherche-développement de nouveaux antibiotiques », en ciblant « les 12 familles de bactéries les plus menaçantes pour la santé humaine ». Il s’agit, d’après l’agence santé des Nations unies, de chercher à empêcher la résurgence de maladies infectieuses incurables.

L’organisation note que le risque est jugé « critique » pour trois familles de bactéries : les Acinetobacter, les Pseudomonas et les entérobactéries (dont l’E.coli). Ces bactéries seraient résistantes y compris aux antibiotiques les plus récents, dits de dernier recours, et à l’origine de la plupart des infections graves en milieu hospitalier.

La sous-directrice générale de l’OMS pour les systèmes de santé et l’innovation, Marie-Paule Kieny, a insisté sur la nécessité de développer de nouveaux antibiotiques pour combattre ces superbatéries. « La résistance aux antibiotiques augmente et nous épuisons rapidement nos options thérapeutiques. Si on laisse faire le marché, les nouveaux antibiotiques, dont nous avons le besoin le plus urgent ne seront pas mis au point à temps », a-t-elle alerté.

L’OMS classe ensuite en « priorité élevée » six familles de bactéries responsables d’infections généralement contractées à l’extérieur de l’hôpital et résistantes à plusieurs types d’antibiotiques. Il s’agit: du staphylocoque doré; des salmonelles; de l’Helicobacter pylori (la bactérie responsable notamment des ulcères de l’estomac) ou encore de la Neisseria gonorrhoeae (qui cause la gonorrhée, une infection sexuellement transmissible très répandue).

De plus, l’organisation indique que trois autres familles de bactéries sont placées en « priorité moyenne » : le pneumocoque, qui peut conduire à des pneumonies et des méningites; l’Haemophilus influenzae, responsable d’infections comme les otites et les Shigella spp., cause d’infections intestinales telles que la dysenterie.

Selon un groupe d’experts internationaux formés en 2014 au Royaume-Uni, et auteurs de plusieurs rapports sur le sujet, les bactéries résistantes aux antibiotiques pourraient tuer jusqu’à 10 millions de personnes par an d’ici 2050, soit autant que le cancer. Ce groupe d’experts, présidé par l’économiste Jim O’Neill, signale que le phénomène cause déjà 700 000 décès par an, dont 50 000 en Europe et aux États-Unis.

Cette situation a conduit la directrice générale de l’OMS, Margaret Chan, à plaider davantage pour des investissements dans la recherche. En 50 ans, « seules deux nouvelles classes d’antibiotiques sont apparues sur les marchés », car le retour sur investissement pour ce type de médicaments est insuffisant pour les laboratoires, a-t-elle déploré.

La publication de l’OMS sur les bactéries résistantes représente « un pas en avant important », a salué la Société européenne de microbiologie clinique et des maladies infectieuses (ESCMID). « Nous espérons que cela va pousser les gouvernements et les groupes de recherche (...) à fixer les bonnes priorités », et ainsi, « à faire baisser le nombre des décès dus aux infections résistantes », a, de son côté, commenté Evelina Tacconelli, membre du comité exécutif de l’ESCMID, qui a contribué à l’élaboration de la liste de l’OMS. Cette liste constitue « un outil précieux et dont on avait un besoin urgent », a aussi commenté l’ONG Médecins sans frontières, qui se dit confrontée « tous les jours » sur le terrain au problème de la résistance aux antibiotiques.

Au Congo, cette résistance tue des milliers de personnes chaque année. En France, on estime que celle-ci cause quelque 12 500 décès par an, selon un rapport remis en 2015 au ministère de la Santé.

L’OMS tire régulièrement la sonnette d’alarme sur ce sujet. En septembre, elle avait appelé à mobiliser des fonds publics et privés pour favoriser la recherche de nouvelles classes d’antibiotiques et encourager les traitements alternatifs.

 

 

Nestor N'Gampoula

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