Congo : Un boom infrastructurel porteur de développementVendredi 6 Décembre 2013 - 10:30 Depuis plus d’une décennie, l’Afrique s’est engagée dans un processus de développement économique reconnu par tous et dont les retombées commencent à se faire sentir dans certains pays. Les principaux piliers de ce développement résident dans la maîtrise et la profusion de diverses infrastructures. Or, il est de notoriété universelle que tout développement passe par l’existence d’une base infrastructurelle diversifiée, bien maîtrisée et adaptée Raisonner au niveau continental Dans cette perspective, des initiatives foisonnent dans toutes les sphères de prise de décision, sous la conduite de nos différents chefs d’État avec l’apport technique des organismes de développement. Des initiatives d’autant plus cohérentes que le processus du développement économique de l’Afrique a été longtemps heurté à des contraintes liées, entre autres, à un sous-équipement notoire en matière d’infrastructures. En effet, selon la Banque africaine de développement (BAD), moins du tiers de la population africaine a accès à une route praticable en toute saison. Par ailleurs, il a été prouvé que les coûts de transport et les délais d’acheminement des marchandises le long des corridors routiers étaient deux à trois fois supérieurs à ceux des autres régions du monde. De même, l’insuffisance et la carence dans les domaines des transports, des communications, de l’énergie, de l’eau et de l’assainissement aliènent tous les efforts des dirigeants. C’est ainsi qu’on estime à près de 95 milliards de dollars le coût moyen de couverture des besoins en infrastructures de l’Afrique pour la décennie en cours. Conscient de l’enjeu que représente la levée de ce handicap pour son développement, le Congo a défini une vision pour un développement cohérent en s’inspirant du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique et du Programme de développement des infrastructures en Afrique, adoptés respectivement en 2001 et en 2010, et dont les objectifs sont la construction des chaînons manquants de la route transsaharienne, de la construction du corridor Nord/Sud Le Cap-Le Caire, la construction de plusieurs ouvrages de franchissement interÉtats, la construction d’installations de fibre optique reliant plusieurs pays et l’encouragement à la création des hubs sous-régionaux. Dans cette dynamique, le Congo, tout en s’appropriant ces orientations continentales, met en œuvre depuis 2002 une stratégie nationale d’équipement du territoire privilégiant tous les types d’infrastructures, l’ambition étant de réaffirmer sa vocation de transit dans la sous-région en tirant le maximum de profit de sa situation géographique. Plusieurs projets d’infrastructures publiques ont été mis en œuvre au Congo à travers le programme de gouvernement du chef de l’État, le Chemin d’avenir. Le Congo s’est ainsi donné les moyens d’impulser son développement après de longues années d’atermoiement. Le développement du Congo est l’œuvre d’une coopération de développement, un activisme gagnant-gagnant qui implique les nationaux et les expatriés. Depuis toujours, à travers des modes opératoires divers (partenariats stratégiques, contrats de développement, commissions mixtes, accords thématiques, etc.), le Congo entretient de très bons rapports économiques avec les pays amis. La France, partenaire privilégié Parmi les partenaires privilégiés figure la France qui est, de toute évidence, le premier partenaire économique et de développement. La France demeure également le premier investisseur au Congo avec un stock d’IDE de près de trois milliards d’euros à la fin 2012. Les autres investissements proviennent surtout d’Italie (pétrole, bois et or), des États-Unis (pétrole, minoterie, tabac), des Pays-Bas (brasserie), d’Allemagne (bois), et de Chine (cimenterie, bois). La France reste en 2012 le premier pays fournisseur du Congo, avec près de 590 milliards d’euros d’exportations (20,2% de part de marché selon les statistiques provisoires congolaises), devant la Chine (13,9%) et le Brésil (9,4%). Ces deux derniers pays progressent cependant rapidement, la Chine détenant 12,2% des parts de marché et le Brésil 1,5% en 2010. Environ 70 filiales françaises sont répertoriées au Congo, auxquelles s’ajoute un nombre équivalent d’entreprises congolaises ayant des intérêts français. La présence française est particulièrement forte dans le secteur pétrolier et parapétrolier, mais aussi dans la logistique et les transports, l’agroalimentaire, le BTP, la banque, la distribution… La coopération économique entre le Congo et la France se traduit dans le cadre des accords historiques, du contrat de désendettement et de développement et du contrat de codéveloppement. Ce dernier touche, entre autres, le secteur pétrolier, l’assainissement et la gestion durable des forêts. Ce développement est encadré par une armature juridique intégrant le code d’investissement, le code des marchés publics ainsi que les facilités offertes par le centre de formalités d’entreprise qui allègent les procédures et encouragent l’égalité des chances. Cela est un gage sûr de diversité qui met en compétition, les expertises occidentales, asiatiques, américaines, sud-américaines, africaines et locales, dans plusieurs projets. Le secteur des transports L’expérience est très concluante puisqu’elle a déjà mis en communion, entre autres, Cemec (chinois) et Fishner (allemand) dans le cadre du barrage d’Imboulou, Weitec (chinois), Socotec et Vinci (français) pour l’aéroport international de Maya-Maya, CSCE (Chinois) et Egis (français) dans le projet de la route Pointe-Noire-Brazzaville. Les partenariats public-privé conclus au port autonome de Pointe- Noire avec le groupe Bolloré et à l’aéroport Maya-Maya avec Aerco sont révélateurs de cette volonté d’ouverture du Congo. Quant aux réalisations dans les infrastructures, elles n’épargnent aucun département et aucune sphère économique. On note la réalisation progressive d’une dorsale routière Nord/Sud de près de 1 600 kilomètres, reliant Pointe-Noire, porte océane du pays, au sud-ouest, à l’extrême nord du pays. Cette dorsale stratégique pour le développement du pays sera constituée à terme d’une infrastructure routière lourde de type T4 permettant les échanges entre les principales villes du pays et desservant les douze départements du Congo. Le niveau d’exécution de ce corridor porte sur la construction des tronçons Pointe-Noire–Dolisie (168 km), Dolisie-Brazzaville (376 km), Owando-Makoua-Mambili (126 km), Mambili-Ouesso (199 km) et Ouesso-Impfondo. S’inscrivant dans la perspective sous-régionale et du plan directeur consensuel des transports en Afrique centrale mis en œuvre par la Communauté économique des États d’Afrique centrale, le Congo exécute actuellement quatre routes d’intégration : Dolisie-Doussala (ouverture vers l’ouest du Gabon), Obouya-Boundji-Okoyo (ouverture vers l’est du Gabon), Ketta-Djoum (ouverture vers le sud-est du Cameroun), ainsi que le pont route-rail sur le fleuve Congo entre Brazzaville et Kinshasa (ouverture vers la RDC). Les études du corridor 13 reliant Ouesso à Ndjamena via Bangui sont en cours. Trois principales plateformes aéroportuaires permettent une réelle polarisation du territoire national pour en faire un hub sous-régional. Il s’agit des aéroports internationaux Maya-Maya de Brazzaville, avec une piste référencée à l’Airbus 380 et une aérogare capable de traiter plus de trois millions de passagers par an ; de l’aéroport de Pointe-Noire, pour une capacité attendue de près de 1,5 million de passagers ; et l’aéroport d’Ollombo, situé en plein cœur d’une zone économique spéciale en gestation, à cheval entre Brazzaville et Bangui (RCA), Douala (Cameroun), Mbandaka (RDC) et Libreville (Gabon). Autour de ces infrastructures centrales du dispositif se créent des aéroports secondaires dans chaque département, pour lesquels des travaux de réhabilitation, de modernisation et de mise aux normes internationales sont engagés. Pour faire face à l’évolution du trafic en constante augmentation, des travaux de modernisation et d’extension sont en cours au port de Pointe-Noire. Il s’agit, particulièrement du terminal à conteneurs et des études pour la construction d’un port minéralier. La voie ferrée, longue de 512 km, reliant Pointe-Noire, capitale économique, et Brazzaville, la capitale politique, et dont l’infrastructure et les équipements étaient fortement détériorés, font l’objet d’importants travaux destinés à les réhabiliter progressivement. La mise en place d’un boulevard énergétique devant relier les localités du sud à celles du nord tout en s’interconnectant aux réseaux des pays voisins dans le cadre du pool énergétique d’Afrique centrale est en cours. Le secteur de l’énergie La réalisation d’un vaste programme de construction et de renforcement des infrastructures de production et de distribution d’électricité a occasionné un bond en termes d’offre en électricité d’environ 80 MW en 1997 à plus de 600 MW en 2013. Cette production est transportée sur un réseau de distribution THT de plus de 1 500 kilomètres dans le cadre du réseau national interconnecté. La connexion du Congo aux autoroutes de l’information et de la communication au moyen d’une infrastructure en fibre optique a cessé d’être une simple vue de l’esprit. Déployée sur une infrastructure reliant Pointe-Noire, Brazzaville, Owando et bientôt Ouesso à l’extrême nord, la fibre optique s’arrime à Matombi, département du Kouilou, au câble sous-marin de la côte ouest-africaine dans le cadre du projet West Africa Cable System. Une initiative dénommée municipalisation accélérée a permis le désenclavement progressif de l’hinterland et la modernisation des infrastructures urbaines. Elle égrène les réalisations en termes d’édifices administratifs, de logements sociaux, d’équipements de production et de distribution d’eau potable et d’énergie, de structures sanitaires, de voiries urbaines et d’ouvrages d’assainissement. De 2004 à ce jour, des centaines de structures administratives construites dans ce cadre participent à rapprocher la portion centrale et locale. Dans son processus d’ascension à l’émergence, le Congo affiche de grandes ambitions infrastructurelles. La mise en valeur de ses importants gisements miniers (fer, potasse, phosphate, cuivre, or, etc.), gage de la diversification de l’économie, requiert la construction d’infrastructures de transports pour les acheminer des lieux d’extraction vers les zones de transformation. À cet effet, avec l’appui substantiel des quelques partenaires intéressés dans ce processus, il a été convenu de la construction d’un complexe portuaire capable de traiter près de 45 millions de tonnes par an, d’une nouvelle voie ferrée de près de 1 500 kilomètres traversant le pays du sud au nord d’un ouvrage route/rail qui va relier Brazzaville à Kinshasa. Dans la même perspective, le Congo accueillera en 2015 les onzièmes jeux Africains à l’occasion de leur cinquantenaire. Cet évènement sportif continental de première importance requiert la construction d’infrastructures olympiques aux normes internationales, auxquelles seront associées d’autres structures connexes (villages olympiques, transports, communications, etc.). Le pays a aussi l’ambition, au plan énergétique, de compléter son offre en procédant à la construction des barrages de Sounda (1000 MW) et Chollet (700 MW). Innover dans les modes de financement Face aux énormes besoins en d’infrastructures qu’occasionne un état en développement et soucieux de préserver les équilibres nécessaires au plan financier, limitant de facto les capacités de mobilisation des financements à allouer à ces travaux, le Congo a imaginé des modes de financement innovants, associant plusieurs acteurs tout en créant un environnement attrayant et propice à l’émergence de ceux-ci. C’est ainsi que se développent les partenariats public-privé depuis quelques années. Dans cette perspective, plusieurs pistes explorées par le Congo commencent à porter leurs fruits. Elles comprennent la création d’un environnement propice à l’installation et au développement du secteur privé permettant d’investir dans la construction des infrastructures et de les gérer lorsque leur rentabilité est éprouvée, l’implication des entreprises qui peuvent porter des projets d’infrastructures avec des modalités particulières de gestion et la mutualisation des efforts financiers des états avec ceux du secteur privé dans le cadre du partenariat public-privé. C’est dans cette perspective d’échange et de réflexion collective mutualisée que le Congo organise à Brazzaville, les 6 et 7 février 2014, le premier forum sur les infrastructures en Afrique, dénommé « Brazzaville unit les leaders africains des infrastructures pour le développement (Build Africa) ». Deux jours d’échanges professionnels et de contacts sur des thématiques liées au développement où des experts de divers horizons échangeront sur les possibilités de stimuler le développement de l’Afrique à partir des infrastructures.
NB : Jean-Jacques Bouya est ministre à la présidence de la République, chargé de l’Aménagement du territoire et de la délégation générale aux Grands Travaux. Jean-Jacques Bouya |