Lutte contre le fondamentalisme : les socialistes européens appellent à sortir du silence qui fait le lit de l’extrémisme

Mardi 14 Avril 2015 - 17:00

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Une mission de députés européens conduite par l’Italien Gianni Pittela a séjourné en Afrique.

Le groupe socialiste au Parlement européen veut que l’Afrique ne soit pas seulement évoquée pour ses richesses. C’est de ce continent que pourraient aussi sortir les initiatives les plus crédibles pour contrer le fondamentalisme religieux, estime-t-il. « Les socialistes européens repartent de l’Afrique, avec une première mission au Congo, pour rappeler que l’indifférence et le silence de la communauté internationale sont non seulement inacceptables, mais aussi stratégiquement myopes. Ils ne font qu’alimenter l’insécurité et l’instabilité même en Europe », a souligné Gianni Pittela.

L’Italien, chef de mission, était la semaine dernière à Kinshasa puis s’est rendu avec ses collègues (dont l’Italo-congolaise Cécile Kyenge Kashetu) dans les provinces de l’est congolais en proie aux violences et à l’instabilité. M. Pittela est connu pour soutenir une vision sur le terrorisme qui entend agir à la base et à la source, estimant que les actes terroristes enregistrés ces derniers mois en Europe et dans le Bassin méditerranéen sont la résultante d’une addition de petits renoncements.

« L’Afrique est un grand continent, mais il est complètement oublié par l’Europe. Pourtant c’est un partenaire privilégié de l’UE, et nous souhaitons y récupérer notre position centrale ». La mission des eurodéputés socialistes se veut annuelle. Celle en République démocratique du Congo est appelée à se renouveler dans les années qui viennent au Rwanda et au Burundi. Dans la région des Grands lacs, les socialistes européens veulent pointer du doigt les trafics, notamment des minerais du sang, qui alimentent la persistance des petits et grands conflits qui se traduisent en une insécurité permanente.

Le djihadisme, aujourd’hui hantise des pays occidentaux, agit pourtant depuis des années en Afrique. En Somalie, en Libye ou au Nigéria, le fondamentalisme creuse son nid, se renforce et se fait menaçant pour la paix du monde. C’est pourquoi les socialistes européens entendent agir dans trois directions pour le contrer : aider au renforcement des fragiles démocraties dans les pays pour ne pas laisser d’espace aux prédicateurs de la haine, soutenir la société civile et, enfin, « notre objectif immédiat est de faire adopter une législation contraignante sur la traçabilité des minerais » de sang, a indiqué M. Pittela. « Parce que ces minerais sont la cause de tant de guerres, de sang versé et de l’exploitation des mineurs », estime-t-il.

« Le choix de l’Afrique dans cette stratégie est visionnaire, mais pas facile. Il s’agit de placer ce continent au centre de la politique extérieure du deuxième groupe politique au Parlement européen ; une stratégie basée sur la conscience et sur l’urgence de contribuer à fonder une politique extérieure européenne commune et incisive ». Il ne s’agit pas, pour lui, de faire le choix d’éteindre les incendies par catégories. M. Pittela estime que le pape François et le Premier ministre Matteo Renzi sont d’accord sur ce point : « le fondamentalisme islamique, les conflits ethniques et sociaux, la persécution des chrétiens, les conflits liés aux trafics de minerais, les violences sur les femmes constituent des nœuds qui requièrent une action décisive de l’Europe » en tant qu’entité.

Les socialistes européens réaffirment que lutter contre le terrorisme, surtout de matrice religieuse, demandera du temps. Mais de toutes les options que cela impliquera la pire serait celle de faire le choix du silence. Le gouvernement italien s’est rallié à toutes les solutions de concertation visant à contrer la menace islamiste. En Libye, il appuie les efforts de l’ONU pour amener les différentes parties autour d’une table de négociations. En Tunisie, le Premier ministre Renzi en personne est allé manifester à Tunis après les attentats contre le musée Bardo, des gestes loin d’être anecdotiques. Rome estime qu’il faut lutter ensemble pour gagner ensemble cette guerre-là.

Lucien Mpama