Apprendre à vivre autonome après la mort du mariDimanche 7 Décembre 2014 - 15:24 Bon nombre de veuves sont abandonnées à elles mêmes après le décès de leurs maris. Devant cette difficulté, des associations congolaises aident certaines veuves à exercer des activités productives pour assurer leur indépendance. « Apres la mort de mon mari, j’ai commencé à exercer plusieurs activités, j’ai vendu du charbon de bois, des beignets, des poissons fumés pour nourrir mes six enfants et soutenir leurs études », témoigne Marie-Thérèse, veuve depuis 1983. En 2004, pour apporter un plus à ses activités, cette veuve adhère à l’œuvre de notre dame des veufs et orphelins du Congo (ONDV&OC). Grâce à l’aide financière de cette association, Marie-Thérèse et d’autres veuves ont trouvé une véritable autonomie. « Nous avons cultivé un champ de maniocs à Inoni Plateaux (un village au nord du pays, dans le département des plateaux, situé à 150 km de Brazzaville). La récolte de ce champs nous à permis d’avoir un compte en banque », confie la veuve Marie-Thérèse. L’ONDV&OC est une association religieuse qui aide certaines veuves délaissées à développer des activités économiques. C’est le cas de cette veuve, la trentaine, qui a requis l’anonymat, « J’ai une cabine téléphonique à la maison et je fais aussi des transferts de crédits de téléphone. Cette activité contribue à subvenir à mes besoins et à prendre soin de mes deux enfants », explique-t-elle. Aujourd’hui, la jeune veuve vit son indépendance économique sans l’aide des parents. François Xavier Mayouya Mifoundou, président de l’ONDV&OC, explique son combat en faveur de l’amélioration des conditions de vie des veuves : « quand le mari meurt tout s’arrête surtout pour la femme qui ne travaille pas ». Depuis 2002, une vingtaine de veuves ont bénéficié de l’aide économique de cette association pour démarrer un métier. « Dès que nous avons une enveloppe de 50.000 FCFA (76€) ou plus, nous la remettons à la femme veuve par apport à sa demande de sorte qu’elle commence à faire une petite activité économique de son choix ». S’en suit un réel travail de suivi, « dès que l’activité de la veuve décolle, notre action s’arrête ». Une nouvelle vie commence Être veuve n’est pas une chose facile surtout lorsque l’on dépendait totalement de son mari. Sophie est devenue veuve à 33 ans. Elle perd son mari alors qu’elle était étudiante à l’Université Marien-Ngouabi : « Après la mort de mon conjoint, ça a été un coup dur pour moi de prendre la charge de mes deux enfants. Mon mari était le maître de la maison et se chargeait de nourrir les enfants, de payer le loyer et les autres besoins du quotidien ». Et depuis quelques temps, grâce à sa cabine, Sophie s’occupe seule de sa famille. Elle invite d’autres femmes à être autonome financièrement même pendant le vivant du mari pour ne pas subir sa situation. Parmi les associations qui multiplient des initiatives en faveur de cette catégorie de femmes, on peut citer Mibeko qui a lancé en février dernier, à Ewo (dans le département de la Cuvette-Ouest, au nord du pays), le programme d’autonomisation économique des femmes seulement. Ce projet de deux ans se déroulera en deux phases : d’abord former les femmes sur la maîtrise technique de leurs propres activités comme le commerce et le maraîchage, ensuite les appuyer par des microcrédits pour qu’elles soient autonomes. « Il faut donner à la femme les moyens financiers qui vont lui permettre d’être dynamique et indépendante dans la vie », pense Herman Batamio, juriste à Mibeko. D’après ce dernier, sur les 374 femmes identifiées, 174 femmes ont commencé avec la première phase. Cette association ne se limite pas là. Entre 2005 et 2009 elle s’est lancée dans un autre projet sur les droits successoraux. Un projet auquel 553 femmes veuves ont été formées à connaître leurs droits de veuvage tel le droit de la pension à la veuve. Le prix à payer pour obtenir la pension Certaines veuves souffrent longtemps pour obtenir leurs pensions à cause des étapes à franchir au niveau la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et de la Caisse de retraite des fonctionnaires (CRF). « Pendant les moments difficiles, j’ai commencé à vendre mes mobiliers pour payer les études des enfants », confie Marie José, veuve depuis 2002. Mais l’impossible ne tardera pas à lui tomber dessus. « Mon dossier a été retiré par ma belle-famille à la CRF. J’ai eu beaucoup de contradictions avec ma belle-famille qui jugeait que je n’avais pas le droit à la pension de mon mari même si j’ai l’acte de mariage », explique la veuve Marie-José qui a peiné pendant trois ans et demi avant de toucher la pension de son mari à la CRF. D’après Aristide Montbouli, chef de service de liquidation à la CRF, ce que les veuves perçoivent en moyenne ne leur permet pas de résoudre tous leurs problèmes. Certaines veuves touchent en moyenne 3.000 FCFA par mois pour la CRF et par trimestre pour la CNSS, soit 4 €. D’autres ont des montants allant jusqu'à 500.000 FCFA (763€) surtout pour les veuves des hauts-fonctionnaires. Pour aider les plus démunies qui touchaient des sommes inférieures à 40.320 FCFA (61 €), le chef de l’État a trouvé une solution à travers le décret n° 697 du 30 /12/2006. Cette mesure devra désormais revaloriser la pension des veuves. Flaure-Élysée Tchikaya |