Lutte contre le paludisme : l’OMS lance un appel à un financement durableJeudi 12 Décembre 2013 - 11:51 Si les efforts déployés pour combattre et éliminer cette maladie ont permis de sauver 3,3 millions de vies depuis 2000, de réduire de 45% le taux de mortalité dans le monde et de 49% en Afrique, l’édition 2013 du rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le paludisme rendu public le 11 décembre conclut à la nécessité de « faire davantage » D’après cette analyse, la prévention du paludisme a connu un revers après avoir pris son essor entre 2005 et 2010. L’OMS relève, pour la deuxième année consécutive, un recul dans l’accès aux moustiquaires imprégnées d’insecticide, principalement par manque de fonds. L’organisation estime qu’un financement durable est nécessaire pour venir en aide au plus de trois milliards de personnes dans le monde qui risquent de contracter le paludisme. Le financement international de la lutte antipaludique est passé de moins de cent millions de dollars en 2000 à près de deux milliards en 2012, auxquels s’ajoutent les financements nationaux d’un montant d’environ un demi-milliard pour cette même année. Cela ne représente toutefois que la moitié des 5,1 milliards nécessaires chaque année pour parvenir à l’accès universel aux différentes interventions. Faute de financement suffisant et prévisible, les progrès sont également menacés par l’émergence de la résistance parasitaire à l’artémisinine, la composante essentielle des combinaisons thérapeutiques, et de la résistance des moustiques aux insecticides. La résistance à l’artémisinine a été détectée dans quatre pays d’Asie du Sud-Est et celle aux insecticides dans au moins soixante-quatre pays. Pour la directrice générale de l’OMS, les progrès enregistrés ne sont pas une raison pour relâcher les efforts. « En chiffres absolus, le nombre des cas de paludisme et des décès ne baisse pas aussi vite qu’il le pourrait. Le fait que tant de personnes contractent l’infection et meurent après avoir été piquées par des moustiques est l’une des grandes tragédies du XIXe siècle », note Margaret Chan. De son côté, l’envoyé spécial du secrétaire général pour le financement des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) liés à la santé et pour le paludisme, Raymond Chambers, plaide pour plus d’engagements financiers. « Pour remporter la bataille du paludisme, affirme-t-il, nous devons avoir les moyens d’assurer la prévention et le traitement de la maladie pour chaque famille qui en a besoin. Nos efforts collectifs ne servent pas seulement à mettre un terme aux souffrances inutiles de millions de personnes : ils aident aussi les familles à prospérer et à injecter dans les économies des milliards de dollars que les pays peuvent utiliser autrement. » Rien que pour l’année 2012, l’OMS estime qu’il y a eu 207 millions de cas de paludisme ayant provoqué environ 627 000 décès. Et selon les estimations, 3,4 milliards de personnes continuent d’être exposées, principalement en Afrique et en Asie du Sud-Est. Près de 80% des cas de paludisme apparaissent en Afrique, ceci parce que la proportion de la population d’Afrique subsaharienne ayant accès à ce type de moustiquaires est restée largement en deçà des 50% en 2013. Seulement 70 millions de nouvelles moustiquaires ont été distribuées dans les pays d’endémie en 2012, un chiffre bien inférieur au minimum des 150 millions nécessaires chaque année pour garantir une protection à toute personne exposée au risque. Le rapport indique qu’en 2013, environ 136 millions de moustiquaires ont été distribuées. Les perspectives pour 2014 semblent encore meilleures parce qu’elles indiquent qu’un réel revirement de la situation a des chances de se produire. S’agissant des tests de diagnostic du paludisme, l’étude signale qu’ils ont continué de s’étendre ces dernières années. De 2010 à 2012, la proportion de cas suspects ayant bénéficié d’un test de diagnostic dans le secteur public est passée de 44 à 64% à l’échelle mondiale. En dépit de ces progrès, des millions de personnes n’ont toujours pas accès au diagnostic et à des traitements de qualité garantie, en particulier dans les pays n’ayant pas un système de santé solide. Le déploiement des traitements préventifs, recommandés pour les nourrissons, les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes, a également été lent ces dernières années. « Les progrès remarquables accomplis contre le paludisme sont encore fragiles, prévient le directeur à l’OMS du Programme mondial de lutte antipaludique, Robert Newman. Au cours des dix à quinze prochaines années, le monde aura besoin d’outils et de techniques innovantes, ainsi que d’approches stratégiques pour pérenniser et accélérer les progrès. » « Le vote de confiance exprimé par les donateurs la semaine dernière à la conférence de reconstitution volontaire des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme témoigne du succès du partenariat mondial. Mais il nous faut combler le déficit annuel de 2,6 milliards de dollars pour atteindre la couverture universelle et éviter les décès par paludisme, souligne la directrice exécutive du partenariat Faire reculer le paludisme. C’est notre chance historique de vaincre cette maladie », conclut-elle. Nestor N'Gampoula |