Les instituts de statistiques en Afrique

Vendredi 6 Décembre 2013 - 10:29

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L’importance de statistiques fiables n’est plus à démontrer. L’amélioration de l’organisation et de la gestion des systèmes statistiques nationaux (SSN) est devenue une exigence pour faire face à la forte demande statistique requise par l’agenda du développement

Plusieurs initiatives ont vu le jour au cours de la décennie 2000 tant au niveau international que régional, telles que la deuxième table ronde internationale sur la gestion du développement axée sur les résultats tenue à Marrakech au Maroc en 2004, la charte de la statistique d’Accra, et les stratégies nationales de développement de la statistique (SNDS). Toutes ces initiatives consacrent la mise en place de cadres organisationnels appropriés des activités et le renforcement de la coordination statistique, en créant une synergie entre les différents intervenants pour des systèmes statistiques plus efficaces et plus performants.

Écoles de statistique et centres de formation en Afrique

La formation de statisticiens et démographes diffère entre les pays anglophones et francophones, avec les pays lusophones suivant le système francophone. Il y a deux écoles en Afrique de l’Ouest : à Dakar, l’École nationale de statistique et d’analyse économique ; et à Abidjan, l’École nationale de statistique et d’économie appliquée. Les étudiants francophones sont aussi formés à Rabat, à l’Institut national de statistique et d’économie appliquée. En Afrique centrale, il y a l’Institut sous-régional de statistique et d’économie appliquée à Yaoundé et l’Institut de formation et de recherche en démographie.

Les curricula sont similaires dans les quatre écoles de statistiques, qui offrent la pour la plupart le programme LMD. Les formations sont diplômantes : diplôme d’ingénieur des travaux statistiques (ITS) et diplôme d’ingénieur statisticien économiste (ISE). Les écoles de Dakar et d’Abidjan offrent aussi des masters et des doctorats en partenariat avec des universités françaises et américaines. Les diplômés sortant de ces écoles sont d’excellent niveau.

Des pays comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Cameroun disposent aujourd’hui d’une masse critique de statisticiens et de démographes qui travaillent aussi bien dans l’administration que dans le privé. Les statisticiens africains, qu’ils soient ITS ou ISE, sont très recherchés sur le marché du travail privé à cause de leur excellent background et de la flexibilité que leur donne leur formation : comptables, gestionnaires, banquiers, financiers, informaticiens, etc., d’où la difficulté pour les gouvernements de les garder dans l’Administration où les salaires ne peuvent rivaliser avec ceux du privé.

Dans les pays anglophones, l’Institut de statistique et d’économie appliquée (ISEA) de l’université de Makerere (meilleur centre de formation anglophone) et l’Eastern Africa Statistical Training Center (EASTC) de Dar es Salam sont les deux centres les plus connus. L’EASTC offre une formation pratique en statistique au niveau de technicien, alors que l’ISEA produit des professionnels de haut niveau allant jusqu’au doctorat.

Les faiblesses les plus courantes dans les systèmes statistiques africains, qui demandent des suppléments de formation (selon les pays), sont : production des comptes de la nation, analyse macro-économique, analyse conjoncturelle, projections économiques et démographiques, pratique des sondages, contrôle de la qualité, études approfondies des résultats et des données macro, dissémination et qualité des publications statistiques, d’où la nécessité de partenariats avec les universités.

Les Instituts nationaux de statistiques (INS) en Afrique

Tous les pays africains ont un service national de la statistique. Leur niveau de développement, leur capacité et leur rayonnement varient d’un pays à l’autre. Les données produites permettent de comprendre la situation des pays et cibler les interventions à conduire de manière efficace pour un développement soutenable et harmonieux. Le soutien des organisations internationales se résume comme suit : le FMI appuie principalement les statistiques macro-économiques, l’USAID appuie les EDS (Enquêtes démographiques et de santé), l’Unicef appuie les Mics (Multiple Indicator Cluster Survey, en francais: enquêtes a indicateurs multiples), l’UNFPA appuie les recensements ; la Banque mondiale, le DFID et le Pnud appuient les statistiques micros pour le suivi du développement.

Le point faible reste le financement irrégulier des opérations statistiques par les états africains. Plusieurs INS dépendent de bailleurs de fonds pour réaliser leur programme de formation et de production. La mise en place de SNDS porte l’espoir que les partenaires au développement des statistiques puissent coordonner leurs appuis de façon efficiente et suffisante, mais dans la grande majorité des cas elle se heurte au manque de financement pour la mise en œuvre des opérations programmées. Cela est dû au fait que jusqu’à présent tous les gouvernements africains n’ont pas encore pleinement intégré la statistique et son développement dans les budgets nationaux, au même titre que la santé, l’éducation ou le fonctionnement courant de l’État. La statistique doit devenir une activité régalienne de l’État, car le développement ne peut plus être piloté à vue, mais de façon mesurable dans la pérennité.

L’objectif ultime serait d’obtenir des systèmes statistiques autonomes qui produisent des données de qualité et disponibles régulièrement, accessibles à tous sans contraintes de ressources humaines et financières.

 

NB : Zouera Youssoufou est aujourd’hui représentante-résidente de la Banque mondiale pour le Gabon et la Guinée équatoriale, après avoir intégré l’IFC, une filiale de la Banque mondiale dévolue au secteur privé en 2005.

Zouera Youssoufou