Point de vue : de la vertu des puissantsVendredi 29 Janvier 2016 - 17:04 Les médias occidentaux ont fini par imposer une vision du monde dont il ne faut surtout pas s’écarter sous peine d’être classé « looser » Il est arrivé plus d’une fois que devant son poste téléviseur on reste médusé par le propos soutenu par quelque fin spécialiste de l’Afrique, et qu’on ait envie de dire : mais que racontez-vous là ? C’est que, plus d’une fois, la conscience est violée par des stéréotypes véhiculés par des vecteurs sans recul, qui finissent par imposer l’idée que hors de ces préjugés, l’information n’est plus. L’Afrique, c’est le continent où les populations extrêmement pauvres vivent toujours avec moins de deux dollars par jour. Ses pays sont toujours dévastés par des guerres civiles et ses dirigeants toujours véreux. Et on ne parle pas des maladies endémiques qui vous collent à la peau dès l’aéroport ; d’un recul absolument sans frein dans tous les paramètres du développement. Alors, pourrait-on demander, pourquoi continuer d’y aller ou même d’en parler ? Pour apporter de l’aide, voyons ! Une aide désintéressée, toujours orientée vers le bien altruiste, vers le souci de sauver des peuples en naufrage programmé. Si on devait suivre une telle ligne de conduite, devant les JT de toutes les télévisions occidentales ne s’étalerait plus qu’un alignement impeccable de belles réalisations dûes à la coopération bilatérale réussie : « voyez, telle route, c’est nous ! » Et naturellement un tel scénario renverrait le négatif aux nationaux, bien entendu. Tel éléphant blanc ? C’est parce que le grand puissant du coin a siphonné la caisse ! La baisse des ressources ? Que voulez-vous, c’est la conjoncture. Les guerres et conflits ? « C’est eux-mêmes qui se détestent. Nous, on n’a apporté que les armes ». D’ailleurs payées rubis sur l’ongle, oublie-t-on de préciser lorsqu’on est d’un pays fabricant et commerçant d’armes. Cela rappelle le cynisme de l’industrie américaine d’armes, qui s’évertue à rappeler qu’un pistolet ne tue pas ; c’est l’homme qui le pointe qui tue. Soit. Tel pays est dirigé par un régime liberticide ; l’homosexualité y est punie ! En somme, acceptez l’homosexualité et vous serez civilisés ; repoussez-la, et vous êtes irrémédiablement rangés dans la catégorie des féroces dictatures. C’est-à-dire des pays où même les croyants, par définition toujours conservateurs et opposés au progrès des peuples, ne participent qu’à l’obscurantisme général même quand ils gèrent des écoles ou des centres de santé, soulagent la misère de ceux que des politiques de coopération sans cap rejettent sur le bas-côté. Alors tout le monde participe de l’hypocrisie de tout le monde ! Les citoyens eux-mêmes reprennent le langage de ceux qui les condamnent et présentent cela comme marque d’évolution et de civilisation. De démocratie même ! Combien des fois n’a-t-on entendu des Africains pérorer sur « les Africains » sans même donner l’impression de se rendre compte que les arriérés dont ils parlent c’est eux-mêmes ! Comme s’ils étaient, dans le jeu de miroirs posé par Franz Fanon (Cf. « Peau noire, masque blanc »), les parfaits inconscients qui singent les autres pour se chercher quelque promotion. Et, en règle générale, de tels Africains sont très lucides au loin, moins lorsqu’ils sont confrontés aux réalités qu’ils dépeignent à partir des émissions de télévision des autres et qu’ils daignent revenir au pays. Puisant au répertoire des puissants, ils rabâchent des formules auxquelles ils donnent l’impression de croire dur comme fer et deviennent, peu à peu, incapables de se sortir du piège des idées des puissants, ou de les remettre en cause. Alors ils pérorent, pérorent et pérorent à longueur de journée, reprenant les mots à la sauce du moment : dictature, communautarisme, retard de croissance. Ils ont leurs modérés et leurs radicaux ; leurs progressistes et leurs conservateurs mais ils ne se reconnaissent dans aucune catégorie puisqu’ils sont, par essence, au-dessus de la mêlée. Lucien Mpama Notification:Non |