UNESCO : célébration du 20ème anniversaire du Projet la Route de l’esclaveJeudi 11 Septembre 2014 - 18:30 La délégation du Congo auprès de l’UNESCO, conduite par Jean-Marie Adoua, a assisté, mercredi 10 septembre, à la commémoration de la Route de l’esclave. « Souvenons-nous que l’une des portes de sortie sans retour pour nos frères et sœurs Afro-descendants est celle de Loango, dans le département du Kouilou au Congo », a précisé le diplomate congolais Plus qu’une commémoration, Jean-Marie Adoua place l’évocation mémorielle du fléau de l’esclavage transatlantique comme le refus d’une oppression injuste qui perdure. Il estime que l’histoire de la traite négrière est partie prenante de l’histoire du Bassin du Congo. Le refus d’un crime où ceux qui l’ont initié ont été vénérés et où ont été oubliées les victimes. « À notre époque, nous portons en nous la responsabilité et le devoir de maintenir une veille sur les méfaits de ce pan de la traite négrière. Car il en va de la compréhension des débats de société actuels au sujet de la diversité culturelle, gage du vivre ensemble », explique-t-il avec pertinence. Le Congo est membre signataire de la journée sur la prise en compte du devoir de mémoire du souvenir de la traite négrière et de son abolition. « Compte-tenu de la situation géographique du Congo, une façade vers l’océan atlantique, notre pays a joué et continue à jouer un rôle sur le projet de « la Route de l’esclave ». Pour le pays que je représente, promouvoir le dialogue des cultures et la compréhension entre les peuples du monde est un des objectifs majeurs ». « Certes, quatre siècles de colonisation, de traite négrière, d’esclavage et travaux forcés ont eu raison de nos contrées. Les résistances silencieuses se sont organisées jusqu’à briser les chaînes lors de l’insurrection qu’a connue l’île de Saint-Domingue, aujourd’hui Haïti et République Dominicaine, dans la nuit du 22 au 23 août 1791. D’une façon radicale et irréversible, le système esclavagiste doit être dénoncé par tous les canaux éducatifs et pédagogiques possibles. La réflexion éthique sur la portée et les conséquences de ce système doit éclore. Que dans les sociétés multiethniques où nous vivons, les nouvelles formes d’esclavage soient enrayées au-delà du vœu pieux », a conclu Jean-Marie Adoua. L’affluence cosmopolite de la salle et l’intensité des échanges lors de la commémoration a montré l’intérêt suscité par le sujet. Plusieurs personnalités l’ont honoré par leur présence. Parmi celles-ci, Christiane Taubira, rapporteuse de la loi portant son nom en mai 2001, qui tend à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité. Le projet « La Route de l’esclave »
Lancé en 1994 à Ouidah, au Bénin, sur proposition d’Haïti et du Bénin avec le soutien de l’Organisation de l’Unité africaine, le projet La Route de l’esclave a pour but de faire sortir l’histoire de la Traite négrière de l’oubli, de favoriser la réflexion sur le pluralisme culturel et le dialogue interculturel ainsi que de valoriser le riche patrimoine culturel né de cette tragédie humaine. Le travail de plaidoyer réalisé au travers du projet « La route de l’esclave » a permis d’aboutir à la reconnaissance officielle de la traite négrière en tant que crime contre l’humanité en 2001, lors de la conférence mondiale contre le racisme de Durban, ou encore à la Proclamation par l’ONU en 2007 d’une Journée internationale en souvenir des victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves, célébrée chaque 25 mars. La célébration des 20 ans du programme « La route de l’esclave » préfigure le lancement, en janvier 2015, de la Décennie des personnes d’ascendance africaine (2015-2024) qui mettra en valeur l’héritage de la diaspora africaine disséminée à travers le monde, et leur impact considérable sur le patrimoine culturel. Environs quinze millions d’hommes, de femmes et d’enfants ont été déportés d’Afrique pendant plus de quatre cents ans (du XVe au XIXe siècle) permettant l’industrialisation et l’enrichissement des pays colonisateurs mais aussi la naissance de nouvelles expressions culturelles, notamment musicales, telles le jazz, le blues, la soul, le R&B, le reggae, le hip hop, le tango, la salsa ou la capoeira. Cette décennie a été proclamée en 2013, en conséquence du travail de sensibilisation réalisé dans le cadre du projet « La Route de l’esclave ». Le Congo pour sa part a initié un travail de reconnaissance au patrimoine culturel mondial du Port de Loango, situé dans le Kouilou, d’où ont été embarqués plus de deux millions de personnes vers le Brésil, le Venezuela, la Colombie, le sud-est des États-Unis (Louisiane et Virginie), Saint-Domingue et Cuba où l’on retrouve encore des traces culturelles et linguistiques de l’aire géographique Kongo. Il s’agissait du plus grand port négrier du golfe de Guinée dont subsiste aujourd’hui entre autres, les trois manguiers, le grand marché, le débarcadère et l’arbre devant lequel les esclaves en partance étaient soumis au rituel de l’oubli. Une Cité africaine des arts et de la mémoire (Citam), un mémorial de l’esclavage, un musée avec des collections d’art traditionnel et contemporain africain, une bibliothèque et un centre de documentation consacré à l’histoire de l’Afrique seront construits grâce à l’implication de l’Unesco sur ce site chargé d’histoire. Ce projet sera réalisé en partenariat avec les musées de Gorée (Sénégal) et Ouidah (Bénin), autres grands lieux d’embarquement des esclaves vers le nouveau monde. RMB Marie Alfred Ngoma Légendes et crédits photo :Photo 1 : Jean-Marie Adoua, ambassadeur du Congo auprès de l'UNESCO
Photo 2 : Irina Bokova, directrice de l'UNESCO s'apprêtant à lâcher une colombe lors du 20ème anniversaire du projet La Route de l'esclave
Photo 3 : Jean-Marie Adoua et Lilian Thuram à l'issue du lâcher symbolique des colombes lors du 20ème anniversaire du projet La Route de l'esclave |