Secteur social: des efforts consentis malgré la crise économique

Lundi 2 Janvier 2017 - 15:52

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En 2016, hormis la régularité dans le paiement des salaires des fonctionnaires et agents de l'Etat,  la situation sociale de manière globale n'a pas été des plus brillantes au Congo. Quelques remous ont été observés ici et là. C'est le cas de l'Université Marien-Ngouabi où, étudiants et enseignants se sont succédés dans les mouvements de grèves. Certaines couches sociales ont fait l'objet de préjudices ( rupture des ARV pour les malades du VIH/Sida) et la non-tenue à terme échu des élections professionnelles. La situation sécuritaire dans le Pool est venue enfoncée le couteau dans la plaie des Congolais qui, malgré la crise économique de ces derniers temps, commençaient à respirer un air de paix que quiconque ne peux contester. Une autre  note peu gaie à épingler dans ce volet social en 2016, le déroulement du projet Lissungui, initié par le gouvernement et la Banque mondiale en faveur des personnes  vulnérables qui, en dépit de la conjoncture économique difficile fait son petit chemin.

Université Marien- Ngouabi : 2016, une année à oublier

Jalonnée par des grèves à répétition des travailleurs et étudiants, l’année 2016 a été difficile pour le gouvernement.

Les travailleurs réclamaient la mise à la disposition de cet établissement de la totalité des subventions des 2e et 3e trimestres de l’année 2015 afin, disaient-ils, de permettre à l’université Marien-Ngouabi de préparer sereinement la rentrée académique 2016-2017.

Pour leur part, les étudiants revendiquaient le paiement des arriérés de bourses. Ils déploraient, par ailleurs, entre autres, les imperfections dans le traitement des requêtes des retardataires réclamants ; la déchéance du délai de paiement de la bourse. Pour marquer leur mécontentement, certains étudiants ont érigé parfois des barricades à l’entrée de leurs établissements. Ces grèves à répétition ont eu pour conséquence le retard dans l’organisation des évaluations du dernier trimestre. Le troisième trimestre a été payé en fin d’année alors que le 4e et dernier de l’année reste impayé. Chose qui n’était plus arrivée depuis plus d’une décennie. Cela se justifie sans nul doute par la crise ou la récession économique que le pays connaît depuis la baisse du prix du baril de pétrole.

Une rumeur sur la suspension ou la suppression de la bourse

Un autre fait marquant de l’année a été la rumeur qui faisait état d’une éventuelle suspension ou suppression de la bourse des étudiants. Intox, désinformation totale et manipulation selon le ministre de l’Enseignement supérieur. « J’insiste, il n’y aura rien. Ni suspension ni suppression ni réduction de moitié, tout cela est de la simple manipulation. Donc je demande aux étudiants de ne pas tenir compte de cela.  Au contraire, nous essayons d’augmenter le nombre de bourses attribuées. Aujourd’hui, nous attribuons environ 16 000 en termes de bourses nationales auxquelles s’ajoutent celles de la coopération », rassurait Bruno Jean Richard Itoua.

Santé publique : 27 formations sanitaires jugées illégales fermées à Brazzaville et Pointe-Noire

Le ministère de la Santé et de la population a lancé en septembre dernier, en partenariat avec les autorités municipales, l’opération de fermeture des formations sanitaires illégales en République du Congo. Selon le bilan provisoire fait le 22 décembre à Brazzaville par l’Inspection générale de la santé, 27 formations sanitaires privées illégales sont définitivement ou temporairement fermées.

Les principaux motifs étant la non- observation des conditions d’implantation et d’ouverture des formations sanitaires ainsi que celles d’exercice libérale de la médecine au Congo. A Brazzaville, sur 19 établissements convoqués, douze ont été fermés, appartenant en majorité aux étrangers. A Pointe-Noire, quinze formations sanitaires sur 31 sont fermées, la plupart appartenant aux Congolais n'ayant pas d'autorisation d’ouverture. Pour parvenir à ces décisions, l’inspection générale s’est basée sur deux conditions, à savoir être de nationalité congolaise et avoir un diplôme légal, reconnu au Congo.

Pour rappel, d’après des études, le secteur privé congolais représente environ 56% d’offre de soins contre 44% pour le public. S’agissant de Brazzaville, il y a 43 structures publiques pour 385 formations sanitaires privées.

Rupture des ARV : une dure épreuve pour les malades du VIH/Sida

La rupture répétée des antirétroviraux (ARV) menace la vie des personnes vivant avec le VIH/Sida. Les Organisations non gouvernementales (ONG) ont tiré la sonnette d’alarme.

Dans les structures spécialisées comme les Centres de traitements ambulatoires de Brazzaville et à la Centrale d’achats de médicaments génériques et essentiels en lieu et place de la Congolaise des médicaments essentiels et génériques (Comeg), il y a soit rupture des stocks de produits de première ligne, de deuxième et parfois même de troisième ligne.

Donc, la prise des différentes combinaisons thérapeutiques par les malades du VIH-Sida, selon les charges virales, n’est plus respectée faute de certaines molécules. Les associations de malades dénoncent quelques décès sous silence par manque de traitement. Et, les malades se contentent d’une bithérapie au lieu de la trithérapie que requiert le traitement antirétroviral.

L’absence d’une de ces molécules entraine pour les patients l’interruption brutale du traitement. Pour les patients déjà sous traitement, ces interruptions ou la prise de moindres doses peuvent conduire à un échec thérapeutique et à un risque plus élevé de développement de la résistance.

Par contre, chez les personnes nouvellement infectées, le traitement ne doit pas être suspendu ou retardé parce que le virus peut développer une résistance.

Au Congo le nombre de personnes touchées par l'infection est compris entre 80 000 et 100 000 selon la Fécodho, avec une tendance à la féminisation de la pandémie. En effet, dans une lettre ouverte adressée le 7 septembre 2016 à la ministre de la Santé et de la population, la Fédération congolaise des droits de l’Homme (Fécodho), que dirige Céphas Germain Ewangui, déplorait la rupture des ARV au Congo.

« …La situation du VIH/sida au Congo est préoccupante avec plus de 100.000 personnes infectées ; que la rupture des ARV provoque inéluctablement des résistances organiques ; entraine la dégradation de la prise en charge des patients ; provoque l’effondrement du système immunitaire et entraine la résurgence et le développement des maladies opportunistes et des décès en cascade », peut-on lire dans cette lettre.

Selon le Renapc, le Congo-Brazzaville compte à ce jour 38.500 personnes séropositives éligibles aux antirétroviraux, dont 17.884 adultes et 452 enfants qui sont sous traitement actuellement. Ils sont pris en charge dans 56 sites sur les 77 prévus.

Une étude menée par le Conseil national de lutte contre le sida au Congo (CNLS)indique que l'infection VIH est actuellement dans une « phase d'implosion ». Le taux de prévalence national est estimé à 4,2 % avec des disparités d'une ville à l'autre : Brazzaville : 3,3%, Pointe-Noire : 9,4 %, Ouesso : 5,0 % et Dolisie : 10,3 %.

De fermes assurances

La plupart des experts du ministère de la Santé renseignent sur les accords avec le laboratoire Cipla, géant indien de fabrication des médicaments génériques, qui renoue avec le Congo dans la fourniture des ARV. Depuis quelques jours, un stock de médicaments ARV est arrivé à Brazzaville. Même si la quantité de la commande n’est pas dévoilée, les experts du ministère de la Santé rassurent que désormais on ne parlera plus de rupture.

Les ruptures intempestives de médicaments ces dernières années seraient provoquées, souligne-t-on, entre autres, par le désaccord entre le Congo et le laboratoire indien qui revendiquait une importante dette d’environ 800 millions de FCFA auprès de l’État congolais. Durant ces dernières années, les commandes des médicaments ARV passaient ainsi par plusieurs intermédiaires, avec plusieurs conséquences dont la surenchère des sociétés relais et surtout des acquisitions en ARV.

Travail : les élections professionnelles reportées sine die

La tradition des élections professionnelles dans les entreprises et établissements régis par le code du travail, n’a pas été respectée en 2016.

Dans un protocole d’accord signé le 22 novembre à Brazzaville entre le gouvernement et les partenaires sociaux, les deux parties ont convenu que les délégués du personnel élus en décembre 2013, dont le mandat a été prorogé par la lettre circulaire du 25 janvier 2016, demeurent en fonction dans les entreprises et établissements installés en République du Congo, jusqu’aux prochaines élections professionnelles.

Pour le ministère du Travail et les partenaires sociaux, les conditions objectives du déroulement de ces élections sont fortement affectées par la persistance de plusieurs faits conjugués. Il s’agit notamment de la désorganisation des entreprises évoluant dans le secteur formel du fait de la dégradation continue du marché pétrolier et les pertes massives d’emplois enregistrées dans les différents secteurs de l’économie nationale altérant de manière significative la représentativité syndicale.

Projet Lisungi : une aide financière aux personnes vulnérables

Le Congo a lancé en 2014, en partenariat avec la Banque mondiale, un système  des filets sociaux dénommé « Lisungi », en vue d’améliorer les conditions de vie des populations par les services sociaux de base dans le domaine de la santé et de l’éducation.

S’inscrivant dans le cadre de la protection sociale non contributive, le projet « Lisungi » vise, entre autres, à réduire les inégalités en procédant à des transferts sociaux monétaires ou en nature aux personnes et familles très pauvres. Leur permettant ainsi de devenir des membres productifs de la société.

Le système a touché dans sa phase expérimentale plus de 5000 ménages à Brazzaville et dans les départements. En effet, dans la ville capitale, cette phase pilote a concerné quatre arrondissements : Makélékélé ; Bacongo ; Moungali et Talangaï.  Dans ces quatre arrondissements, le projet a ciblé 3200 ménages très pauvres qui jusqu’ici n’ont pas encore reçu leurs allocations du premier trimestre 2016. A Pointe-Noire, seul Mvou-Mvou a été ciblé par le projet pour 254 ménages pauvres bénéficiaires. Le coût global dans cette ville s’élève à 19,5 millions FCFA. Dans la Cuvette les villes d'Oyo et Makoua et leurs villages environnants ont 623 ménages éligibles avec un montant de 43,5 millions FCFA.  

D’après les clauses de la convention, ces transferts monétaires aux ménages pauvres devraient être assurés chaque trimestre par la Banque postale du Congo, une institution qui ne se limite pas seulement à la mise en place d’un système d’information de Lisungi ou au paiement des bénéficiaires, a expliqué le directeur de cette Banque, Calixte Tabangoli. « La Banque a pour rôle également de développer les produits bancaires adaptés parce que les ménages éligibles à ce projet n’ont pas vocation à demeurer pauvres. C’est à ce titre que les équipes du ministère des Affaires sociales et celles de la Banque postale du Congo travaillent ensemble pour assurer aux ménages un accompagnement visant à développer une culture de l’épargne et l’accès à la forme de micro crédit encadré », déclarait-il.

Selon le rapport sur l’exécution budgétaire du projet mis en œuvre par le Congo et la Banque mondiale le 30 novembre 2015, présenté en janvier 2016, à l’occasion de la deuxième session ordinaire du Comité d’orientation stratégique, le projet avait connu des difficultés dans sa mise en œuvre. Sur une somme de 3,871 milliards FCFA, prévue pour l’année 2014, seulement environ1,390 milliards FCFA a été décaissé, soit un taux d’exécution de 35,92%.

La Banque mondiale et l’AFD contribuent à l’extension du projet

En 2016, les Fonds additionnels de plus de 5 milliards FCFA de la Banque mondiale et de plus de 6 milliards FCFA de l’Agence française de développement (AFD) ont permis l’extension du projet dans les arrondissements : Mfilou, Madibou et Djiri à Brazzaville ; Loandjili à Pointe-Noire. Ces quartiers n’étaient pas encore concernés par le projet Lisungi. 

 Pour le représentant de la Banque mondiale au Congo, Djibrilla Issa, son institution s’est engagée à apporter un financement additionnel afin d’augmenter la couverture actuelle et étendre les activités du projet : « Aujourd’hui, nous avons un certain nombre de familles qui en bénéficient, il faudrait que nous passions à l’échelle supéieure pour que d’autres villes ; quartiers et familles puissent en bénéficier également», indiquait-il lors d’un point de presse co-animé en septembre avec la ministre des Affaires sociales, de la solidarité et de l’action humanitaire, Antoinette Dinga Dzondo.

Pour rappel, la première phase a concerné les transferts monétaires conditionnels pour favoriser l’accès à l’éducation et à la santé. Le financement additionnel permettra quant à lui, aux différents bénéficiaires de participer à d’autres activités génératrices de revenus.  La Banque mondiale a ainsi constaté que 24% des ménages ou personnes ayant bénéficié des transferts monétaires ont déjà initié des activités commerciales ou acheté des équipements agricoles pour faire la production agricole. 

Le financement de l’AFD vise la prise en charge monétaire de 5.305 ménages dont 3.503 hétéroclites et 1.204 personnes âgées. Ces ménages sont repartis de la manière suivante : 774 ménages et 149 personnes âgées à Mfilou ; 576 ménages et 104 personnes âgées à Djiri ; 456 ménages et 115 personne âgées à Madibou et 1.087 ménages et 170 personnes âgées à Loandjili. Le directeur de l’AFD, Stéphane Madaule, a invité le gouvernement du Congo à verser les fonds de la contrepartie afin de permettre au projet Lisungi d’atteindre ses objectifs. « L’AFD avec 8 millions d’euros contribue largement au plan de financement de cette opération », indiquait-il. 

L’identification et la sélection de ces bénéficiaires ont été confiées à l’Institut national de la statistique. Le Fonds des Nations unies pour l’enfance s’est occupé de la formation des agents sociaux sur le suivi des conditionnalités par les ménages et la promotion du registre social unifié. 

La ministre des Affaires sociales, de l’action humanitaire et de la solidarité, Antoinette Dinga Dzondo, rappelait, quant à elle, que les premières bénéficiaires étaient des populations les plus pauvres dont les dépenses par tête se situe sous le seuil de pauvreté alimentaire de 16.9 millions FCFA par mois.

Quelques témoignages des bénéficiaires du projet- Lisungi

Le projet contribue tant soi peu aux activités génératrices de revenus des bénéficiaires. Pour Simone Loemba, le projet lui a permis d’investir dans la restauration. « C’est une grande joie de ma part de toucher encore cet argent. Je suis à ma quatrième paie, aujourd’hui j’ai tout retiré afin de renforcer mon restaurant et subvenir aux besoins des petits fils ».

Une autre qui exerce dans la vente de friperie : « je suis une veuve avec beaucoup d’enfants. Grâce à cet argent qui m’est destiné déjà pour la quatrième fois, je prends soins d’eux et j’exerce le commerce de la friperie ».

Sécurité : lourd bilan des violences dans le Pool

Depuis 9 mois, le département du Pool, voisine de Brazzaville, a sombré dans les violences aux conséquences multiples malgré les efforts déployés par les autorités politico-militaires en vue de ramener la paix dans cette partie.

Selon le Premier ministre Clément Mouamba, le bilan enregistré depuis le début des actions terroristes perpétrées par les miliciens ninjas dans le Pool, à ce jour, s’élève à près d’une centaine de morts : de nombreuses personnes déplacées, des écoles détruites, des camions brûlés, des ponts détruits, ainsi que des colossales sommes d’argent engagées par le gouvernement pour le convoyage des trains transportant des marchandises de Loutété à Brazzaville. Cependant, au regard de la dangerosité du problème, la situation qui prévaut pourrait influencer de façon négative l’économie nationale.

S’expliquant tout récemment devant la représentation nationale, le Premier ministre, Clément Mouamba, a indiqué que le gouvernement ferait à ce que la situation sécuritaire dans le Pool revienne à la normale dans les plus courts délais.

P. W. Douniama, Fortuné Ibara, L.Gisèle OKO et Guillaume Ondzé

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