Quand la diaspora s’interroge sur le bien-fondé des ambassades

Mercredi 5 Février 2014 - 20:00

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Le Mouvement des Africains à Rome conduit un sondage dans la diaspora pour voir si autant d’ambassades africaines dans le monde n’est pas un luxe !

Poser la question, c’est déjà y répondre en quelque sorte, mais le Mouvement des Africains de Rome veut savoir si, compte tenu de leurs coûts exorbitants, un nombre aussi important d’ambassades africaines se justifie. Gaoussou Ouattara, président de cette organisation, souhaite rassembler patiemment les opinions et, dans un avenir proche, tenir une conférence sur le sujet, où viendraient notamment des ambassadeurs et des diplomates pour donner leur point de vue sur une question aussi polémique.

L’idée n’est pas d’aller vers la fermeture des ambassades, mais d’interpeller les représentations diplomatiques sur, au moins, deux de leurs missions : représenter effectivement les citoyens africains à l’étranger et faire jouer à la diaspora africaine le rôle qui lui est reconnu dans les tablettes de l’Union africaine. L’Ivoirien Gaoussou Ouattara part d’un constat : de trop nombreux ressortissants africains sont jetés en prison pour des motifs les plus divers ou sont même tués sans que leur dossier judiciaire connaisse une quelconque accélération du fait d’une intervention diplomatique.

L’affaire dite Amanda Knox, qui (re)défraie la chronique en ce moment en Italie, est, soutient-il, très emblématique de l’isolement du citoyen africain à l’étranger. Rappel. Le 1er novembre 2007, Meredith Kercher, une étudiante britannique était assassinée dans sa chambre à Pérouse, en Ombrie. Dans la ville italienne, elle partageait son logement avec Amanda Knox, étudiante américaine dont le petit-ami, Raffaele Sollecito, est Italien. Un autre ami du groupe impliqué est Rudy Guédé, Ivoirien. Tous trois seront rapidement des enquêtes et de l’accusation.

Entre condamnations en première instance, relaxes, pourvois en cassation et renvois en justice, cette affaire a passionné les médias dans trois pays : l’Italie, la Grande-Bretagne et les États-Unis. Un silence assourdissant est venu de la Côte d’Ivoire, c’est-à-dire le pays d’origine de l’unique condamné en définitive dans cette affaire, Rudy Guédé. Car même la mise hors de cause du Congolais de RDC, Patrick Lumumba, un instant soupçonné, ne suscitera aucune intervention diplomatique connue, ne serait-ce que pour l’aider à obtenir une compensation financière plus conséquente que ce qui lui fut versé !

Le Mouvement des Africains s’est organisé pour manifester son soutien à Guédé et tenter d’intéresser à son sort y compris l’Union africaine, sans résultat. C’est de là, notamment, qu’est partie l’idée du sondage, explique Gaoussou Ouattara. « Notre idée n’est pas que les ambassadeurs aillent porter des oranges à tous les criminels africains qui croupissent en prison en Europe, mais de manifester la présence et le poids de nos représentations. Les ambassades coûtent cher à nos États en frais divers : les nations riches qui ont une ambassade dans chaque nation ne pourraient-elles pas jouer la solidarité africaine ? Notre organisation est bien une “Union” africaine, non ? »

Au sein de la diaspora consultée, il y a les pour et les contre, bien entendu. Lorsque les résultats du sondage seront publiés, il sera intéressant de voir dans quelles proportions ceux-ci se quantifient. Et surtout, quelles propositions alternatives les Africains de l’étranger offrent vu qu’ils ont le choix de cocher : fermer toutes les ambassades dans le monde ; les regrouper par région ; ne maintenir qu’une seule ambassade de l’Union africaine par pays (occidental) ; ériger la diaspora en représentation de l’Union africaine, ou bien créer une représentation virtuelle !

Lucien Mpama