Mohamed Abbou : « le Maroc veut un partenariat efficace, performant et crédible avec le Congo»

Jeudi 25 Septembre 2014 - 20:15

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85 chefs d’entreprises marocains du secteur de l’électricité sont attendus ce 26 septembre au Congo. Deux semaines avant, le 11 septembre à Rabat, le  ministre marocain du Commerce extérieur présentait les enjeux de cette mission qui intègre l’opération d’affaire Action Lumière.  Interview.

Les Dépêches de Brazzaville : Quelles sont les motivations du gouvernement marocain en soutenant la mission d’affaires Action Lumière ?

Mohamed Abbou : Depuis son accession au trône, Sa Majesté Mohamed VI, que Dieu l’assiste, avait programmé des visites dans plusieurs pays en Afrique. La toute dernière a duré 21 jours. Il s’est rendu dans quatre pays et à cette occasion il y a eu signature de plus de 90 accords commerciaux et économiques. Juste après son retour au pays, dans les deux semaines suivantes, tous les accords internationaux étaient ratifiés par le gouvernement. Le roi a multiplié ce genre de visites pour mettre sur les rails et consolider une nouvelle ère de partenariat stratégique. Pour le Maroc, la coopération avec l’Afrique est au centre. Avec tous les pays, notamment le Congo, le Gabon et le Burkina Faso (pays visés par cette mission), il y a plusieurs accords de coopération qui ont été signés, portant entre autres sur les investissements, le commerce, le tourisme, la pêche, l’aéronautique, la protection de l’environnement, l’agriculture, la pêche, la formation, les BTP, la construction…

LDB : Qu’est-ce qu’on peut attendre, plus concrètement, de ces rencontres entre la partie marocaine et les partenaires africains ?

MA : Je pense qu’au cours de cette tournée il va avoir des signatures de conventions entre des institutions, des organismes…, dans le domaine de l’électricité, notamment. Je vous rappelle aussi l’initiative royale envers l’Afrique ; elle consiste en un accès privilégié des produits de ces pays au marché marocain et en l’annulation de leur dette. Tout cela va dans le sens d’un développement de la coopération sud-sud, il s’agit de placer l’Afrique au cœur de la vision stratégique du Maroc. Dans un discours récent à la nation, le roi Mohamed VI a interpellé tous les pays africains à redéfinir les piliers de la coopération sud-sud. Si hier elle était basée sur la confiance et les liens historiques, aujourd’hui elle doit être fondée sur l’efficacité, la performance et la crédibilité ; cela est très important.

LDB : Parlant des secteurs de l’électricité, de l’électronique et des énergies renouvelables ciblés par l’opération Action Lumière. Qu’est-ce que le Maroc a à partager avec ses partenaires africains au sud du Sahara en ces domaines ?

MA : Depuis une dizaine d’années, le Maroc a opté pour une politique des stratégies sectorielles. Après le plan Emergence 1, Emergence 2 vient d’être lancé. Il permet au pays de passer à une vitesse supérieure dans les domaines tels que l’industrie automobile, l’aéronautique, la pêche où par exemple les produits marocains de la mer représentent 4% des exportations mondiales. Les secteurs de l’énergie et de l’électronique se sont développés très vite aussi. Même si la facture énergétique représente 50% de notre déficit, car 96% de nos besoins en énergie sont importés et les 4% produits au Maroc sont issues des énergies propres (hydraulique, éolienne et solaire). La politique sectorielle énergique prévoit, à l’horizon 2020, la couverture de 42% de besoins grâce à l’énergie solaire. La politique mise en œuvre a permis d’atteindre un taux de couverture de 96% et d’acquérir une grande expérience, de développer des concepts tels que l’économie d’énergie, etc. Fort ce cela, le Maroc peut par exemple aider ses partenaires africains qui, à l’instar du Congo, disposent de potentialités énergétiques, à mieux les gérer.

LDB : Vous confirmez que la mission est composée essentiellement d’acteurs privés ? Qu’apportent-ils au Congo ?

MA : Justement, les 85 chefs d’entreprises marocains qui arrivent dans le cadre de l’Action Lumière sont porteurs de projets de partenariat, parce que notre vision c’est d’aller investir, faire le codéveloppement. Les relations gagnant-gagnant, le transfert de l’expertise, voilà des choses qui nous intéressent, et tout le monde au sein du gouvernement marocain a souhaité que je dirige cette mission organisée par le Centre marocain du commerce extérieur (Maroc-Export), en partenariat avec la Fédération nationale de l’électricité, de l’électronique et des énergies renouvelables.

LDB : Pourquoi avoir choisi le Burkina Faso, le Gabon et le Congo pour cette opération ?

MA : C’est la question que je me posais moi-même. Il y a un travail de prospection réalisé avec les fédérations et associations professionnelles concernées, et ce sont elles-mêmes, donc des acteurs du secteur privé, qui ont défini ces choix. Ils ont été ensuite entérinés par Maroc-Export et le ministère n’a fait que valider. Puis, conformément à la politique mise en place, l’Etat marocain l’accompagne, en apportant sa part de financement à l’opération. C’est un partenariat public-privé qui permet aussi de rassurer nos partenaires.

L’électricité : un secteur porteur au Congo, selon Karim Messaoud

Directeur des opérations au Comptoir d’électricité du Congo (Celec), Karim Messaoud est l’un des rares investisseurs marocains dans ce secteur au Congo. Réagissant à l’arrivée de la mission Action Lumière, il apprécie l’initiative et livre, en trois points, la substance de sa petite expérience sur le marché congolais.

  • Nous sommes contents de voir que le Maroc et le Congo arrivent à ce niveau des échanges dans leurs relations bilatérales. Cela va certainement apporter un plus, aux plans technique et technologique, vue l’avancée du secteur de l’électricité au Maroc. En tant que société congolaise, nous attendons que ces rencontres débouchent sur de nouveaux accords, en premier lieu peut-être un allègement douanier pour aider et privilégier les échanges. En deuxième lieu, nous souhaitons que les hommes d’affaires marocains proposent des partenariats honnêtes et à long terme. Parce qu’il est important d’investir dans la durée.

 

  • J’aimerais bien que ces promoteurs marocains le sachent, le Congo est un marché très porteur et nous voulons qu’ils investissent ici. Ce pays est l’un des plus d’émergent d’Afrique centrale, vu ce qui se passe, avec tout le développement en cours et les planifications qui ont commencé à se concrétiser, il y a un grand intérêt à investir, apporter la technologie, former les gens, apporter un accompagnement concret. Car, ne l’oublions pas, le futur c’est l’Afrique.

 

  • Le Celec fait partie d’un grand groupe international qui existe au Congo depuis 13 ans, mais la branche électricité n’existe que depuis deux ans. Nous cherchons du matériel  de qualité partout à travers le monde, mais la plus grosse part vient du Maroc et distribuons à une clientèle congolaise (la Société nationale d’électricité, le gouvernement et des privés) de plus en plus nombreuse. Par ailleurs nous formons des électriciens et artisans électriciens, avec l’aide de nos fournisseurs. De même, le Celec dispose d’ingénieurs qui réalisent des études de faisabilité et aident à conseiller et accompagner ses clients. Parce que de la qualité des électriciens et du matériel choisi dépend le développement d’infrastructures fiables. Nous sommes dans une vision durable, avec bientôt l’ouverture de nos agences à Pointe-Noire et Kinshasa.

 

 

 

Thierry Noungou

Légendes et crédits photo : 

1- Mohamed Abbou, ministre marocain délégué au Commerce extérieur. Photo Adiac. 2- Karim Messaoud, directeur des opérations de Célec.