Interview. Michel Ingele : « Mon livre est une sonnette d’alarme sur les vices qui corrompent notre mentalité de Kinois »Samedi 27 Janvier 2018 - 15:03 Psychologue de formation et fourbi d’expérience dans le domaine de l’éducation avant d’œuvrer pendant vingt ans dans le secteur privé comme directeur des ressources humaines dans quelques entreprises, Michel Ingele Ngonga s’est lancé depuis peu dans l’écriture. Consultant indépendant en gestion des ressources humaines et en organisation du travail, il se consacre à partager son expérience professionnelle à travers le livre. Le Courrier de Kinshasa s’est intéressé à son premier ouvrage, « Les Kinoiseries. Valeurs ou antivaleurs culturelles », publié aux éditions Feu Torrent. L’auteur a voulu accorder cette interview exclusive pour parler de son appréhension de la question posée par l’ouvrage et aussi annoncer ses prochaines livraisons. Le Courrier de Kinshasa ( L.C.K.): Vous venez de publier votre premier essai. Y a-t-il des raisons profondes de s’attarder sur ce questionnement de "Kinoiseries, valeurs ou antivaleurs culturelles" ? Michel Ingele Ngonga (M.I.N.) : Mon livre est une sonnette d’alarme sur les vices qui corrompent notre mentalité de Kinois, afin que nous prenions conscience de tous ces défauts. Car une prise de conscience constituera déjà, à mon sens, le début d’un processus alchimique pouvant nous amener à transmuter nos antivaleurs en des valeurs nobles, en des qualités humaines vertueuses nécessaires pour le développement de notre communauté et, partant, de notre pays. C’est aussi une manière pour moi d’apporter ma contribution à l’édification d’un Congo plus beau qu’avant, devoir patriotique qui nous est rappelé dans notre hymne national. L.C.K. : C’est une grosse problématique morale et même des mœurs que vous abordez dans ce livre. M.I.N. : En effet, c’est une problématique socioculturelle qui a plusieurs facettes, en l’occurrence l’éducation, l’instruction, la morale, l’éthique, etc., et qui se cristallise autour de notre mentalité. L.C.K : Comment pouvez-vous décrire aujourd’hui la ville de Kinshasa dans l’ensemble ? Que représente-t-elle sur le plan philosophique, démographique, sociologique, anthropologique, etc. ? M.I.N. : La ville de Kinshasa est aujourd’hui une mosaïque culturelle congolaise dans laquelle se côtoient le modernisme et la tradition, mais aussi une ville cosmopolite qui reçoit des échantillons d’autres civilisations. Et comme vous le savez, Kinshasa est le siège des hautes institutions tant sociales et culturelles qu’économiques et politico-administratives. À ce titre et en dépit d’une décentralisation en gestation, le développement du pays n’est encore impulsé, planifié et orienté qu’à partir de la capitale. Kinshasa est donc le miroir qui reflète l’image du pays. C’est ainsi que tous les artefacts comme toutes les valeurs qui se manifestent dans la conduite des Kinois se répercutent nécessairement à travers le pays. C’est pourquoi il est indispensable de prêter attention aux comportements et aux mœurs qui caractérisent la mentalité kinoise. L.C.K. : Vous n’avez pas directement parlé de la politique dans l’ouvrage. C’est expressément escamoté ou vous avez pensé que la politique ne fait pas partie de ces valeurs ou antivaleurs kinoises ? M.I.N. : La problématique sur les valeurs et antivaleurs culturelles est un fait sociétal qui n’est pas spécifiquement politique, au sens populaire que nous attribuons à ce terme. Au contraire, nous sommes tous impliqués en tant que membres de la communauté, chacun dans son agir sous-tendu par son bagage éducationnel, culturel, moral et émotionnel. Il n’y a donc pas d’escamotage quelconque. L.C.K. : Le pays traverse une crise politique particulière. Un mot de l’écrivain que vous êtes, qui est un peintre et observateur singulier de la société ou de la communauté dans laquelle il vit. M.I.N. : Une crise politique est une crise comme toutes les autres auxquelles les humains ont souvent eu à faire face à travers le monde au cours des siècles. Il n’y a donc pas lieu de se décourager. Cependant, et puisque vous tenez à savoir mon avis, je vous dirais que la solution de cette crise se trouve dans la justesse du diagnostic, de la volonté politique et dans la maîtrise de notre égo. L.C.K. : Vous vous lancez dans le domaine du livre. Pensez-vous que le Congolais, le Kinois en particulier qui semble projeter l’image d’un viveur ou jouisseur s’intéresse vraiment à la lecture ? M.I.N : Je n’adhère pas totalement à la thèse selon laquelle les Congolais ou les Kinois n’ont pas la culture de la lecture. C’est comme qui dirait qu’il n’existe pas d’écoles, d’universités, de librairies et de bibliothèques au Congo. Pourtant, dans ce domaine, on observe même une certaine particularité à Kinshasa, celle d’y trouver une sorte de bibliothèque à ciel ouvert et des librairies ambulantes. Qui a déjà procédé à une étude avec statistiques à l’appui pour démontrer qu’effectivement les Congolais ne lisent pas ? Je reconnais toutefois qu’il existe quelques pesanteurs en la matière, mais cela ne veut absolument pas dire que les Congolais ne lisent pas. À mon sens, le livre n’a vraiment pas de frontières géographiques, ni d’ailleurs celles du temps. Je veux dire que les écrivains ne s’adressent pas uniquement à leurs compatriotes, leurs œuvres étant également lues à l’extérieur de leur pays. De même, il n’y a pas que la présente génération qui exploite les messages véhiculés par les œuvres littéraires. Les futures générations s’en serviront à leur tour, selon leurs besoins. Je ne pense pas non plus que les jouissances soient l’apanage de seuls Kinois, comme vous semblez le dire. Car, dans la plupart des mégapoles du monde, on rencontre une couche de la population qui est attachée aux jouissances mais aussi une autre couche qui est consciente et soucieuse de ses devoirs et obligations sociales, familiales, professionnelles, etc. L.C.K. : Vous avez deux autres ouvrages en chantier en ce moment. Pouvez-vous nous en parler brièvement ? M.I.N. : Mes prochaines parutions vont porter d’abord sur la problématique de l’épanouissement socioéconomique des travailleurs en RD-Congo et ensuite sur un autre fait de société, à savoir la superstition. Dans le premier ouvrage, je recherche une corrélation entre la qualité de vie des travailleurs et quelques variables que je considère comme étant des pesanteurs sur cet épanouissement. Dans le second, il sera question d’attirer l’attention sur les ravages de la superstition dans notre société. L.C.K. : Votre dernier mot ? M.I.N.: L’opuscule que je viens de publier est une exaltation à la vertu et un appel à une prise de conscience de nos vices dans le but de les combattre. J’exhorte donc les lecteurs de tous les horizons à se procurer ce livre qui nous invite à faire de la perfection notre idéal. Mon mot de la fin sera celui de vous remercier très sincèrement ainsi que votre organe de presse pour vous être intéressés à mon ouvrage. Martin Enyimo Légendes et crédits photo :Michel Ingele Ngonga Notification:Non |