Géologie : l'Afrique en train de se scinder en deux

Samedi 31 Mars 2018 - 12:30

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Un phénomène est en train de diviser le continent au niveau de la vallée du grand Rift qui traverse ses pays du sud-est. Les scientifiques s’y attendent depuis des années, apprend-on. Mais des événements récents laissent penser que les choses s’accélèrent.

Les pluies torrentielles que connaît le Kenya, depuis le 16 mars, et leur violence inhabituelle en sont la cause. Elles ont fait au moins seize morts suite à des inondations et des glissements de terrains. Elles ont également provoqué d’importants affaiblissements de route, des failles et fissures, notamment dans la vallée du grand Rift traversant la Corne de l’Afrique jusqu’au Mozambique. A cause de secousses sismiques et des glissements de terrains d’une puissante activité géologique connue depuis longtemps des géologues internationaux, la zone a été considérablement fragilisée.

Un nouveau continent en Afrique dans 50 millions d’années

Pour les scientifiques, l’Afrique sera un nouveau continent dans cinquante millions d’années. « Ils savent depuis plusieurs années déjà que la plaque tectonique africaine se sépare de la plaque somalienne au niveau de la vallée du grand Rift, un phénomène géologique qui s’étend de la mer Rouge au Zambèze, sur plus de 6 000 km et 40 à 60 km de largeur », affirme David Adede, un géologue cité par le journal britannique, "The Independent".

Ainsi, quatre pays de la Corne d’Afrique (la Somalie, la moitié de l’Éthiopie, du Kenya et de la Tanzanie) devraient se séparer de l’Afrique pour former un nouveau continent dans environ cinquante millions d’années, selon les scientifiques. Ils prévoient l’apparition d’un nouvel océan qui séparera les deux rives.

Septembre 2005 : apparition d’une fissure géante entre l’Ethiopie et l’Erythrée

Une fissure géante s’étendant sur près de 60 km de long, entre 2 et 12 km de profondeur et d’un écartement d’environ cinq mètres, au nord de l’Afar entre l’Ethiopie et l’Erythrée est apparue en septembre 2005. Selon certaines estimations, environ 2 km³ de magma basaltique se sont injectés dans cette fissure, en même temps qu’une série de séismes et une éruption sur le flanc du Dabbahu, un volcan culminant à 1442 m.  Interrogé en 2009 par "le Figaro", Eric Jacques, directeur adjoint de l’Institut de physique du globe de Paris, estimait que « cet épisode d’ouverture de l’automne 2005 marque, sans doute, l’instant zéro de l’ouverture d’un océan dans cette partie du monde ».

S’il pense que dans un million d’années, la dépression de l’Afar se sera ouverte de 30 km supplémentaires, Eric Jacques ajoute toutefois que, « l’on ne connaît pas encore toute plomberie », souterraine de cette région qui subit une instabilité politique qui n’aide pas les géologues à s’établir sur place, occasionnant une difficulté supplémentaire à toute projection et prévention de la population locale d’un éventuel danger.

Mary Wambui : vivre dans la vallée du Rift, « c’est courtiser la mort »

« Dans un passé récent, la vallée du Rift, elle, est peut-être restée inactive sur le plan tectonique, mais il pourrait y avoir des mouvements profonds dans la croûte terrestre qui ont donné lieu à des zones de faiblesse qui s’étendent jusqu’à la surface. Ces zones de faiblesse forment des lignes de failles et des fissures qui sont normalement remplies de cendres volcaniques, probablement du mont Longonot voisin. Les pluies n’ont fait qu’aggraver la situation en lavant les cendres, ce qui a fini par exposer les fissures », indique David Adede.

Mary Wambui, 72 ans, estime que « rester vivre ici, c’est courtiser la mort ». Alors qu’elle dinait en famille, la terre s’est soudainement fissurée sous leurs pieds, coupant leur maison en deux. Les déménagements sont réguliers dans la région, à cause des fissures soudaines. Le processus devrait encore prendre quelques dizaines de millions d’années avant qu’un nouvel océan ne divise le continent en deux parties. Mais, localement, la crainte que le phénomène ne s’accélère est très vive.

Des études géologiques complémentaires doivent être menées sur place pour le vérifier et tenter de cartographier les failles qui posent de sérieux problèmes de sécurité (routes, lignes de chemin de fer, ponts, immeubles). 

Noël Ndong

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