Droits humains : des recommandations pour améliorer la situation des veuves au CongoMercredi 14 Octobre 2015 - 19:15 La situation des veuves au Congo a suscité une enquête dont les conclusions ont été présentées le 14 octobre à Brazzaville au cours d'un atelier. L'initiative est du ministère de la Promotion de la femme et de l’intégration de la femme au développement, à travers la Direction générale du centre de recherche, d’Information et de documentation sur la femme (DGCRIDF), en collaboration avec le FNUAP (Fonds des Nations Unies pour la population).
L’enquête menée au mois de juillet dernier dans trois arrondissements de Brazzaville (Bacongo, Moungali et Talangaï) avait pour objectifs spécifiques d’identifier les raisons des rites de veuvage ; d’analyser les effets de ces rites sur les veuves et les enfants, d’évaluer le niveau de connaissance des droits des veuves et de constituer une base de données sur le phénomène. L’étude a concerné un échantillon de 301 femmes en majorité instruites ou croyantes. Parmi elles, 122 ont subi des maltraitances dès l’annonce du décès de leur époux. Ces femmes ont été battues, victimes des injures et privées des repas. Cet atelier a regroupé les points focaux des différents ministères, les confessions religieuses, la société civile, les associations et les organisations non gouvernementales. Les résultats de l’enquête ont été présentés par la directrice générale du Centre de recherche, d’information et de documentation sur la femme, Joséphine Bakindissa-Nsika. Ce que l'enquête a révélé sur le veuvage Il ressort que pendant la période des funérailles 206 femmes ont été soumises à certaines exigences : notamment pleurer sans cesse, garder la tête baissée, dormir à même le sol sur une natte et se nourrir une fois par jour. Outre cela, la veuve devait verser une somme d’argent allant de 100.000 à 400.000 francs CFA à la belle-famille pour enterrer son époux. Elle prend également en charge tous les aspects vestimentaires et le cercueil de son époux décédé. Après l’inhumation, 204 femmes ont continué à être maltraitées notamment à travers le bain de purification, le rasage de la tête et des parties intimes et appelée à rester enfermer dans la maison. 57 femmes sur 301 approuvent ces rites par respect de la tradition. À l’issue de l'atelier, et au regard des résultats de l’enquête, quelques recommandations ont été formulées à l’endroit des pouvoirs publics, de la société civile, des ONG et associations, des confessions religieuses, des partenaires au développement et des femmes qui sont à la fois actrices et victimes. Aux pouvoirs publics par exemple, il a été demandé d’accélérer l’adoption de la loi sur les violences « sexospécifiques », de renforcer le dispositif juridique visant la protection des femmes et la répression des auteurs de ces maltraitances ; de vulgariser le code de la famille ; d’adopter une loi interdisant l’expulsion des veuves du domicile conjugal. Autre recommandation : la Journée internationale des veuves avec des actions de sensibilisation à la prise de conscience dans les églises, les ONG et les administrations. Deux poids, deux mesures Les rites de veuvage revêtent des formes diverses d’un département ou d’un groupe ethnique à un autre. Ils comportent différentes sortes de pratiques imposées par la société à la femme et applicables dès l’annonce du décès du conjoint jusqu’à la fin du deuil. Selon la tradition, les rites de veuvage servent à honorer la mémoire du défunt, et à protéger la veuve de l’esprit de son défunt mari qui erre à la recherche de son épouse. En Afrique, quand c’est la femme qui meurt, le veuf n’a de contraintes que d’enterrer la défunte. Les hommes ne subissent, en général, aucun rite. Ils se font raser la tête, s’abstiennent de rapports sexuels pour quelques jours. Ils sont même encouragés à se remarier au plus vite. Tandis que les veuves, quel que soit le contenu du rite de veuvage, se doivent de le suivre à la lettre pour honorer la mémoire du défunt. Elles sont forcées d'épouser l’un des frères du défunt. En cas de refus, elles se doivent de rester seules le plus longtemps possible. Des voix s’élèvent mais sans porter Depuis 2011, le 23 juin a été déclaré Journée internationale des veuves pour attirer l’attention sur les nombreuses difficultés que connaissent les femmes lorsqu’elles perdent leur mari. Beaucoup de personnes ignorent l’existence de cette journée dont la célébration passe sous silence. « Nulle femme ne devrait perdre son statut, ses moyens de subsistance ou ses biens au décès de son époux. Et pourtant, des millions de veuves sont maltraitées, victimes de discrimination, déshéritées ou indigentes ». Ces propos du Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon, au cours de la journée 2014 des veuves montrent à quel point ce problème de société est devenu un combat planétaire.
Yvette Reine Nzaba Notification:Non |