Centrafrique : qui prendra la tête de l’exécutif après l’intérim assuré par le président du CNT ?

Samedi 11 Janvier 2014 - 14:00

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Après la démission le 10 janvier à N’Djamena, au Tchad, du président de transition, Michel Djotodia, accusé par la communauté internationale de passivité face aux violences intercommunautaires dans son pays, ainsi que du Premier ministre, Nicolas Tiengaye, sous la pression de la Cééac, les jours qui suivent seront consacrés à l’identification d’une personne compétente pouvant présider aux destinées de ce pays

Les tractations pour une telle responsabilité s’annoncent donc très complexes. En attendant de trouver une telle personne, l’intérim doit être assuré comme le prévoit l’article 23 de la charte de la transition par le président du Conseil national de transition, Ferdinand Nguendet. Cela notamment après la constatation de la vacance du pouvoir par la Cour constitutionnelle. En effet, la Constitution provisoire centrafricaine stipule que le président du Parlement de transition assure l’intérim, de quinze jours maximum, le temps d’organiser l’élection d’un nouveau président par le Conseil. Quant au futur président, il doit faire consensus au sein des différentes sensibilités politiques du pays et répondre aux attentes des Centrafricains meurtris par les violences interreligieuses.

Du côté des partenaires internationaux, dont la Cééac et la France qui ne veulent pas s’immiscer dans le choix des dirigeants centrafricains, on encourage plutôt les acteurs de la RCA ou les candidatures à ce poste à se décider rapidement. Dans une déclaration, le Quai-d’Orsay a souligné : « La France, par la voix de Laurent Fabius, a pris acte de cette décision annoncée à l’issue de la réunion de la Cééac à Ndjamena. Il appartient maintenant au Conseil national centrafricain de décider d’une nouvelle équipe dirigeante. Laurent Fabius a souligné que la France était aux côtés des Centrafricains pour les aider à résoudre durablement la crise que connaît ce pays, en application des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. La France n’a aucun rôle dans le processus de désignation (d’une nouvelle équipe dirigeante). Elle ne s’immisce pas. » Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, quant à lui, a souhaité qu’un remplacement de cette équipe se fasse dans « les plus brefs délais », estimant que « le but était d’aller avant la fin de l’année à des élections. » La Charte constitutionnelle de transition précise que « les candidatures suscitées feront l’objet d’une large consultation entre les forces vives de la nation ». Pourtant, les observateurs de la situation en RCA, avancent qu’aucune personnalité ne semble s’imposer à l’heure actuelle.

Dans un communiqué final, les chefs d’État et de gouvernement réunis à N’Djamena à l’initiative du président tchadien, Idriss Déby Itno, « ont pris acte de la démission » du président centrafricain et du Premier ministre. Selon des témoins, à l’annonce de la démission de Michel Djotodia, des scènes de liesses ont éclaté à Bangui ainsi que dans d’autres villes du pays. « C’est fini, c’est fini pour Djotodia », criaient des foules remplies de joie dans les rues de la capitale, alors que des blindés français prenaient position près du palais présidentiel situé non loin du camp De-Roux où se trouvent de nombreuses armes lourdes. L’Union européenne s’est engagée le même jour à soutenir les interventions militaires française et africaine par l’envoi d’une mission militaire en Centrafrique, comme l’avait souhaité la France.

La démission des deux têtes de l’exécutif suscite des réactions à travers le pays. L’ex-président François Bozizé s’est par exemple prononcé pour le retour à l’ordre constitutionnel. « C’est parce que cette légalité constitutionnelle a été bafouée que cela a causé le désastre et le chaos actuel. Pour nous, maintenant notre cap est celui du retour à la légalité constitutionnelle », a-t-il souligné, faisant allusion à son retour au pouvoir. « Ma réaction, c’est de dire qu’il nous appartient à nous Centrafricains, après les décisions du sommet de la Cééac, d’écrire une nouvelle page qui est celle de la réconciliation nationale, de la tolérance, de la justice et du pardon », a déclaré, quant à lui, l’ancien Premier ministre et chef de file de l’opposition, Martin Ziguelé. L’ex-chef du gouvernement du défunt président Ange-Félix Patassé a noté que le sommet de N’Djamena « n’est pas une victoire d’un camp sur un autre ». « C’est un nouveau défi. Aujourd’hui, nous sommes dans la démarche de la recherche de la paix et de la réconciliation nationale », a-t-il ajouté.

La question qui revient sur toutes les lèvres est celle de savoir si la démission de Michel Djotodia ouvrira véritablement la voie au retour de la paix et de la sécurité en RCA. « C’est le souhait de tous les Centrafricains. Michel a quitté le pouvoir, il a démissionné », répondent certains membres de la Séléka qui ne se privent pas de faire part d’un sentiment de sérénité dans le camp du président qui a été forcé à démissionner.

Depuis le renversement le 23 mars 2013 du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka, dirigée par Michel Djotodia, la Centrafrique a été emportée dans une spirale de violences communautaires et interreligieuses, qui ont provoqué des déplacements massifs de populations et nombreuses pertes en vies humaines. Rappelons que sur six présidents qui ont dirigé la Centrafrique depuis son indépendance le 13 août 1960, cinq ont pris le pouvoir par les armes : Jean-Bedel Bokassa (4 décembre 1976), David Dacko (1er septembre 1981), André Kolingba (1er septembre 1986), François Bozizé (15 mars 2003) et Michel Djotodia (24 mars 2013).

Nestor N'Gampoula