"Bomoko" : un nouveau challenge pour les musiciens RD-congolais

Samedi 17 Octobre 2015 - 8:41

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La nouvelle structure qui est en train de naître, apparaît déjà, à bien d’égards, comme une sorte de challenge pour une corporation, celle des artistes, qui ne s’est pas encore totalement affranchie de ses conflits et de ses frustrations.

En séjour à Goma, dans la suite de la première dame qui fêtait son anniversaire, les artistes-musiciens présents à cette circonstance, ont résolu de changer la donne musicale en République démocratique du Congo en matière de gestion de sorte que ses pratiquants puissent en tirer un maximum de bénéfices. Loin du tintamarre kinois, Papa Wemba et ses pairs ont pris le temps de réfléchir sur une démarche susceptible d’impulser une nouvelle dynamique à la musique congolaise aujourd’hui empêtrée dans une profonde stagnation. L’occasion faisant le larron, l’idée de fédérer les forces autour d’une structure commune, ou mieux, de créer une synergie de lutte contre tout ce qui gangrène cette musique, a germé. Félix Wazekwa, Mbilia Bel, Tshala Muana, Werrason, Bozi Boziana, Manda chante, Adolphe Dominguez, Karmapa et autres ont, séance tenante, donné leur quitus au projet. 

Ce moment de retrouvaille a permis d’ôter les barrières qui généralement calfeutrent les rapports entre des artistes vivant souvent éloignés et figés dans des relents narcissiques aux penchants suicidaires. L’ambiance bon enfant ayant caractérisé cette rencontre fortuite a convaincu les uns et les autres sur la nécessité de réitérer l’expérience à travers la création d’une structure permanente destinée à défense les intérêts de la corporation. À cette première réunion de prise de contact avait succédé une deuxième, tenue le 1er septembre à la Villa Kamiah, dans la commune de la Gombe. Le groupe de Goma a été élargi avec l’adhésion de nouveaux venus. C’est sur ces entrefaites que l’association « Bomoko » (Unité en lingala) était lancée ce jour-là en attendant que les bases administratives censées sous-tendre son action soient posées. On a comptabilisé de nombreux absents dont les vieux briscards Lutumba Simaro et Jeannot Bombenga réputés pour leur disponibilité à ces genres d’événements. Papa Wemba assisté de Monib production et de Senado, tous deux chargés de la communication et du marketing, ont été choisis pour piloter un comité de fait, encore embryonnaire et provisoire en attendant que les choses se précisent.

Bomoko pour quels objectifs ?

Entretemps, les motivations et les objectifs sur lesquels repose « Bomoko » sont loin d’être clairs. L’association brasse un peu de tout. Ceux qui s’expriment à ce sujet mettent plus d’emphase sur l’impératif de créer les conditions d’une réelle prise en charge des artistes musiciens RD-Congolais. Le terrain où l’association entend s’investir est à la fois large et complexe. De la lutte contre la piraterie et les antivaleurs à la récupération des droits d’auteur en passant par la question récurrente du manque des producteurs, l’invasion du Coupé décalé etc., tout ou presque sera passé au crible dans cette plate-forme présentée comme une bouée de sauvetage face à la perdition qui guettait la musique congolaise moderne. Dans la foulée, le « phénomène combattant » avec son cohorte d’équations toujours insolubles constitue aussi une matière à débat autant que les conflits qui opposent actuellement nombre d’artistes congolais. Que des chantiers pour « Bomoko » qui, visiblement, va dans toutes les directions sans une ligne directrice sûre au point de s’adjuger des compétences relevant plutôt du domaine des structures étatiques. De ce point de vue, avancent les analystes, l’Union des musiciens congolais (UMUCO) est, par conséquent, vidée de sa substance.   

« Nous continuons à réfléchir, nous ne sommes qu’au début », dixit Tshala Muana. Soit ! Une chose est vraie, c’est que l’unité tant recherchée dans « Bomoko » risque de n’être qu’un vœu pieux dès lors que ses principaux initiateurs sont les premiers à marcher à contre-courant du principe régulateur de l’association. Papa Wemba, Werrason, Félix Wazekwa et JB Mpiana sont en conflit ouvert avec Koffi Olomide. Ce dernier, marginalisé à souhait, a de bonnes raisons de croire à une cabale montée contre lui. Entretemps, le spectre du dossier Socoda avec la guerre des tranchées l’ayant caractérisé entre d’une part, le comité Paulin Mukendi appuyé par Werrason et celui sortant du tandem Jacques Mondonga-Blaise Bula écarté de la manière qu’on connaît, risque de faire ombrage à l’existence même de « Bomoko ». L'avènement de Vercky Kiamwangana à la tête de cette société nationale des droits d’auteur n’a fait qu’exacerber les rancœurs au sein de cette corporation qui brille par ses conflits.

Après un premier échec avec le fameux « Maïsha Park » de triste mémoire, cette nouvelle expérience se présente comme un challenge pour les artistes musiciens congolais obligés de se départir de leurs « égos » pour privilégier l’intérêt commun. Sans quoi, « Bomoko » va se révéler, au finish, une perte de temps et d’énergies.    

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Papa Wemba, un des co-fondateurs de Bomoko

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