Onesime Kukatula : « Une élection est un édifice fragile et complexe »Mardi 18 Octobre 2016 - 16:07 Souvent replié, préférant l’efficacité dans le silence à une volubilité sans contenu, le rapporteur adjoint de la Commission électorale, nationale et indépendante (Céni) Onesime Kukatula sait toujours défendre son institution en se dressant contre les clichés négatifs qui lui sont accolés, souvent à tort, par une certaine opinion souffrant d’un déficit d’informations. C’est, du reste, l’exercice auquel il s’est livré à cœur joie dans une récente intervention médiatique aux senteurs pédagogiques et, dans laquelle, il répond à toutes les préoccupations liées à la conduite du processus électoral en RDC. D’emblée, Onesime Kukatula a tenu à recadrer les choses par rapport à la recomposition de la Céni réclamée à tout vent par l'opposition dite radicale. La responsabilité de renouvellement de la Céni ne dépend pas de ses animateurs, fait savoir Onesime Kukatula. « Les membres de la Céni ayant été désignés par leurs entités conformément aux procédures fixées par la loi organique n°13/012 du 19 avril 2013, leur remplacement dépend de la volonté du législateur et des parties concernées », explique-t-il. Il déroule, à ce sujet, un argumentaire soutenant la stabilité de toute institution de gestion électorale à l’instar de la Céni. Il est internationalement prouvé, dit-il, « que la stabilité de l’organisme de gestion des élections est un atout majeur dans l‘organisation des élections crédibles, transparentes et apaisées ». Et de faire remarquer que depuis 2004, la RDC a déjà mis en place trois structures pour piloter les différends processus électoraux, à savoir la Commission électorale indépendante (CEI), la Céni 1 (2010-2013) et la Céni 2 (depuis juin 2013). Cela, sans compter les derniers changements intervenus en 2015, lesquels changements ont porté le président Corneille Naanga à la tête de la Céni en remplacement de l’abbé Apollinaire Malu Malu. Au total, « quatre équipes se sont succédé à la tête de la Céni en douze ans alors que le mandat des membres de la centrale électorale est de six ans », s’enquit Onesime Kukatula. Toutefois, en cas de force majeure, il émet le vœu de voir le choix des prochains animateurs de la Céni être guidé par la compétence et l’expertise électorale, gages du succès. La machine électorale relancée Parlant du processus électoral évoluant pour l’heure en dents de scie après des retards cumulés par rapport aux échéances électorales, Onesime Kukatula indique que toute la problématique se cristallise actuellement autour du consensus politique à dégager et de l’harmonisation des textes légaux. Ces deux dimensions constituent, d’après lui, les principaux déclencheurs des aspects techniques liés aux élections. Et d’ajouter que le consensus politique doit pouvoir lever des options majeures notamment sur la hiérarchisation des scrutins à venir. Ce qui est déjà fait depuis quelques heures avec l’adoption de l’accord politique découlant du dialogue. Il y est noté que « les élections présidentielle, législatives nationales et provinciales seront organisées en une seule séquence ». Quant aux élections locales, elles seront organisées concomitamment avec les trois premières si les moyens techniques et financiers le permettent. Maintenant que l’option de l’élaboration d’un nouveau fichier électoral biométrique est levée à la faveur dudit accord relançant par le fait même la machine électorale, Onesime Kukatula estime qu’il s’agit là d’un préalable majeur à la convocation de l’électorat pour la présidentielle. Cette option de la refonte totale du fichier électoral, de son point de vue, découlerait du consensus dégagé en son temps sur l’enrôlement de nouveaux majeurs par l’ensemble des parties prenantes au processus électoral et confirmé par le rapport d’audit de l’Organisation internationale de la francophonie. À ceux qui prêtent à la Céni l’intention malveillante de faire le jeu du pouvoir en tenant mordicus à organiser l’inscription des adolescents en âge de voter dans le but de prolonger astucieusement le bail de Joseph Kabila à la tête du pays, Onésime Kukatula estime que cette attitude traduit plutôt le souci de la centrale électorale « d’être à l’écoute de tous et de doter le pays d’un fichier électoral fiable, inclusif et consensuel ». Les indicateurs d’une bonne élection Pour Onesime Kukatula, la révision totale du fichier électoral, et donc l’inscription des électeurs, s’est imposée comme un impératif à l’organisation des élections en RDC. « Elle peut effectivement apaiser le climat électoral si elle est menée avec professionnalisme et transparence », indique-t-il avant d’asséner, avec fermeté : « Je peux garantir qu’au terme de l’inscription des électeurs, la RDC sera dotée d’un fichier électoral fiable constitué dans le respect des lois relatives aux élections ». Et d’indiquer, au-delà de tout, que l’inscription des électeurs n’est pas un choix de la Céni. Évoquant le libellé « délai constitutionnel » sur lequel l’opposition radicale fonde essentiellement son aspiration à l’alternance, le secrétaire rapporteur adjoint de la Céni tente de le cerner dans son vrai contexte. « Le respect des délais constitutionnels sous-entend de convoquer l’électorat quatre-vingt-dix jours avant la fin du mandat du président de la République conformément à l‘article 73 de la Constitution », explique-t-il. Et de renchérir : « Or, l’électorat reste à déterminer et, donc, il apparaît inopportun de parler du délai constitutionnel sans électorat ». En guise de conclusion, Onésime Kukatula émet quelques postulats, fruit de sa riche expérience électorale : « Une élection est un édifice fragile, complexe, reposant sur des fondations qui doivent être solides. La qualité du vote dépend de la mise en œuvre efficace de multiples opérations et procédures. La bonne organisation des élections dépend de trois indicateurs, à savoir les délais légaux, les délais opérationnels et les délais techniques. Si l’on veut aboutir à de bonnes élections, il est absolument important de tenir compte de ces trois indicateurs sans les dissocier ». Alain Diasso Légendes et crédits photo :Onesime Kukatula Notification:Non |